La FIDH et la LDH se réjouissent de la décision rendue aujourd’hui, à l’unanimité, qui sanctionne la France pour avoir porté atteinte à la liberté d’expression de plusieurs militants prônant le boycott des produits israéliens. Elles s’étaient joints au recours qu’ils avaient formé contre une décision de la Cour de Cassation qui avait confirmé leur condamnation sur le fondement de la loi contre le racisme.
Cette décision met en évidence que la critique des autorités israéliennes et l’usage de moyens pacifiques pour s’opposer à leur politique ne sauraient être confondu avec une manifestation d’antisémitisme.
La FIDH et la LDH espèrent que le gouvernement français respectera cette décision protectrice de la liberté d’expression.
Le 5 juin à 23h50, le syndicat Synergie-Officiers de la police nationale tweetait ceci :
« Journée de deuil pour nombre de participants de la manifestation du 10 novembre 2019 (à 2 pas de Charlie Hebdo) pour partie recyclés dans le business des pseudos #ViolencesPolicieres et qui pratiquent le #racisme décomplexé quand il s’agit de #policiers. »
Pour illustrer le deuil auquel il est fait référence, le tweet ajoutait un lien vers l’article « Mali : la France annonce l’élimination du chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique » publié sur le site du Point le 5 juin au soir.
« Nombre » de participants à la marche du 10 novembre contre l’islamophobie seraient donc, selon ce syndicat, des partisans d’Al-Qaïda. L’amalgame est grave et lourd de sens, il est habituellement manié par l’extrême droite.
Pour préciser de qui il parle, Synergie précise qu’il s’agit des participants à la marche qui sont aujourd’hui « recyclés dans le business des violences policières ».
Quant à la mention d’un « racisme décomplexé quand il s’agit de policiers » c’est une accusation qui vise à empêcher la contestation de violences policières. Ces violences ne sont pas des « dérives individuelles » : c’est bien une institution gangrénée par le racisme qui les produit.
Nos organisations ont appelé à la Marche du 10 novembre contre l’islamophobie, elles dénoncent aujourd’hui les violences policières grandissantes dans notre pays : elles sont donc directement visées par le syndicat Synergie-Officiers.
Synergie se présente comme un « syndicat majeur du corps de commandement de la Police Nationale » et est affilié à la CFE-CGC.
Les propos contenus dans le tweet de ce syndicat sont au minimum injurieux et mensongers et nous ne nous laisserons pas calomnier.
Nous continuerons de nous mobiliser contre l’islamophobie et tous les racismes, nous continuerons de dénoncer les violences policières.
Paris, le 8 juin 2020
Signataires : Attac, Association pour la taxation des transactions financières et l’action citoyenne ; Cedetim, Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale ; Collectif du 10 novembre contre l’islamophobie ; Comité Adama ; FUIQP, Front uni des immigrations et des quartiers populaires ; LDH, Ligue des droits de l’Homme ; Union syndicale Solidaires
Campagne de plusieurs organisations dont les EGM, dont la LDH est membre
Depuis le début de la crise sanitaire, de nombreux collectifs et organisations se sont mobilisés pour la régularisation pérenne et inconditionnelle de toutes les personnes sans-papiers. Aujourd’hui, ils s’associent pour lancer une campagne commune, et annoncent une journée nationale de mobilisation le 13 juin prochain.
Au cours des mois d’avril et mai, se sont succédé tribunes, communiqués de presse, lettres ouvertes et blogs pour réclamer que les personnes sans papiers soient régularisées et dénoncer les situations administratives précaires (voir à ce sujet le fil d’actualité du Gisti).
Ces initiatives ont surgi de toute part : collectifs de sans-papiers, associations de soutien, collectifs informels, syndicats, organisations politiques, élu-e-s dont parlementaires, collectivités territoriales… La pandémie de Covid-19 a mis en lumière tout un pan de la société oublié : des dizaines de milliers de personnes étudient, travaillent, élèvent des enfants, paient des impôts… ou plus généralement vivent en France, certaines depuis des années.
Les arguments en faveur d’une régularisation au sens large sont nombreux. Alors que toute personne vivant sur notre territoire, quel que soit son statut ou sa nationalité, doit avoir accès aux droits les plus fondamentaux :
les situations administratives précaires ou irrégulières privent de quasiment tous les dispositifs de protection sociale – dont l’importance a été particulièrement manifeste ces dernières semaines ;
trop d’obstacles, à tout moment, rendent difficile chaque démarche de la vie courante ;
sans droit au travail, il est difficile d’échapper à la dépossession de toute autonomie ou à l’exploitation ;
la crainte quotidienne de l’arrestation, la menace permanente de l’expulsion, constituent une pression insupportable.
Cette injustice doit cesser !
Pour l’égalité des droits : régularisation de toutes et tous, maintenant ! Un titre de séjour, pérenne, sans condition, à toutes celles et tous ceux qui vivent en France.
Nous, organisations et collectifs à l’initiative des multiples appels précédents : Anvita*, Ciele*, Collectif Interorga de Rennes, EGM*, Marche des solidarités, Modus operandi, RUSF38* nous nous associons pour lancer une campagne à partir du samedi 30 mai 2020
Les organisations à l’origine de cette campagne appellent à une journée nationale d’actions : « Régularisation de toutes et tous » le 13 juin 2020 !
