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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives de l'auteur : LDH Aix

Europol : une fuite de données massive qui révèle où sont les risques 6 décembre 2016

L’Association européenne pour la défense des droits de l’Homme (AEDH) dénonce avec une vive inquiétude la fuite de données des fichiers d’Europol.

Europol réagissant à un reportage d’une télévision publique néerlandaise, a reconnu mercredi que certains de ses documents secrets, concernant des activités terroristes, avaient été mis en ligne suite à « une erreur humaine ».

Les journalistes avaient retrouvé les informations sur un disque dur relié sans protection à internet. Selon le reportage, il s’agirait de 700 pages portant sur au moins 54 enquêtes en Europe, notamment sur les attentats de Madrid en 2004. Ces documents contiendraient le nom de centaines personnes suspectées, et même leur numéro de téléphone. La cause de cette fuite serait la copie par une policière d’informations sur un disque dur personnel.

L’AEDH a toujours manifesté ses inquiétudes lors de la création de nouvelles bases de données destinées à surveiller de plus en plus de personnes, dynamique incarnée, entre autres par la base de données Titres Electroniques Sécurisés (TES) en France, fichier biométrique de 60 millions de personnes. Les risques sur lesquels l’AEDH alerte sont aujourd’hui avérés à une large échelle et le sont sans doute  très régulièrement à une échelle moins importante mais tout aussi dramatique pour les victimes de ces fuites.

Cet événement pose la question importante de la sécurité des données et des mesures techniques appropriées, points qui ont un impact considérable sur les droits des personnes exposées.

Même si elle ne semble pas mal intentionnée, la fuite démontre l’impossibilité de sécuriser réellement une collecte toujours plus importante de données contrairement à ce que tentent de nous faire croire les partisans d’une surveillance en perpétuelle augmentation. L’AEDH s’étonne qu’Europol prétende que l’impact sera nul sur les enquêtes actuelles alors que dans l’immédiat rien ne permet de le dire.

Il est en revanche incontestable qu’une telle fuite de données constitue une atteinte extrêmement forte aux droits à la vie privée ainsi qu’à la présomption d’innocence des personnes concernées.

Bruxelles, le 2 décembre 2016

AEDH
Association Européenne pour la Défense des Droits de l’Homme
European Association for the Defence of Human Rights
Rue de la Caserne, 33
1000 Brussels
Belgium
phone: +32(0)25112100
fax: +32(0)25113200
Have a look: http://www.aedh.eu

Le gouvernement doit autoriser sans délai la publication du rapport du CPT ! 6 décembre 2016

Il y a un an, le Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe achevait une visite en France de deux semaines.

Au cours de cette visite, le Comité s’est rendu dans différents lieux de privation de liberté, dont les maisons d’arrêt de Nîmes, Fresnes et Villepinte, parmi les plus surpeuplées de France, et le centre pénitentiaire de Condé-sur-Sarthe. Le Comité a adopté le rapport relatif à cette visite à l’occasion de son assemblée plénière du 11 juillet 2016 et sa publication est maintenant suspendue à l’accord du gouvernement français : les rapports du CPT ne sont en effet rendus publics qu’à la demande des États. Ainsi, le précédent rapport du Comité relatif à la France a été publié près d’un an et demi après sa visite, le 19 avril 2012, à quelques jours des élections présidentielles: on ne pouvait imaginer moment plus propice pour qu’un tel rapport passe inaperçu.

Alors que la population carcérale a atteint un niveau record en juillet dernier (69.675 personnes détenues, dont près de 15.000 détenus en surnombre) qui pourrait bien être dépassé en fin d’année, que plus d’un tiers des personnes détenues sont incarcérées dans des prisons occupées à plus de 150 % et que l’inflation carcérale a fortement repris depuis près d’un an, le gouvernement comme l’opposition semblent n’aborder le problème de la surpopulation carcérale que sous l’angle de la construction de nouveaux établissements.

Les observations et recommandations du CPT sont importantes pour éclairer les orientations du gouvernement comme les débats que la campagne présidentielle à venir ne manquera pas de faire émerger sur le recours à l’emprisonnement et la place de la prison et plus largement sur le fonctionnement de l’ensemble des lieux de privation de liberté.

