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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives du tag : Outre-mers

De Paris à Cayenne : les opposants mobilisés pour obtenir l’abandon du projet Montagne d’or 22 juin 2018

Communiqué de presse

Ce samedi, deux manifestations miroirs ont eu lieu, à Paris, place de la République et à Cayenne pour réclamer l’abandon du projet Montagne d’or. Dernière ligne droite avant la clôture du débat public, le 7 juillet prochain, les organisations, collectifs et citoyens opposés à l’exploitation d’une mine industrielle à ciel ouvert au cœur de l’Amazonie française, entendent bien obtenir gain de cause auprès des décideurs publics.

Rassemblés place de la République, les organisations ont tenu à lancer un appel face aux dangers que représentent le projet Montagne d’or. Alors que la France a reçu la COP 21 et a présenté à plus de 190 pays l’Accord de Paris pour lutter contre le réchauffement climatique, « il est hors de question de détruire la seule forêt amazonienne d’Europe et de donner le mauvais exemple au monde entier » souligne Patrick Monier, porte-parole du collectif Or de question. « Nous tenons à apporter notre soutien à cette lutte, pour combattre ce projet qui appartient au passé et pour protéger l’immense richesse biologique de l’Amazonie et les droits des peuples autochtones » précise Marine Calmet de l’association Nature Rights.

Les opposants dénoncent un projet mortifère et destructeur, autant pour les populations locales et les Peuples autochtones, que pour la Planète

«Nous sommes là pour rendre hommage aux peuples autochtones et à leur résistance, car les six nations amérindiennes de Guyane, survivantes du génocide, de la colonisation et des politiques d’assimilation successives sont bien déterminés à ne pas laisser passer ce projet» affirme Edith Patrouilleau, du CSIA Nitassinan. Pour Marion Veber, chargée de programme « Droits des peuples » auprès de la Fondation France Libertés – Danielle Mitterrand « Il faut se mobiliser ici et là-bas, car le débat public organisé ne respecte pas le droit à la consultation libre, préalable et éclairée des Peuples Autochtones de Guyane ».

« Ce projet impacte directement les droits humains, en condamnant l’avenir des générations futures et la possibilité d’une vie digne pour nos enfants » précise Ludovic Pierre, membre de la Jeunesse Autochtone de Guyane. Pour Gert Peter Bruch de l’association Planète Amazone et membre de l’Alliance des gardiens de mère nature « le combat contre les projets industriels est un combat qui est en train de devenir planétaire, et une véritable alliance voit le jour entre les Peuples Autochtones du monde entier contre le projet Montagne d’or ».

Un projet catastrophique pour l’environnement, pour les droits de l’Homme et pour l’économie

Pour le collectif ISF Systext – Ingénieur sans frontières « actuellement, plus de 90% de l’or extrait dans le monde sert soit à la bijouterie, soit aux produits financiers, la vérité c’est donc que l’or ne représente pas un véritable besoin industriel ou économique ».

« Ce projet nie le droit pour les gens d’exister dans leur propre environnement, en leur imposant un modèle de développement et une société qui n’est pas la leur » dénonce Dominique Guibert, secrétaire général de la Ligue des droits de l’Homme. On veut nous faire croire qu’il s’agit d’un projet qui va créer de l’emploi, mais il faut bien être conscients qu’il s’agit d’un projet à très court terme, qui créera uniquement des emplois précaires amenés à disparaître rapidement. Si on intégrait les externalités négatives de ce projet, sur l’environnement, sur les droits et sur l’économie, il ne serait d’ailleurs pas viable.

Au regard des enjeux, les opposants en appellent aux pouvoirs publics et réclament l’abandon total et immédiat du projet Montagne d’or.

 

Signatures:

Or de question est un collectif citoyen opposé aux projets industriels d’exploitation minière, apolitique et non violent, représentant 25 organisations guyanaises avec un même objectif, à savoir, s’opposer à l’implantation de la méga-industrie minière internationale en Guyane.

Nature Rights. Depuis 2009, Nature Rights s’engage à promouvoir les Droits de la Nature à travers des initiatives visant à reconnaître ces droits, les principes qui s’y rattachent et la jurisprudence environnementale. L’association est membre de l’Alliance globale pour les droits de la nature

France Libertés. Créée par Danielle Mitterrand en 1986, France Libertés est une fondation reconnue d’utilité publique à but non lucratif. Elle a pour mission de défendre les droits humains et les biens communs du vivant.