N’hésitez pas à consulter la page Facebook et à associer dès maintenant vos actions à cette campagne en utilisant le #Régularisation.
*Anvita : Association nationale des villes et territoires accueillants
*Ciele : Collectif InterSquats des Exilé-e-s Lyon et Environs
*EGM : États Généraux des Migrations
*RUSF38 : Réseau universitaire sans frontière 38
Mardi 9 juin, George Floyd sera inhumé à Houston, au Texas.
La mort dramatique de cet Afro-Américain tué par des policiers à Minneapolis, aux Etats-Unis d’Amérique, est insupportable et symbolique. Elle suscite une légitime émotion partout dans le monde tant elle réveille des ressentiments profonds d’injustice et d’impunité face à des pratiques policières violentes ou discriminatoires.
La Ligue des droits de l’Homme (LDH) soutient toutes les initiatives d’hommage et de solidarité qui seront organisées, ce mardi 9 juin 2020 en France, contre les violences et discriminations venant d’institutions chargées au contraire de les prévenir.
Appel de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, un partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT)
FRA 001 / 0817 / OBS 092.3
Relaxe /
Harcèlement judiciaire
France
4 juin 2020
L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, un partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence dans la situation suivante en France.
Nouvelles informations :
L’Observatoire a été informé par la Ligue des droits de l’Homme (LDH) de la poursuite du harcèlement judiciaire à l’encontre de M. Cédric Herrou, militant engagé dans des actions d’aide et d’accueil des personnes migrantes et réfugiées notamment dans la vallée de la Roya, région des Alpes Maritimes qui borde la frontière italienne, et président de Défends ta citoyenneté (DTC)[1] . M. Herrou dénonce particulièrement le refoulement illégal de migrants, notamment des mineurs, des Alpes Maritimes vers l’Italie.
Selon les informations reçues, le 22 mai 2020, l’avocat général du Parquet de Lyon a formé un pourvoi en cassation contre la relaxe de M. Cédric Herrou. Cette nouvelle n’est parvenue par voie postale aux avocats de M. Herrou que le 28 mai 2020.
Le 13 mai 2020, la Cour d’appel de Lyon avait, dans un nouveau jugement, relaxé M. Cédric Herrou des poursuites d’« aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’étrangers en France » qui pesaient à son encontre, alors que lors de l’audience du 11 mars 2020, le parquet général avait requis huit à dix mois de prison avec sursis à son encontre. M. Cédric Herrou a également été dispensé de peine pour les faits d’« installation en réunion sur un terrain appartenant à autrui [en l’occurrence un terrain de la SNCF, transformé en « squat des lucioles »] sans autorisation, en vue d’y habiter », qu’il n’avait pas contestés (voir rappel des faits).
Le 12 décembre 2018, la Chambre criminelle de la Cour de cassation[2] avait partiellement annulé la condamnation de M. Cédric Herrou suite à la consécration du « principe de fraternité » par le Conseil constitutionnel, et l’avait renvoyé devant la Cour d’appel de Lyon pour y être à nouveau jugé à la lumière de la nouvelle rédaction de l’article 622-4 du Ceseda qui exonère de poursuites pénales l’aide à la circulation ou au séjour irrégulier d’un étranger « lorsque l’acte reproché n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et a consisté à fournir des conseils ou accompagnements juridiques, linguistiques ou sociaux, ou toute autre aide apportée dans un but exclusivement humanitaire »[3] (voir le rappel des faits).
L’Observatoire condamne fermement la poursuite du harcèlement judiciaire à l’encontre de M. Cédric Herrou et appelle les autorités françaises à mettre un terme à tout acte de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à son encontre et celle de l’ensemble des défenseurs des droits des personnes migrantes et des réfugiés en France. L’Observatoire appelle tout particulièrement la Cour de cassation à analyser le pourvoi en cassation de l’avocat général du Parquet de Lyon contre la relaxe de M. Herrou au regard du « principe de solidarité et de fraternité » issu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Rappel des faits :
La vallée de la Roya dans les Alpes Maritimes, qui compte 5 000 habitants, est le théâtre d’une vaste opération policière visant à intimider le passage et la présence de migrants. La vallée est en permanence surveillée par environ quatre cents policiers et/ou gendarmes, qui opèrent un contrôle strict du déplacement de toute personne « d’apparence étrangère », selon les témoignages des associations. Des dizaines de migrants se cachent et se mettent en danger pour échapper à la police. Ainsi, il y aurait eu officiellement 18 décès de personnes migrantes constatés par les pompiers depuis l’été 2016. En outre, lorsque des personnes sont appréhendées par la police aux frontières française, plusieurs témoignages font état de refoulement vers l’Italie, en violation des procédures relatives au droit d’asile. En l’absence de processus d’accueil et d’accompagnements, des habitants se mobilisent pour apporter une aide humanitaire ou un soutien juridique ou social aux personnes migrantes présentes dans la région.
Le 11 août 2016, M. Cédric Herrou a été interpellé à la sortie de son domicile et placé en garde à vue par la police aux frontières de Menton, alors qu’il conduisait un véhicule avec à son bord huit personnes migrantes d’origine érythréenne sans papiers d’identité.
Lors de son interrogatoire, M. Cédric Herrou revendiquait une action humanitaire ancienne auprès des migrants afin de leur permettre de se nourrir, de se laver et de se réchauffer avant de les conduire à la gare ferroviaire la plus proche sans percevoir aucune contrepartie.