Simplement rendre la prison visible” écrivait récemment le Garde des Sceaux dans son rapport sur l’encellulement individuel, citant Paul Claudel. Il serait dès lors incompréhensible que le gouvernement refuse de donner à voir le constat que dresse cet organe du Conseil de l’Europe de nos lieux de privation de liberté, et en particulier de nos prisons : il faut autoriser sans délai la publication du rapport du CPT !

Nos organisations (associations, syndicats et aumôneries des prisons), demandent instamment au Premier Ministre que le gouvernement:

  1. fasse connaître au plus vite ses observations au CPT et demande sans délai la publication du rapport concernant la visite de novembre 2015, en amont des échéances présidentielles;
  2. accepte à l’avenir la procédure de publication automatique des rapports du CPT comme plusieurs États membres du Conseil de l’Europe l’ont déjà fait.

Nous demandons simplement de rendre la prison visible…

lettre ouverte au Premier ministre demandant publication du rapport du Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT)

Associations signataires :

Association Nationale des Juges de l’Application des Peines (ANJAP)

Association Nationale des Visiteurs de Prison (ANVP)

Aumônerie nationale catholique des prisons

Aumônerie nationale protestante des prisons

Aumônerie nationale musulmane des prisons

Club Informatique Pénitentiaire (CLIP)

Courrier de Bovet

DES Maintenant en Europe

Fédération des Associations Réflexion-Action, Prison et Justice (FARAPEJ)

Fédération Nationale des Associations d’Accueil et de Réinsertion Sociale (FNARS)

Genepi

Ligue des Droits de l’Homme (LDH)

Observatoire International des Prisons – Section française (OIP-SF)

Prison Insider

Secours Catholique Caritas France

Syndicat de la Magistrature (SM)

Syndicat National de l’Ensemble des Personnels de l’Administration Pénitentiaire, Fédération Syndicale Unitaire (SNEPAP-FSU)

Source: Le gouvernement doit autoriser sans délai la publication du rapport du CPT !

Appel à la mobilisation citoyenne en vue du procès en appel des LuxLeaks 6 décembre 2016

Nous appelons à la mobilisation la plus large possible des citoyennes et citoyens européens, des ONG, des personnalités publiques et politiques lors de l’ouverture du procès en appel des LuxLeaks, le 12 décembre prochain à Luxembourg.

Le procès en appel qui va s’ouvrir est le procès des lanceurs d’alerte, et de la justice fiscale, du droit à l’information et de la liberté de presse. La condamnation, en juin dernier, des lanceurs d’alerte Antoine Deltour et de Raphaël Halet n’est pas acceptable, ni le retour sur le banc des accusés du journaliste Edouard Perrin, suite à l’appel général du parquet luxembourgeois.

En Europe, les voix sont de plus en plus nombreuses à s’élever pour une fiscalité juste et équitable, pour que  grandes entreprises multinationales payent également leur juste part d’impôt et contribuent à subvenir aux besoins sociaux et investissements publiques.  L’hypocrisie actuelle doit cesser. Les gouvernants de l’Europe et des Etats européens  commencent timidement à tirer les leçons des révélations Luxleaks en faisant évoluer les cadres législatifs. Ce procès en appel, qui se tient les 12, 19 et 21 décembre à Luxembourg, doit être le symbole d’un changement d’ère aussi bien sur les questions fiscales, que sur le droit à l’information de l’opinion publique.

En lançant l’alerte et en diffusant l’information, les trois prévenus ont agi pour le bien commun. Nous appelons à leur relaxe et nous vous donnons rendez-vous le lundi 12 décembre à partir de 13h00 sur le parvis de la cité judiciaire de Luxembourg.

Comité de solidarité avec les inculpés du procès dit ‘LuxLeaks’ – Luxembourg

Cet appel est soutenu par la Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires, ATTAC France, ActionAid Peuples Solidaires, CCFD-Terre Solidaire, UGICT-CGT Anticor, LDH, AEDH …

Source: Appel à la mobilisation citoyenne en vue du procès en appel des LuxLeaks

Les droits des femmes sont les droits de l’Homme, universels et indivisibles 24 novembre 2016

25 novembre 2016

Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes, MOBILISONS-NOUS, TOUTES ET TOUS !