La Ligue française de défense des droits de l’Homme (LDH), regroupe les femmes et les hommes de tous horizons et toutes conditions, qui choisissent librement de s’associer afin de réfléchir, discuter, agir pour la défense des droits et libertés, de toutes et de tous.

Elle intervient sur l’ensemble du territoire à travers ses sections locales et ses groupes de travail. En Guyane, elle est représentée par sa section locale de Cayenne qui travaille en lien étroit avec le Groupe de travail Outre-mers.

Planète amazone a pour but principal le soutien aux peuples autochtones, et plus particulièrement à ceux d’Amazonie dans leur combat international pour la reconnaissance des droits de la nature.

Ainsi que Ingénieurs sans frontières – Systèmes Extractifs et Environnements – ISF SystExt , CSIA Nitassinan et Jeunesse Autochtone de Guyane

 

Paris, le 18 juin 2018

 

Source: De Paris à Cayenne : les opposants mobilisés pour obtenir l’abandon du projet Montagne d’or

Loi asile et immigration : lettre ouverte aux sénateurs 23 avril 2018

Lettre ouverte du collectif Migrants outre-mer dont la LDH est membre

 

Mesdames les sénatrices, Messieurs les sénateurs,

Le collectif Migrants outre-mer souhaite attirer votre attention sur le projet de loi relatif à l’asile et à l’immigration sur lequel vous serez prochainement appelé-e-s à vous prononcer.

Ce collectif rassemble les principales associations agissant aux niveaux national et local pour la défense des droits des personnes migrantes en outre-mer et dispose à ce titre d’une expertise sur l’état des pratiques et les politiques migratoires mises en œuvre dans ces territoires.

 

Un laboratoire ultramarin de recul des droits au prétexte d’une invasion migratoire fantasmée

En matière d’immigration, force est de constater que les territoires ultra-marins constituent un laboratoire de reculs des droits [1], notamment par l’instauration de législations et dispositifs  dérogatoires au droit commun, portant violation des droits fondamentaux des personnes migrantes, qui sont, par la suite, généralisés à la France entière.

En effet, ce projet de loi vise à la généralisation des audiences par visioconférence [2] et conforte la procédure luttant contre les reconnaissances de paternité frauduleuses, circonscrites jusqu’à présent dans certains territoires ultramarins [3].

Depuis de nombreuses années et au prétexte d’une invasion migratoire sur ces territoires largement fantasmée [4], un régime dérogatoire du droit commun y prévoit des droits au rabais qui facilitent les interpellations, autorisent l’exécution des expulsions  sans contrôle d’un juge et réduisent l’accès au droit au séjour.

Ce projet de loi confirme cette logique en prévoyant de nouvelles dispositions dérogatoires qui aggravent en Guyane les conditions d’accueil des personnes en demande d’asile et restreignent à Mayotte les conditions de délivrance du document de circulation pour les mineur-e-s de nationalité étrangère.

 

Un régime dérogatoire qui sacrifie des droits fondamentaux

En matière de contrôle d’identité, des dispositifs de contrôle exceptionnels qui s’affranchissent des garanties les plus élémentaires sont mis en place [5]. En Guyane, des barrages de gendarmerie sont installés sur les deux principaux axes routiers qui desservent Cayenne et ses administrations, instituant ainsi des contrôles d’identité généralisés, sur la route nationale qui longe la côte où réside plus de 90% de la population guyanaise, lesquels constituent des obstacles au droit à la santé ou encore au principe d’égalité d’accès aux services publics qui génèrent notamment de graves entraves au dépôt de demandes de carte de séjour.

Ce régime d’exception vient également tailler dans les garanties de contrôle juridictionnel des procédures d’enfermement et d’expulsion.

Alors que ces territoires concentrent la moitié des expulsions réalisées chaque année, l’effectivité des recours contre les décisions préfectorales n’est pas garantie contrairement à la métropole. Si le dépôt d’un recours en urgence suspend désormais l’éloignement jusqu’à son examen [6], son champ d’utilisation reste restrictif et la majorité des renvois sont exécutés sans avoir pu enclencher cette procédure.