L’affaire fut classée sans suite par la justice française au motif de l’« exemption humanitaire » prévue par la loi. En effet, le Ceseda exonère de poursuites pénales « toute personne physique ou morale, lorsque l’acte reproché n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et consistait à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger, ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci » (article L. 622-4 du Ceseda).
Le 20 octobre 2016, une patrouille de gendarmerie a évacué un immeuble désaffecté de la Société nationale des chemins de fer (SNCF) à Saint Dalmas de Tende, organisé en centre d’accueil temporaire pour étrangers en situation irrégulière en provenance d’Érythrée et du Soudan, dont 29 mineurs, par plusieurs associations dont Roya citoyenne, Médecins du monde, Amnesty International, Association démocratie Nice (ADN), Habitat & citoyenneté, Réseau éducation sans frontières (RESF), Cimade 06, MRAP 06, et la Ligue des droits de l’Homme (LDH). Sur place étaient également présents plusieurs représentants d’associations locales, y compris la section de Cannes et de Grasse de la LDH et M. Cédric Herrou. Trois bénévoles ont été arrêtés dont M. Herrou. Dans leur procès-verbal, les gendarmes ont conclu à une occupation illicite du bien immobilier appartenant à la SNCF « ne permettant pas d’accueillir dans des conditions sanitaires et sécuritaires les personnes affaiblies, malades et souvent mineures ». M. Herrou a été gardé 48 heures en garde à vue et les deux autres bénévoles 24 heures. Le parquet de Nice a alors décidé d’engager des poursuites pénales contre M. Herrou à la suite de ce procès-verbal. Aucun des autres bénévoles ou associations présentes n’a été inquiété. M. Herrou a été placé sous contrôle judiciaire : il a été assigné à résidence, interdit de quitter le département des Alpes Maritimes et interdit de conduire un véhicule. Son mini van a de plus été saisi par la police.
Le 10 février 2017, le Tribunal correctionnel de Nice a condamné M. Cédric Herrou pour « aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’un étranger en France » à une amende de 3 000 Euros. Il a été fait appel de la décision.
Le 26 juillet 2017, le parquet de Grasse a mis M. Cédric Herrou en examen pour « aide à l’entrée et à la circulation d’étrangers en situation irrégulière », infraction soumise à une peine allant jusqu’à cinq ans de prison et 30 000 euros d’amende. M. Cédric Herrou avait été arrêté le 24 juillet 2017 à la gare de Cannes dans un train dans lequel voyageaient 156 personnes migrantes qui se rendaient à Marseille pour déposer une demande d’asile. M. Herrou était présent dans le train de Nice à Cannes afin de filmer d’éventuelles interpellations. Après avoir été maintenu en garde à vue pendant deux jours, sa sixième depuis 2016, M. Cédric Herrou a été placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de quitter le territoire français et d’accéder aux gares et aux parvis de gare des Alpes Maritimes.
Le 8 août 2017, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné M. Cédric Herrou à quatre mois de prison avec sursis et à verser 1 000 Euros de dommages et intérêt à la Société nationale des chemins de fer (SNCF pour « aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France » commis en octobre 2016 (article L. 622-1 du Ceseda) et « faits d’installation en réunion sur le terrain d’autrui [la SNCF], sans autorisation, en vue d’y habiter » (article 322-4-1 du Code pénal). Pendant le procès, l’avocat général a invoqué qu’il y avait eu une contrepartie à l’aide apportée par M. Herrou, car « lorsque l’aide s’inscrit dans la contestation globale de la loi, elle sert une cause militante et constitue à ce titre une contrepartie ». L’avocat général avait requis huit mois de prison avec sursis lors de l’audience du 19 juin 2017.
Le 17 août 2017, M. Herrou a été convoqué à une audition libre car il était « soupçonné d’avoir commis ou tenté de commettre l’infraction d’injure publique envers un fonctionnaire dépositaire de l’autorité publique par un moyen de communication par voie électronique et ce les 12 et 13 juin 2017 ». Cette convocation, qui faisait suite à une plainte déposée par le préfet, était liée à un post Facebook dans lequel il critiquait la politique mise en place à l’encontre des migrants dans la région.
Le 12 septembre 2017 vers 9h, M. Cédric Herrou et un demandeur d’asile qui vit chez lui se sont rendus à la gendarmerie de Breil suite à une convocation donnée sans explications. A leur arrivée, ils ont été arrêtés et mis en garde à vue pour « violences » et « séquestration ». Vers 10h, 15 policiers ont mené une perquisition sur le terrain de M. Herrou, et ont fouillé la caravane où vit le demandeur d’asile. Au cours de cette perquisition, des dégâts ont été occasionnés sur une caravane et trois tentes ont été déchirées. M. Herrou et le requérant d’asile ont ensuite été transférés de la gendarmerie de Breil à la police aux frontières de Menton puis à la caserne de police Auvare à Nice. Les deux n’ont été libérés qu’aux environs de 16h le 13 septembre, après plusieurs interrogatoires et une confrontation.