Partout à travers le monde, viols, harcèlement sexuel, violences domestiques, mariages forcés, crimes « d’honneur », mutilations génitales : toutes ces violences constituent une violation grave des droits fondamentaux des femmes et des filles et un obstacle majeur à la réalisation de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Les violences sont construites sur un continuum de comportements sexistes et de pratiques, inacceptables, susceptibles de causer un préjudice ou une souffrance de nature physique, psychologique (insultes, critiques permanentes, humiliation…), sexuelle (viol, agressions, harcèlement…) ou économique (confiscation du salaire ou des documents administratifs, non-versement des pensions alimentaires…).

Les violences contre les femmes et les filles ne relèvent ni d’affaires privées ni de faits divers et, contrairement aux idées reçues, elles n’ont pas lieu uniquement dans la sphère familiale (violences conjugales et intrafamiliales). Elles n’épargnent aucun milieu, aucun territoire, aucune génération, aucune nationalité, aucune religion. Ne cédons pas aux discours conservateurs et racistes des extrêmes droites qui dénoncent cette question toujours sous l’angle « ethnique ».

Comme l’affirme le préambule de la convention d’Istanbul*, la violence à l’égard des femmes est une manifestation des rapports de force historiquement inégaux entre les femmes et les hommes ayant conduit à la domination et à la discrimination des femmes par les hommes, privant ainsi les femmes de leur pleine émancipation. Cette Convention, ratifiée par la France en 2014, renforce la protection et les droits des femmes et fixe les mesures préventives, législatives, juridiques, sociales, protectrices ou réparatrices que les États signataires s’engagent à prendre pour agir à la fois en amont et en aval. Elle oblige les États à agir concrètement en intégrant dans les lois nationales les applications de ce texte.

Pour la Ligue des droits de l’Homme, agir contre la violence, c’est :

– protéger les femmes de tous pays, en « paix » comme en guerre, les accompagner et les aider à redevenir sujets de droit ;

– éduquer et former dès le plus jeune âge à l’égalité pour prévenir les comportements sexistes ;

– financer durablement les actions, entre autres associatives, qui œuvrent contre les violences ;

– étendre le champ des formations initiale et continue des acteurs concernés (enseignant-e-s, avocat-e-s, médecins, juges, policier-e-s…) ;

– demander au gouvernement français d’appliquer toutes les mesures prévues par la convention d’Istanbul et renforcer celles qui sont déjà prises.

* Convention d’Istanbul, traité international adopté par le Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (2011).

Téléchargez le communiqué

Source: Les droits des femmes sont les droits de l’Homme, universels et indivisibles

État d’urgence : sans retour ? 24 novembre 2016

Communiqué LDH

La LDH avait annoncé, passée la première période d’état d’urgence, que le renouvellement de celui-ci serait sans fin. De tout temps, sous tous les gouvernements et sous tous les régimes, les mesures d’exception sont comme une drogue pour les autorités : après y avoir goûté, elles ne peuvent plus s’en passer.

Soutenir qu’il est nécessaire de renouveler l’état d’urgence en raison de l’élection présidentielle et, probablement, des élections législatives qui suivent, c’est reconnaître un peu plus que l’exception devient la règle.

Si l’état d’urgence semble indolore à la grande majorité d’entre nous, ce n’est pas le cas des dizaines de personnes assignées à résidence, et qui ne bénéficient pas de la protection du juge judiciaire. Le prolonger, c’est prolonger la possibilité permanente d’effectuer des perquisitions dans des conditions qui ont été largement dénoncées, c’est donner un quasi blanc-seing aux pouvoirs publics pour interdire des manifestations et c’est, d’une manière générale, installer l’habitude de pouvoirs exceptionnels peu et mal contrôlés et qui sont utilisés à d’autres fins que celles annoncées.

Cela aboutit, enfin, à exacerber les tensions de toute nature, notamment en continuant à stigmatiser une partie de la population et en imposant aux forces de l’ordre des suggestions qui épuisent leurs capacités.

On est en droit de s’interroger sur l’utilité d’un état d’urgence destiné à lutter contre les actes de terrorisme, utilité dont le gouvernement n’apporte aucune justification.