Mayotte reste le seul territoire où le contrôle de la procédure de placement en rétention et des conditions d’enfermement est quasi inexistant : le juge compétent intervient après cinq jours d’enfermement (contre 48 heures dans le reste de la France), alors que les personnes sont généralement expulsées en moins de 24 heures et que son centre de rétention y accueille massivement des personnes particulièrement vulnérables comme des enfants.

Le statut des personnes en situation régulière est également dégradé sur ces territoires, à l’image de la suppression ou l’inapplication des garanties d’accueil durant la procédure de demande d’asile (abaissement en Guyane voire absence à Mayotte de l’aide financière sans possibilité de travailler, quasi inexistence de dispositif d’hébergement et domiciliation des personnes en demande d’asile concentrée à Cayenne) ou encore la restriction géographique de la validité des titres de séjour et des autorisations de travail en découlant.

Sous couvert de prévenir un supposé appel d’air, ces dispositions conduisent à précariser les personnes migrantes, à réduire l’accès à leurs droits et à freiner leur intégration une fois régularisées.

 

Une politique qui attise le rejet des personnes étrangères et justifie des violences

Nous constatons que cette politique migratoire, qui a pour objectif de réduire les mouvements de population pourtant régis par des dynamiques régionales historiques, est dans l’impasse. Elle participe des tensions sociales de plus en plus violentes en alimentant l’idée d’une immigration massive comme facteur des inégalités économiques et sociales sévissant dans les outre-mer.

Cette approche répressive s’applique dans un contexte où les infrastructures et les services publics sont bien souvent faibles voire inexistants, notamment en matière d’accès aux administrations, à l’éducation, aux logements et aux soins [7]. La saturation de ces dispositifs, pourtant chroniquement sous dimensionnés, nourrit les discours politiques qui stigmatisent les personnes étrangères désignées comme responsables de ces carences. Les tensions très fortes et les violences exercées à l’égard des personnes migrantes, en particulier à Mayotte depuis 2016, sont autant de dérives auxquelles conduit cette politique.

 

Pour un changement de politique

Le collectif Migrants Outre-mer défend des mesures permettant de garantir un accueil digne et le respect des droits fondamentaux pour tous et sur l’ensemble du territoire français, notamment [8] à travers les propositions suivantes :

Aligner la législation applicable en outre-mer sur le droit commun et mettre ainsi un terme à un régime d’exception contraire à un État de droit, qui justifie des droits au rabais et permet tous les abus, notamment en priorité :

  • rendre suspensifs les recours contre toute mesure d’éloignement

  • rétablir à Mayotte l’intervention du juge judiciaire sous 48 heures à compter du placement en rétention.

  • supprimer les dispositifs exceptionnels de contrôle

  • rendre pleinement applicables sur l’ensemble du territoire français les titres de séjour délivrés en outre-mer et notamment à Mayotte

  • rétablir des conditions d’accueil dignes pour les demandeurs d’asile en Guyane et à Mayotte en leur garantissant le bénéfice des aides prévues en métropole, et la fourniture d’un hébergement et d’une domiciliation effective pendant leur procédure

Mettre un terme à l’enfermement des enfants en rétention, notamment à Mayotte où il s’opère massivement (4 285 enfants enfermés en 2016) et sans contrôle.

Par ailleurs, il est temps de penser autrement la présence des territoires ultramarins dans leur environnement. En isolant de plus en plus les uns des autres par un fossé économique croissant, par une frontière de plus en plus infranchissable, par des dénis de droit quotidiens à l’égard des « étrangers » venus des territoires voisins, on ne fait qu’éloigner la perspective d’une solution durable aux tensions actuelles.

Nous espérons pouvoir vous compter parmi celles et ceux qui soutiendront ces positions et nous nous tenons à votre disposition pour en discuter.

 

Vous remerciant de votre attention, nous vous prions de recevoir, Mesdames les sénatrices, Messieurs les sénateurs, nos meilleures salutations.