Cette nouvelle procédure fait suite à une plainte déposée par un trafiquant d’êtres humains dénoncé par M. Herrou fin juillet et condamné à huit mois de prison ferme dans la foulée. En effet, fin juillet, M. Herrou avait découvert un passeur parmi les personnes qu’il hébergeait et qui avait reconnu les faits. M. Herrou et son équipe avait alors contacté la gendarmerie vers 11h du matin. En attendant l’arrivée de cette dernière, M. Herrou et ses bénévoles se sont relayés sur le canapé à côté du passeur pour éviter qu’il ne s’échappe. Pendant cette attente, il a pu avoir de l’eau, le droit d’aller aux toilettes, et des repas. Vers 19h, alors que la gendarmerie ne s’était toujours pas déplacée, M. Herrou et son équipe l’avaient conduit à la gendarmerie, où il a été arrêté. Aucune violence n’a été exercée pendant cette période. Le demandeur d’asile placé en garde à vue le 12 septembre en compagnie de M. Cédric Herrou avait également participé à son arrestation par la police.
A partir du 10 août 2018, le contrôle judiciaire de M. Herrou a été assoupli. Ce dernier a pu désormais se rendre à l’étranger, sauf en Italie – où il ne peut se rendre que pour les besoins de son exploitation agricole.
Le 12 décembre 2018, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a partiellement annulé la condamnation de M. Cédric Herrou. Faisant application de la loi nouvelle n° 2018-778 du 10 septembre 2018 « pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie », qui tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel n° 2018/718 du 6 juillet 2018[4] concernant le « délit de solidarité », la Cour de Cassation a annulé la décision de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence concernant la déclaration de culpabilité du chef d’infractions au Code de l’entrée et du séjour des Étrangers et du droit d’asile (Ceseda) et la peine, toutes les autres dispositions étant expressément maintenues.
Mr. Cédric Herrou a été renvoyé devant la Cour d’appel de Lyon pour y être à nouveau jugé, à la lumière de la nouvelle rédaction de l’article 622-4 du Ceseda qui exonère de poursuites pénales l’aide à la circulation ou au séjour irrégulier d’un étranger « lorsque l’acte reproché n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et a consisté à fournir des conseils ou accompagnements juridiques, linguistiques ou sociaux, ou toute autre aide apportée dans un but exclusivement humanitaire ».
L’annulation de la condamnation en raison d’une aide humanitaire apportée sans contrepartie ne s’applique que pour le chef d’accusation d’aide au séjour et à la circulation d’un étranger, mais ne vaut pas pour celui d’aide à l’entrée sur le territoire national, ni pour l’installation sur le terrain d’autrui (celui de la SNCF) sans autorisation. Actions requises :
L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités françaises en leur demandant de :
Mettre un terme à toutes formes de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, d’intimidation et d’entraves à l’encontre de M.Cédric Herrou, ainsi que de l’ensemble des défenseur.e.s des droits humains et particulièrement des droits des personnes migrantes et réfugiées en France ;
Analyser le pourvoi en cassation de l’avocat général du Parquet de Lyon contre la relaxe de M. Cédric Herrou au regard de la décision du Conseil constitutionnel qui, faisant suite à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), a consacré la valeur constitutionnelle du « principe de fraternité » et s’est traduite, dans la loi asile et immigration du 10 septembre 2018, par une rédaction plus extensive de l’article 622-4 du Ceseda, sur les exemptions de poursuites pénales ;
Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à ses articles 1 et 12.2 ;
Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la France.
M. Christophe Castaner, Ministre de l’intérieur, Twitter : @Ccastaner
M. Jean Yves le Drian, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Twitter : @JY_LeDrian
Mme Nicole Belloubet, Ministre de la Justice, Fax : +33 1 44 77 60 00, Twitter : @Nbelloubet
Mme Christine Lazerges, Président de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), Fax : +33 1 42 75 77 14 ; E-mail : ; Twitter : @CNCDH
M. François Rivasseau, Ambassadeur, Représentant permanent de la République française auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, Fax : +41 22 758 91 37 ; E-mail : ; Twitter : @FranceONUGeneve
M. Philippe Léglice-Costa, Représentant permanent de la République française auprès de l’Union européenne à Bruxelles, Fax : +32 22 30 99 50 ; E-mail : ; Twitter : @RPFranceUE
Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de la France dans vos pays respectifs.
*** Paris-Genève, le 4 juin 2020
Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toute action entreprise en indiquant le code de cet appel.
L’Observatoire partenariat de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. La FIDH et l’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civile internationale.
Lettre ouverte de plusieurs personnalités, dont Malik Salemkour, président de la LDH, concernant la surpopulation carcérale
Monsieur le Président,
Pour la première fois depuis près de vingt ans, il y a en France moins de prisonniers que de places de prison. Conséquence d’une crise sanitaire sans précédent, ce qui était hier impossible est devenu réalité : en deux mois, le nombre de personnes détenues a été réduit de plus de 13 500.
Cette situation fait naître un fol espoir. Car si elle résulte de circonstances exceptionnelles, elle impose une évidence incontestable : réduire la population carcérale, prendre en charge en milieu libre ceux qui peuvent ou doivent l’être, n’est ni déraisonnable, ni dangereux. C’est, au contraire, une mesure de salut public. Ces vingt dernières années, la France a connu une inflation carcérale continue qui a contraint les personnes détenues à vivre dans la promiscuité et l’indignité, et a condamné l’institution pénitentiaire à une quête vaine pour donner du sens à une peine de prison avant tout synonyme de désolation, désocialisation et déshumanisation. La baisse inédite que nous venons de connaître nous rappelle qu’une autre voie est possible. Que la volonté politique alliée à la mobilisation de l’ensemble des acteurs de la justice permet de remettre ou de maintenir en liberté des milliers de personnes sans que cela ne présente de danger en termes de sécurité.