La LDH appelle les parlementaires à prendre conscience qu’un tel renouvellement est une mesure dangereuse et démagogique, qui s’inscrit dans la remise en cause de l’Etat de droit.

Paris, le 16 novembre 2016

Source: État d’urgence : sans retour ?

Fichier TES, danger pour les libertés 24 novembre 2016

Communiqué de l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN)Le décret TES (« Titres électroniques sécurisés ») publié par le gouvernement, comme par effraction, le 28 octobre dernier trahit les principes démocratiques tant sur la forme (la manière dont il a été élaboré et publié) que sur le fond (la création d’un fichier centralisant les données d’identité, de filiation et de biométrie de l’ensemble des Français).

La légalité du décret est assise sur un ensemble législatif ancien, porteur, en lui-même, des dangers que ce fichier TES met brutalement en lumière aujourd’hui. L’article 27 de la loi dite « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 laisse au gouvernement la faculté d’instituer, par un simple décret, tous traitements de données à caractère personnel pour le compte de l’État, ou touchant à la sécurité nationale. Pire, depuis 2004, les données biométriques sont soumises au même régime, au mépris de leur sensibilité extrême. De cette honteuse manœuvre, notre démocratie devrait tirer toutes conséquences : l’absence de contrôle parlementaire sur la création de fichiers concernant les individus par l’exécutif doit être combattue.

La CNIL, dont il faut rappeler qu’elle doit sa création précisément à la protestation de nombreux citoyens contre la création d’un fichier similaire au fichier TES en 1974, le fichier SAFARI, a obtenu le pouvoir et le devoir de rendre des avis motivés sur les décisions de créations de fichiers de données à caractère personnel mis en œuvre notamment par l’État. Or, la capacité de la CNIL à freiner, voire contrer les projets étatiques de fichage s’est trouvée encore entamée par la réduction de son pouvoir d’avis conforme à un inoffensif avis préalable, mais non contraignant, par la loi du 6 août 2004.

Le tour de passe-passe est ici flagrant : le gouvernement s’appuie sur la loi même qu’il avait combattue lorsqu’il était dans l’opposition, la loi du 27 mars 2012 relative à la protection de l’identité, largement censurée par le Conseil constitutionnel. Dans la procédure de création d’un fichier aussi important que le fichier TES, qui rassemble l’ensemble des informations d’état civil, de filiation, la photo d’identité, le domicile, éventuellement le courriel, mais également la couleur des yeux ou les empreintes digitales, le gouvernement ne souffre aucun contre-pouvoir. En procédant par décret il s’affranchit d’une délibération démocratique au parlement et l’approbation pleine et entière de la CNIL n’étant pas requise, il va même jusqu’à en nier les critiques essentielles !

Outre ces problèmes structurels dans le processus de création d’un fichier, la prévision d’une dérive de ce nouveau fichier gigantesque ne relève pas du pur fantasme. Elle découle de l’observation méthodique des mutations connues des fichiers précédemment constitués, notamment à des fins policières. Entre l’origine d’un fichier et son utilisation ultérieure, il y a systématiquement des dérives : changement de finalité, érosion progressive du contrôle, modification du champ d’application ou de l’étendue des accès à ce fichier… Même suite à des condamnations, y compris par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, les fichiers ne sont pas, ou peu et tardivement corrigés. La France a été condamnée en 2013 par la CEDH pour le FAED (Fichier Automatisé des Empreintes Digitales) au motif que « La conservation des empreintes digitales par ce fichier s’analyse en une atteinte disproportionnée, ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique, et ne traduit pas un juste équilibre entre les intérêts publics et privés concurrents en jeu ». Pourtant ce fichier n’a été corrigé à la marge que deux ans après l’arrêt de la CEDH. Quant au FNAEG (Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques) créé pour ficher les auteurs d’infractions sexuelles condamnés par la justice, il est passé en 15 ans d’un fichier sous contrôle judiciaire et limité à un fichier policier recueillant l’ADN de toutes les personnes simplement suspectes dans les enquêtes y compris pour les délits les moins graves, même sans condamnation et dont le refus de prélèvement est susceptible de constituer un délit.