Migrants Outre-Mer (Mom)

Paris, le 18 avril 2018

 

Signataires :

ADDE (Avocats pour la défense des droits des étrangers), Aides, CCFD (Comité catholique contre la faim et pour le développement), La Cimade, Collectif Haïti de France, Comede, Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigré⋅e⋅s), Elena, Fasti (Fédération des associations de solidarité avec tou-te-s les immigré-e-s), LDH (Ligue des droits de l’Homme), MDM (Médecins du monde), Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), OIP (Observatoire international des prisons).

 

[1] http://www.migrantsoutremer.org/L-Outre-mer-laboratoire-de-la

[2] Articles 6, 10, 12 et 16 et du projet de loi.

[3] Articles 30 du projet de loi.

[4] https://www.insee.fr/fr/statistiques/3288449 : un solde migratoire déficitaire entre 2010 et 2015 dans les départements d’outre mer et très légèrement en augmentation en Guyane (moins de 0,4%).

[5] Législations dérogatoires (voir le dernier paragraphe de l’article 78-2 du code de procédure pénale) permettant de contrôler l’identité des étrangers en situation irrégulière sur un périmètre plus étendu.

[6] Article L.514-3 Ceseda.

[7] Une seule maternité pour plus de 250 000 habitants à Mayotte + https://www.insee.fr/fr/statistiques/1285646 + https://www.insee.fr/fr/statistiques/3181903

[8] Collectif MOM, « L’outre-mer dans le projet de loi « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif » présenté par le gouvernement le 21 février 2018 – Outre-mer : le non droit est un jeu dangereux ».

Télécharger la lettre ouverte au format PDF


Source: Loi asile et immigration : lettre ouverte aux sénateurs

Guyane : qui sème la discrimination récolte la colère ! 30 mars 2017

Communiqué LDH

Paris, le 30 mars 2017

 

Depuis quelques semaines, tout le monde en discutait. Depuis deux jours, tout le monde la fait : la grève en Guyane est à la une de l’actualité.

 

La Ligue des droits de l’Homme, et sa section de Guyane, ne s’étonne pas de l’irruption des revendications et de leur cristallisation dans un mouvement qui fédère les colères et les frustrations rentrées depuis si longtemps. Déjà en 2011, la LDH avait participé activement à la création d’un Collectif des associations de Guyane pour appeler l’attention sur la dégradation de l’application des lois de la République. L’appel rappelait le principe de base du refus de toute discrimination et demandait l’application des mêmes droits pour toutes et tous, scolarité, santé, logement, eau, transport, infrastructures, mais aussi tout simplement droit à l’état civil, à la même administration, au dialogue civil avec les autorités, à la diversité culturelle, sans oublier la responsabilité majeure de l’Etat envers les populations autochtones dont l’existence et la sécurité sont menacées par les orpailleurs illégaux et le déforestage sauvage, et enfin envers les migrants dont les droits sont niés.

 

En 2017, cinq ans après, la LDH apprécie à sa juste valeur le fait que la mission effectuée l’an dernier par le Défenseur des droits en Guyane confirme l’exactitude des analyses et des constats faits par les associations, au point qu’il a quasiment sommé l’Etat de remplir immédiatement ses obligations d’égalité des droits envers toutes les populations. Le très large collectif associatif et syndical qui organise le mouvement social est conduit à prendre en charge une multiplicité de revendications due à la dégradation de la situation. En tentant de résoudre la crise en opposant les uns aux autres, les différents détenteurs de pouvoirs, en Guyane et à Paris, montrent qu’ils n’ont pas pris la mesure de dizaines d’années d’abandon du territoire.

 

Il est un sujet pourtant qui fait l’unanimité de leurs discours : pas de violence ! Oubliant ainsi que la protection de l’ordre public n’est légitime que si elle est au service de la résolution de la violence sociale que subit la population. A cet égard, la LDH demande solennellement au gouvernement de mettre fin aux exactions de groupes de quasi-miliciens, qui attaquent, rackettent, violentent dans les rues les personnes, en particulier les supposés étrangers, sans être inquiétés. La LDH tient le gouvernement pour comptable de toute exaction, de toute agression perpétrée contre les acteurs du mouvement social par des groupes proches des criminels locaux et elle assure sa section de Guyane du soutien total de toute l’association.

 


Source: Guyane : qui sème la discrimination récolte la colère !