Monsieur le Président, nous appelons à ce que cet espoir ne soit pas tué dans l’œuf. Il est essentiel de tout mettre en œuvre pour que la population carcérale ne reparte à la hausse dès la menace immédiate écartée. Le 30 janvier dernier, la Cour européenne des droits de l’homme condamnait la France pour les conditions de détention indignes qui règnent dans ses prisons et, surtout, sommait le gouvernement de prendre des mesures en vue de « la résorption définitive de la surpopulation carcérale ». Avec l’expiration du délai d’appel, cette décision historique est devenue, ce 30 mai, définitive.
La crise que nous traversons amène chacun à faire la preuve de sa capacité à se réinventer : nous demandons que, dans le domaine des prisons comme dans tant d’autres, les enseignements soient tirés. Qu’à la gestion de l’urgence succède une véritable politique de déflation carcérale à même de garantir l’encellulement individuel et des conditions de détention dignes et de favoriser la prise en charge en milieu libre de ceux qui peuvent ou doivent l’être. Nous attendons de la France qu’elle ne soit plus pointée du doigt par les instances européennes pour les traitements inhumains et dégradants qu’elle inflige aux prisonniers.
En mars 2018, vous affirmiez : « Je sais qu’une nation est jugée aussi à travers ses prisons. Beaucoup ne voudraient plus les voir, considérant que c’est la part maudite d’une nation. Mais nous serons regardés à l’aune de ce que nous ferons de cette part de nous-mêmes. » Le moment est venu, l’occasion est là : ne la manquez pas.
Paris, le 3 juin 2020
Premiers signataires : Estellia ARAEZ, présidente du Syndicat des avocats de France · Pierre-Martin AUBELLE, président de Possible · Aurélien BEAUCAMP, président de Aides · Esther BENBASSA, sénatrice (EELV) · Ugo BERNALICIS, député (LFI) · Delphine BOESEL, présidente de l’Observatoire international des prisons-section française · Philippe de BOTTON, président de Médecins du Monde France · Rachida BRAKNI, comédienne · Guy-Bernard BUSSON, président de l’Association nationale des assesseurs extérieurs en commission de discipline (ANAEC) · Olivier BRUNHES, dramaturge et écrivain · Dr Béatrice CARTON, présidente de l’Association des professionnels de santé exerçant en prison (APSEP) · Yvon CORVEZ, président du Club informatique pénitentiaire (CLIP) · Sorj CHALANDON, écrivain et journaliste · Philippe CLAUDEL, écrivain et réalisateur · Olivier COUSI, bâtonnier de Paris · Cécile DANGLES, présidente de l’Association nationale des juges de l’application des peines (ANJAP) · Marie DARRIEUSSECQ, écrivaine · Benoît DAVID, président de Ban Public · Dr Michel DAVID, président de l’Association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire (ASPMP) · Christophe DELTOMBE, président de la Cimade · Xavier DENECKER, président de l’Association nationale des visiteurs de prison (ANVP) · Brice DEYMIÉ, aumônier national protestant · Rokhaya DIALLO, journaliste et réalisatrice · Flore DIONISIO, secrétaire nationale CGT insertion-probation · Marie DESPLECHIN, écrivaine · Katia DUBREUIL, présidente du Syndicat de la magistrature · Éric DUPOND-MORETTI, avocat · Antoine DURRLEMAN, président du Casp-Arapej · Alexandre DUVAL-STALLA, président de Lire pour en sortir · Annie ERNAUX, écrivaine · Didier FASSIN, anthropologue · Éric FASSIN, sociologue · Véronique FAYET, présidente du Secours catholique · Christiane FÉRAL-SCHUHL, présidente du Conseil national des Barreaux · Hélène FONTAINE, présidente de la Conférence des bâtonniers · Bernadette FORHAN, présidente de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat) · Florent GUEGUEN, directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité · Marie HARDOUIN, présidente du Courrier de Bovet · Nancy HUSTON, écrivaine · Stéphane JACQUOT, fondateur de l’Association nationale pour la justice réparatrice · Grégoire KORGANOW, photographe · Jacqueline LAFFONT, avocate · Guy LARIBLE, président d’Auxilia · Christine LAZERGES, professeure émérite de l’Université Paris 1, ancienne présidente de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) · Henri LECLERC, avocat · Laurence LE LOUËT, co-secrétaire nationale du Syndicat national des personnels de l’éducation et du social-Protection judiciaire de la jeunesse (SNPES-PJJ/FSU) · Pierre LEMAITRE, écrivain · Amélie MORINEAU, présidente de l’association des avocats pour la défense des droits des détenus (A3D) · Florence MORLIGHEM, députée (LREM) · Jean-François PENHOUET, Aumônier national catholique · Franck PITIOT, comédien · Olivier PY, directeur du Festival d’Avignon · Nathalie QUINTANE, écrivaine · Dominique RAIMBOURG, ancien député (PS) · Flavie RAULT, secrétaire générale du Syndicat national des directeurs de prison (SNDP-CFDT) · Laurence RICHARD, secrétaire générale du Syndicat national de l’ensemble des personnels de l’administration pénitentiaire (SNEPAP-FSU) · Sophie ROCHE, vice-présidente d’Emmaüs France · David ROCHEFORT, écrivain · Christian SAINT-PALAIS, président de l’Association des avocats pénalistes (ADAP) · Malik SALEMKOUR, président de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) · Lydie SALVAYRE, écrivaine · Alexis SAURIN, président de la Fédération des associations réflexion action prison et justice (Farapej) · Anne SINCLAIR, journaliste · Marielle THUAU, présidente de Citoyens & Justice · Bruno SOLO, comédien · Patrice SPINOSI, avocat · Alain VILLEZ, président des Petits frères des Pauvres · Aumônerie musulmane · Aumônerie bouddhiste des prisons…
La Ligue des droits de l’Homme (LDH) a pris connaissance avec stupeur de la convocation de Pascale Pascariello, journaliste de Mediapart, en qualité de suspect pour des faits de recel de secret professionnel, s’inscrivant dans le cadre de l’affaire Geneviève Legay. Agée de 74 ans, cette dernière a été victime de violences policières particulièrement graves, au cours d’une manifestation pacifique à Nice.