C’est ainsi que l’exclusion annoncée de l’utilisation du fichier TES à des fins d’identification et de comparaison (pour les données biométriques et les empreintes digitales) ne suffit pas à le rendre légitime. D’abord parce que des accès privilégiés sont d’ores et déjà autorisés pour certains services de police et du renseignement. Ensuite parce qu’aucune limitation n’est imposée en matière de réquisitions judiciaires : il est alors à craindre que le fichier TES devienne pour la justice, quel que soit le motif de l’enquête, une réserve d’empreintes et de photographies bien plus massive que le FAED et le TAJ (Traitement des Antécédents Judiciaires), faisant de tout citoyen un suspect en puissance.

Ces questions sur le formalisme, les conditions d’élaboration et le contrôle juridique du fichier TES ne sont cependant pas les seules sources d’inquiétude de l’Observatoire des Libertés et du Numérique, qui rejoint de très nombreuses voix qui se sont élevées depuis deux semaines sur le sujet. Les interrogations sur la sécurité du fichier, sur les choix techniques qui ont été faits et donc sur les garanties d’intégrité qui sont données par le gouvernement sont également nombreuses, étayées et suffisamment graves pour demander une annulation du décret.

Le choix de la centralisation du fichier est un choix dangereux : il expose un ensemble massif et précieux de données personnelles à la portée de puissances hostiles ou de criminels expérimentés. Les promesses réitérées de chiffrement robuste et de sécurisation avancée faites par le ministre de l’Intérieur seront évidemment invérifiables, et pourront difficilement compenser l’absence de résilience qu’aurait apportée une décentralisation du fichier, soit au niveau du porteur individuel de titre d’identité, soit au niveau des différentes composantes du fichier. Choisir la centralisation des données d’identification de l’ensemble des Français c’est choisir d’être une cible très alléchante, comme l’ont montré les attaques subies par des bases de données israéliennes, turques ou philippines. La question n’est donc pas : TES sera-t-il attaqué, mais, quand le sera-t-il ?

Les modalités de destruction des données à la fin du délai de conservation n’ont pas été détaillées dans le décret ou ailleurs. Pourtant, la question de l’effacement est cruciale, notamment en ce qui concerne les données biométriques, puisque ces données sont inaliénables de l’identité de l’individu. Il n’est donc pas possible pour l’individu de changer ces données.

Le choix de conserver les données biométriques sous forme brute dans le fichier plutôt que de stocker uniquement des gabarits permettant l’identification voulue, sans exposer davantage l’intimité des millions de personnes concernées, est à nouveau un choix surprenant et inquiétant. Il laisse la porte ouverte à des falsifications en cas de vol de données, et à des évolutions futures sur les identifications biométriques possibles. Il est nécessaire de rappeler que cette année, des propositions de loi tendant à coupler vidéosurveillance et reconnaissance faciale ont été déposées au Parlement français, sans soulever de la part du gouvernement de condamnation claire et immédiate. Il y a tout à craindre d’une évolution future de l’utilisation de ce fichier global de la population française. Et que dire de la marge d’erreur de 3% dans l’identification, qui est porteuse de nombreuses dérives si l’on considère ce fichier comme l’alpha et l’oméga de l’identification des individus ? Les droits d’accès et de rectification n’auront pas d’impact s’agissant des données les plus sensibles.
Les informations publiées dans la presse sur les raisons de création du fichier TES (supprimer des postes de fonctionnaires et rationaliser la délivrance des titres d’identité) interrogent sur la responsabilité de l’administration et de la technocratie dans l’érosion des libertés et l’évitement du processus parlementaire et démocratique. L’utilité pratique ou la centralisation des informations ne peuvent être des arguments pour justifier la création de fichiers sensibles et d’ampleur nationale tels que le fichier TES, sous peine de soumettre à l’administration les valeurs fondamentales que nous défendons.

Au-delà des considérations juridiques et techniques, il convient enfin de reconsidérer le rapport que nous avons avec l’identification des individus, dans une perspective de défense du droit au respect de la vie privée. Si la volonté d’empêcher techniquement toute falsification peut sembler légitime, l’histoire nous rappelle combien la capacité à résister à des dérives autoritaires passe par la faculté d’échapper au contrôle étatique, notamment sur son identité. Les fichiers centralisés ne font pas les régimes autoritaires, mais tout régime autoritaire s’appuie sur un fichage de sa population. L’ajout de nombreux marqueurs biométriques aux éléments de filiation ou d’état civil renforce l’attachement de l’individu, par son corps, à l’État. Nul ne peut exclure des usages liberticides d’un tel fichier à l’avenir, et toute évolution vers plus d’identification devrait être discutée démocratiquement dans cette perspective.