La communication mensongère du procureur de la République de Nice et du président de la République, déniant l’implication des forces de police dans ses blessures, avait été démontée à la suite d’un travail journalistique important, avec notamment la collaboration de forces de l’ordre qui avaient refusé les ordres de violence, manifestement disproportionnés, ordonnés par le commandant de police. La révélation de ces mensonges avait conduit à la mutation du procureur de la République de Nice vers la cour d’appel de Lyon.
La convocation de cette journaliste, qui a réalisé ses investigations en parfaite adéquation avec les textes et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) protégeant les investigations journalistiques, constitue une nouvelle violation évidente de la liberté de la presse visant à contourner le principe essentiel du secret des sources en intimidant ces dernières pour paralyser la manifestation de la vérité dans de tels scandales.
La liste de ces mesures de rétorsion ne cesse de s’allonger. Ainsi de citer les dernières en date : tentative de perquisition des locaux de Mediapart en février 2019, audition de journalistes de Disclose par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) en avril 2019 pour la révélation d’une note classifiée concernant l’utilisation d’armes françaises dans la guerre au Yémen, audition d’Ariane Chemin, journaliste du Monde, par la DGSI comme suspect en mai 2019 dans l’affaire Benalla, audition de quatre journalistes de Mediapart, dont son directeur de la publication, comme suspects dans le cadre de la même affaire Benalla, en octobre 2019.
La LDH leur apporte son soutien sans faille et condamne avec la plus grande fermeté l’instrumentalisation de la justice visant à entraver le travail journalistique, essentiel au fonctionnement démocratique.
Pétition signée par Malik Salemkour, et soutenue par la LDH
C’est la première région laitière de France. Près de la moitié de la viande y est produite. La Bretagne est au cœur du système agricole national, au cœur de tous les enjeux d’ampleur qui y sont liés : santé, environnement, social… Et pourtant, il est très difficile d’être informés correctement sur un secteur omniprésent dans notre région : l’agroalimentaire.
Des journalistes sont poursuivi·es en diffamation ou mis·es au placard pour leurs enquêtes, tandis que d’autres, précaires, peinent à retrouver des emplois. Des articles sont censurés, des sujets pas abordés de peur de fâcher les annonceurs, et des subventions municipales sont coupées, comme ce fut le cas pour une radio en pleine émission sur l’élevage intensif.
Le cas d’Inès Léraud est l’exemple de trop. Journaliste et co-auteure de la bande dessinée « Algues vertes, l’histoire interdite », elle subit des pressions, dénoncées par un comité de soutien qui s’est monté pour défendre son travail. Le salon du livre de Quintin l’invite ? Sa venue est annulée après l’intervention d’un élu local, également salarié de la chambre d’agriculture des Côtes-d’Armor, comme le révèle Le Canard enchaîné en mars 2020. Une édition en breton de sa BD est à l’étude ? L’éditeur Skol Vreizh y renonce, en partie « du fait de l’influence au sein du conseil régional de personnes en charge de l’agriculture », selon son président cité par France 3, le 20 mai 2020.
Il est inacceptable qu’une maison d’édition en arrive à s’auto-censurer de peur d’être sanctionnée financièrement par la collectivité. Que doit-on y voir ? Que des intérêts privés liés à l’agro-industrie pourraient influencer les attributions de budgets et les décisions des représentant·es de la région ? Il aura fallu la publication d’une tribune, le 8 mai, dans Libération pour qu’une partie du monde culturel breton s’indigne. Une réaction à la suite de laquelle vous, MM. Chesnais-Girard et Le Boulanger, avez décidé d’apporter publiquement votre soutien à la journaliste Inès Léraud. Mais les interrogations persistent quant à la liberté réelle d’informer sur ce sujet.
Les citoyen-nes et administré-es ont besoin d’enquêtes journalistiques qui lèvent le voile. La région Bretagne, collectivité que vous présidez, ne peut laisser place au doute quant à son attachement à la liberté d’informer et d’être informé·es correctement. D’autant plus que le succès de l’ouvrage « Algues vertes, l’histoire interdite », écoulé à 46.000 exemplaires, témoigne de l’intérêt croissant des citoyen·s sur les enjeux et pratiques de l’agroalimentaire.
C’est pourquoi, par la présente, nous, citoyen-es, soutenons les journalistes et professionnel.les de la presse qui vous demandent de :
Contribuer à garantir une information et une parole publique libre sur les enjeux de l’agroalimentaire en Bretagne, et veiller à ce qu’aucune subvention de média associatif ne soit supprimée, au motif que des journalistes auraient signé cette lettre. Nous y veillerons aussi.
Certifier que nous, journalistes, pouvons interroger en toute transparence et indépendance des élu·es et membres des services régionaux sur ces sujets chaque fois que cela est nécessaire.
Assurer qu’aucune maison d’édition ne verra ses subventions coupées, maintenant ou dans les prochaines années, pour avoir édité la BD d’Inès Léraud et Pierre Van Hove, « Algues vertes, l’histoire interdite », en breton et en gallo.
Intervenir plus largement pour le soutien et la restauration de lieux de formations universitaires à l’information en région.
Et, puisque les ministères de l’Intérieur et de l’Agriculture ont impulsé la création des observatoires départementaux de « l’agribashing », nous vous demandons expressément de contribuer à la création d’un observatoire régional des libertés de la presse. Cet outil indépendant aura pour but de réunir les conditions d’une information transparente et intelligible par tous les Breton-nes. Il devra permettre l’écoute et la protection de journalistes qui viendraient à être inquiété·es pour leurs travaux, et soutenir les enquêtes en cours et à venir.
Le collectif à l’origine de la lettre ouverte originale rassemble une quinzaine de journalistes d’âges, de parcours et de médias différents. Il s’est spontanément constitué face aux difficultés persistantes à produire et diffuser une information digne de ce nom : ici en Bretagne en 2020, dans un contexte où la compréhension des enjeux est fondamentale et à l’heure où l’éclairage des choix de société est essentiel, l’agro-industrie continue à être une zone interdite.
Argumentaire de la LDH concernant l’application StopCovid
Bien que le parlement ait voté en faveur du déploiement de l’application StopCovid, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) continue à alerter sur les dangers pour la vie privée et les libertés que présente son utilisation. Sécurité, fiabilité, anonymat, inefficacité, discriminations, durée de conservation et effacement, consentement « faussé », acceptabilité d’une surveillance généralisée, tels sont les problèmes que pose StopCovid.
Rappel du fonctionnement
L’application StopCovid installée volontairement sur son smartphone permettra à une personne testée positive au coronavirus d’alerter automatiquement tous les utilisateurs avec lesquels le Bluetooth de son smartphone a été en contact récemment (moins d’un mètre et plus de quinze minutes), afin qu’ils se fassent tester.
Fiabilité, sécurité
L’inventeur du Bluetooth qui permet aux appareils électroniques de communiquer entre eux alerte sur :
• le manque de fiabilité : le Bluetooth n’a pas été prévu pour mesurer des distances entre les personnes ce qui entraîne des risques d’une part de ne pas détecter des cas positifs (ceux qui ont vraiment été en contact mais ne seraient pas informés peuvent continuer à contaminer) ou au contraire des fausses alertes (risques de demandes de tests et encombrement des services de santé) ;
• le manque de sécurité du Bluetooth qui devra être activé en permanence permet le piratage de toutes les données du téléphone.
Efficacité incertaine
Les épidémiologistes indiquent que 60% de la population devrait utiliser l’application pour qu’elle soit efficace, or les expériences de Singapour ou Corée du Sud montrent que seuls 15 à 30% l’ont installée.
Discriminations
Le choix d’une application sur smartphone exclut une grande partie de la population (seulement 44% des plus de 70 ans en possèdent un et 14% des Français ne sont pas à l’aise avec l’installation d’une application ou l’activation du Bluetooth) pourtant c’est cette classe qui est considérée comme la plus « à risques ».
L’anonymat n’est pas garanti en raison même de la conception de l’application fonctionnant avec des pseudonymes qui permettent toujours la ré-identification et seront distribués par un serveur central (qui peut toujours être piraté). Ceci est d’autant plus dangereux qu’il s’agit de données de santé, par définition extrêmement sensibles qui sont en général protégées par le secret médical.
Par ailleurs, nul ne peut ignorer que les systèmes d’exploitation des smartphones, Android et iOS, permettent à leur fournisseur Google et Apple de récupérer des données personnelles, les données de StopCovid ne devraient pas leur échapper.
Si ces données restaient vraiment anonymes, leur traitement n’aurait pas besoin de l’aval de la Cnil, or le gouvernement lui a pourtant demandé son avis qui bien que favorable émet pourtant des réserves.
Durée de conservation
Le gouvernement promet que les données seront effacées à la fin de l’épidémie mais il reste par ailleurs très prudent sur une deuxième vague. Décidera-t-il en prévision de conserver les données ? Aucune garantie n’est apportée.
Consentement
Le volontariat mis en avant permet au gouvernement de considérer qu’il y a consentement de la part de l’utilisateur, mais il est peu probable que celui-ci soit libre et éclairé (l’utilisateur aurait tout compris du fonctionnement et de ses conséquences…) et par ailleurs on peut redouter que pour certains services, l’accès au lieux publics, entreprises, etc. l’utilisation de StopCovid soit « fortement » recommandée, ce qui fausserait complètement le caractère libre de celui-ci.
Acceptabilité
Les craintes que porte cette épidémie nous ont fait renoncer à nombre de nos droits et libertés pour nous-mêmes ou pour nos semblables mais il n’est pas acceptable que pour l’endiguer une majorité de nos concitoyens décident de se soumettre à un contrôle permanent. Ce serait la porte ouverte à une surveillance technologique généralisée.