L’Observatoire des libertés et du numérique se joint aux voix qui réclament l’abrogation du décret TES.

Paris, le 14 novembre 2016

Organisations signataires membres de l’OLN : Le CECIL, Creis-Terminal, La Ligue des Droits de l’Homme (LDH), La Quadrature du Net (LQDN), Le Syndicat des Avocats de France (SAF), Le Syndicat de la Magistrature (SM).

Source: Fichier TES, danger pour les libertés

Contrôles au faciès : l’Etat condamné 24 novembre 2016

En 2012, François Hollande avait pris l’engagement de mettre en place des mesures pour réduire les contrôles au faciès. Il semblait ainsi prendre en compte une réalité incontestable : ces contrôles, souvent accompagnés de palpations abusives ou de propos vexatoires, contribuent lourdement à tendre les rapports entre la police et la population.  En visant le plus souvent des jeunes, ils entraînent régulièrement des condamnations pour « outrage et rébellion ».Pourtant lorsque la Cour d’appel de Paris a condamné l’Etat en 2015 pour faute lourde dans cinq cas de plaignants sur treize, celui-ci s’est pourvu en cassation, démontrant ainsi sa volonté de ne rien céder en la matière. L’exécutif n’a eu de cesse, par ailleurs, de nier l’existence même du problème.

La Cour de cassation vient de trancher en condamnant définitivement l’Etat. Ce jugement est une double victoire : victoire pour les plaignants d’abord, qui sortent ainsi la tête haute de trois ans de procédure, mais aussi pour toutes les victimes potentielles de ces contrôles. Dorénavant, elles pourront exercer un recours pour les contester, et l’Etat devra prouver que le contrôle est fondé sur des critères objectifs.

La LDH se félicite de la décision de la Cour de cassation car ces contrôles d’identité au faciès, souvent répétitifs, mettent à mal le principe d’égalité, et sont vécus, à juste titre, comme autant de pratiques discriminantes. A un moment où les policiers manifestent leur mécontentement et s’interrogent, semble-t-il, sur le sens de leurs missions, la disparition de telles pratiques contribuerait, avec d’autres mesures, à réinstaurer une partie de la confiance de la population envers les forces de sécurité.

Elle invite enfin les pouvoirs publics à entendre les associations et collectifs mobilisés sur cette question et à prendre d’urgence les mesures qui s’imposent pour se conformer au droit.

Paris, le 10 novembre 2016

Source: Contrôles au faciès : l’Etat condamné

#32 – Novembre 2016 : Les violences faites aux femmes : parlons-en, brisez le silence ! 21 novembre 2016

Les violences faites aux femmes depuis des millénaires sont la manifestation du
sexisme et du machisme présents dans la plupart des sociétés. Ces
comportements sont à relier aux autres discriminations dont les femmes sont
victimes, notamment dans les domaines économique et social (organisation du
travail, inégalités de salaire, accès aux responsabilités…).
Dans ce numéro des Echos, nous n’analysons pas les causes du sexisme et du
machisme (on peut pour cela se reporter aux Echos n°16 et 25, Femmes : luttes
passées, combats d’aujourd’hui, mars 2013, actualisé en mars 2015).
Ici, nous allons principalement décrire les différentes formes que prennent les
violences que subissent les femmes, alerter sur leur gravité, conseiller de ne
jamais se taire, dire auprès de qui chercher un secours.

Pièces jointes

les-echos-de-la-ldh-n-32_v6 Télécharger

Toussaint 2016 : retour du fichier des « gens honnêtes » ? 3 novembre 2016

Communiqué LDH

Avec la création du fichier baptisé « titres électroniques sécurisés » (TES), le gouvernement prétend faciliter l’obtention d’un passeport ou d’une carte d’identité et permettre l’authentification des demandeurs. Il entend également limiter la falsification de ces documents.