Communiqué commun et référé liberté, dont la LDH est partie prenante
Une coalition de collectifs et associations dépose un référé liberté pour demander un accès à l’eau et à l’hygiène, une mise à l’abri inconditionnelle, et l’arrêt des démantèlements sauvages pour les exilés vivant sur les campements du canal Saint-Denis.
Cela fait maintenant plus de 4 ans que nous constatons dans le nord-est parisien un cycle infernal fait de campements, démantèlements et harcèlements policiers. 4 ans que nous interpellons, en vain, sur les atteintes graves aux droits fondamentaux des personnes qui y vivent. Elles rencontrent continuellement de grandes difficultés pour avoir accès à l’alimentation, à l’eau, à l’hygiène, aux soins, à l’hébergement et à une information sur leurs droits.
Malgré ces alertes répétées, la situation sur le terrain s’aggrave chaque jour. Les campements qui se trouvaient à l’origine dans Paris ont progressivement été repoussés vers la périphérie de la ville, et se retrouvent aujourd’hui essentiellement sur les communes d’Aubervilliers et de Saint Denis. Les exilés sont ainsi de plus en plus invisibilisés, ce qui rend encore plus difficile leur accès à des dispositifs d’aide, pourtant essentiels dans la période actuelle d’épidémie de Covid-19. Nous pensions que cette crise sanitaire allait enfin permettre de trouver des solutions de prise en charge dignes et pérennes pour ce public extrêmement vulnérable. Les constats que nous faisons depuis le début du confinement sont tout autres, et nos observations sont dramatiques :
A Aubervilliers, le 18 mars, 700 personnes se sont retrouvées refoulées et confinées par les forces de l’ordre sur un campement sans eau, sanitaires ni nourriture, dans la plus grande promiscuité… Notre interpellation qui fera suite à cette séquence précipitera l’organisation d’une opération de mise à l’abri le 24 mars ;
Les personnes vivant sur les petits campements qui se sont reconstitués par la suite le long du canal Saint-Denis (pouvant atteindre jusqu’à 100 personnes par site) n’ont bénéficié d’aucune mise à l’abri et n’ont reçu aucune aide alimentaire, pas plus qu’ils n’ont pu accéder à de l’eau, à des urinoirs ou à des sanisettes, malgré nos interpellations répétées aux préfectures et aux mairies, dans le contexte que l’on sait ;
Au lieu de bénéficier de la protection à laquelle ils ont droit, les exilés affirment être « fatigués d’être en permanence délogés par la police ». Ils subissent une forte pression policière leur demandant quotidiennement de quitter les lieux et de se disperser. A deux reprises, dans les nuits du 24 au 25 mars et du 5 au 6 avril, les tentes installées sur le site du Pont de Stains ont été lacérées par les forces de l’ordre ;
Sur ce même lieu, 3 démantèlements sans proposition de relogement ont été menés les 7 avril, 15 avril et 8 mai par les forces de l’ordre et les équipes de la mairie d’Aubervilliers. Ces opérations, réalisées sans concertation ni information préalables, se sont accompagnées de la destruction des tentes et des effets personnels des exilés, laissant les personnes dans le dénuement le plus total. Un quatrième démantèlement sans proposition de relogement s’est également déroulé le 15 mai à Paris, au niveau du CAP 18, à proximité de la Porte d’Aubervilliers ;
Enfin, les équipes des associations Médecins du Monde et Utopia 56 ont elles-mêmes été verbalisées et menacées à 2 occasions par les forces de l’ordre, alors qu’elles exerçaient leur mission d’accès aux soins et de support social sur les campements.
Nous avons interpellé le Préfet de région, la préfecture de Seine-Saint-Denis, la mairie d’Aubervilliers et la mairie de Saint-Denis durant toute cette période, sans qu’aucune réponse à la hauteur de la situation ne soit proposée. Compte tenu de la gravité des faits observés, du contexte d’épidémie, et de cette inaction politique, une coalition d’associations largement soutenue par d’autres acteurs solidaires, dépose ce jour un référé liberté portant sur 3 demandes principales :
Un accès à l’hébergement inconditionnel pour les personnes situées dans les lieux de campement du canal de Saint-Denis ;
Un accès à l’eau effectif et suffisant, ainsi que des conditions sanitaires correspondant à la réglementation (bennes à ordure, WC, douches, etc…) à proximité des lieux de campement tant qu’ils perdureront ;
L’arrêt des démantèlements et des expulsions sans mise à l’abri des personnes.
Paris, le 27 mai 2020
Liste des 16 associations requérantes et signataires : Ligue des droits de l’Homme ; Gisti ; Médecins du Monde ; Utopia 56 ; Emmaüs France ; Quartiers solidaires ; Droits d’urgence ; Acat ; ADSF ; Antanak ; La Gamelle de Jaurès ; Watizat ; Kali ; Mrap ; Dom Asile ; Cimade.
Liste des 14 collectifs et associations signataires : Collectif Solidarité migrants Wilson ; Secours catholique – Cedre ; Secours catholique – Délégation 93 ; Médecins sans frontières ; Action contre la faim ; Comede ; Amnesty International France – Région de Paris ; Etats généraux des Mmgrations 75 ; Kolone ; Première urgence internationale ; Collectif Audonien Solidarité migrants ; Thot ; ADDE ; Paris d’exil.