Aussi louables que soient de tels objectifs, ceux-ci ne sauraient occulter l’extrême dangerosité d’une base de données qui va centraliser des informations personnelles et biométriques sur la quasi-totalité de la population française, s’inspirant ainsi d’un projet proposé par le précédent gouvernement et partiellement censuré par le Conseil constitutionnel. A cette époque, l’actuel garde des Sceaux avait qualifié un tel projet « de bombe à retardement ».

Le gouvernement, chevauchant une loi qu’il avait décriée et s’exemptant d’un débat au Parlement, s’est contenté de faire paraître, en catimini, un décret pour créer ce fichier unique d’une taille inégalée et malgré les nombreuses réserves de la Cnil.

La LDH dénonce avec force la mise en place d’un outil qui d’ores et déjà est consultable par une multitude de services et qui sera exposé à toutes sortes de piratages. Par ailleurs, ce fichier ne présente aucune garantie quant à d’éventuelles évolutions, tout cela sans possibilité de recours de la part des citoyen-ne-s et sans aucun contrôle d’une instance indépendante. Ce gouvernement poursuit ainsi son choix d’une surveillance de masse et fait preuve de la plus grande irresponsabilité.

La LDH continuera à informer les citoyen-ne-s sur les dangers de cette base de données qui met en danger la protection de la vie privée et le respect des libertés individuelles.

 

Paris, le 3 novembre 2016

Source: Toussaint 2016 : retour du fichier des « gens honnêtes » ?

Les ONG en appellent à la responsabilité des sénateurs : ne détruisez pas le dispositif de protection des lanceurs d’alerte dont la France doit enfin se doter avec la loi Sapin 2 2 novembre 2016

Communiqué commun

Les ONG regrettent très vivement que la commission des lois sénatoriale ait mis à bas le dispositif équilibré adopté par l’Assemblée nationale – fruit du travail du gouvernement et des deux chambres, lors de l’examen du projet de loi « transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie publique ». Plus d’un quart des amendements ont été déposés sur l’unique article concernant la protection des lanceurs d’alerte (article 6) – visant notamment à la suppression du principe de précaution dans la définition, du soutien financier aux lanceurs d’alerte (pourtant adopté par le Sénat en première lecture) ou des sanctions pénales pour les auteurs de représailles. Nous exprimons notre vive inquiétude et incompréhension face à la destruction des fondements du dispositif, inspiré des meilleurs standards internationaux et notamment du modèle britannique (1998), des recommandations du Conseil de l’Europe (2014), des ONG (2015) ou du Conseil d’Etat (2016).

Afin d’assurer une protection effective des lanceurs d’alerte, nous demandons la réintroduction de toutes les mesures supprimées, et la mise en cohérence de la procédure de signalement avec la loi organique relative au Défenseur des droits.

Il appartient au Sénat dans sa rigueur de régulariser la saisine directe du Défenseur des Droits par le lanceur d’alerte, à l’instar des victimes de discrimination, de préciser le rôle des instances représentatives du personnel dans le dispositif, et de veiller au maintien des acquis des lois sectorielles déjà adoptées conformément aux recommandations du Conseil d’Etat.

En adoptant, comme l’ont fait avant nous de nombreux pays démocratiques, un dispositif cohérent et équilibré visant à protéger les lanceurs d’alerte agissant au service de l’intérêt général, le Parlement contribuera à renforcer la participation des citoyens à la vie publique.

 

Lien vers la pétition des ONG pour un statut global et protecteur des lanceurs d’alerte (plus de 66 000 signataires)

 

Communiqué de :

  • Anticor
  • Bloom
  • CCFD-Terre solidaire
  • CFDT
  • CFDT Cadres
  • Collectif Roosevelt
  • Greenpeace France
  • Le Pacte civique
  • Ligue des droits de l’Homme
  • Plateforme des paradis fiscaux et judiciaires
  • Powerfoule
  • Pugwash-France
  • Réseau Environnement Santé
  • Sciences Citoyennes
  • Transparency International France
  • UGICT – CGT

 

Paris, le 2 novembre 2016

Source: Les ONG en appellent à la responsabilité des sénateurs : ne détruisez pas le dispositif de protection des lanceurs d’alerte dont la France doit enfin se doter avec la loi Sapin 2