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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives de l'auteur : LDH Aix

Avec le Secrets des affaires, plus de « Panama Papers »? 7 avril, 2016

Source: Avec le Secrets des affaires, plus de « Panama Papers »?

Mossack Fonseca, le cabinet d’avocats panaméen au centre du scandale et dont proviennent les Panama Papers, a répondu aux requêtes des journalistes en concluant avec une mise en garde explicite :

« Il semble que vous ayez eu accès de façon non autorisée à des documents et des informations appartenant à notre entreprise et les ayez présentés et interprétés hors de leur contexte. Nous ne doutons pas que vous sachiez parfaitement qu’utiliser des informations ou de la documentation obtenus illégalement est un crime, et nous n’hésiterons pas à utiliser tous les recours pénaux et civils disponibles. » (1)

Le projet de Directive UE sur la « protection des secrets d’affaires », sur lequel le Parlement Européen se prononcera en séance plénière à Strasbourg le 14 avril prochain, se propose justement de donner à de telles entreprises des moyens juridiques supplémentaires pour poursuivre des journalistes ou des entreprises de presse publiant sans leur consentement des documents et des informations internes.

Ce texte crée un droit au secret pour les entreprises qui est excessif : il menace directement le travail des journalistes et de leurs sources, les lanceurs d’alerte, les syndicalistes, la liberté d’expression des salariés et nos droits d’accéder à des informations d’intérêt public (par exemple sur les médicaments, les pesticides, les émissions des véhicules, etc.).

Une coalition européenne d’associations, de syndicats, de journalistes, de lanceurs d’alerte et de scientifiques (liste à la fin du Communiqué) demande aux membres du Parlement Européen de rejeter ce texte et de demander à la Commission Européenne d’en proposer une version conforme avec les exigences de transparence. Une pétition européenne a également été lancée et compte plus de 72.000 signatures après seulement quelques jours.

La définition du secret des affaires prévue par la directive est tellement large que presque toutes les informations internes d’une société peuvent y correspondre. Cela mettra en danger toute personne qui révèle ces informations sans le consentement de l’entreprise.

Pour Patrick Kamenka, membre du comité directeur de la Fédération Européenne des Journalistes « les citoyens, les journalistes ou encore les scientifiques ont parfois besoin d’avoir accès à ces informations et de les publier dans l’intérêt général. Ils risqueraient alors, comme Antoine Deltour et Edouard Perrin dans l’affaire LuxLeaks, des poursuites judiciaires pouvant se conclure par des peines de prison et des amendes de plusieurs centaines de milliers d’euros. C’est une manière très efficace d’empêcher les gens de dénoncer des cas de mauvaise conduite des entreprises. Quel rédacteur en chef peut se permettre de risquer la banqueroute de son journal? »

Et ce n’est pas tout. Si la directive est approuvée au niveau européen, les États membres pourront encore aller plus loin quand ils l’adapteront à leurs droits nationaux, et on peut compter sur les multinationales pour les pousser en ce sens.

Pour Martin Pigeon, de Corporate Europe Observatory, « cette bataille ne sera pas facile : les multinationales mènent un lobbying acharné depuis des années pour obtenir cette directive et ont lourdement influencé la rédaction du texte, mais le grand public n’en sait presque rien. Il n’est aujourd’hui malheureusement plus possible, politiquement, d’amender le texte. Nous devons donc demander aujourd’hui aux députés européens de le rejeter en bloc, mais sans mobilisation des citoyens nous n’arriverons à rien. »
Pour Françoise Dumont, présidente de la Ligue des Droits de l’Homme, « le président Hollande vient de remercier les lanceurs d’alerte et la presse pour leur travail sur les Panama Papers et les rentrées fiscales qu’elles vont permettre. Pourrait-il soutenir publiquement Antoine Deltour (Luxleaks) et exiger que ce texte dangereux pour les lanceurs d’alerte et la presse soit retiré? »

Bruxelles, le 5 avril 2016

(1) http://www.irishtimes.com/business/retail-and-services/panama-papers-mossack-fonseca-responds-to-leak-1.2597622
(2) Cette directive est officiellement appelée « Directive sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites ».
(3) Voir http://corporateeurope.org/power-lobbies/2016/03/trade-secrets-protection
(4) Voir https://act.wemove.eu/campaigns/les-lanceurs-d-alerte-en-danger

Liste des membres de la coalition européenne

Anticor
ATTAC Spain
ATTAC France
Association Européenne pour la Défense des droits de l’Homme
Centre national de coopération au développement, CNCD-11.11.11
Correctiv.org, Germany
BUKO Pharma-Kampagne
CCFD-Terre Solidaire
CGT Cadres, Ingénieurs, Techniciens (UGICT-CGT)
Collectif Europe et Médicament
Collectif de journalistes “Informer n’est pas un délit”
Comité de soutien à Antoine Deltour
Commons Network
conseil d’urgence citoyenne
Corporate Europe Observatory
Courage Foundation
EcoNexus
European Network of Scientists for Social and Environmental Responsibility (ENSSER)
Fédération Syndicale Unitaire (FSU)
Fondation Sciences Citoyennes
Force Ouvrière-Cadres
Genewatch
GMWatch
Health and Trade Network
Inf’OGM
Institut Veblen
International Society of Drug Bulletins
Les économistes atterrés
Ligue des Droits de l’Homme
Observatoire Citoyen pour la Transparence Financière Internationale (OCTFI)
OGM Dangers
Peuples Solidaires-ActionAid France
Nordic Cochrane Centre
Pesticides Action Network Europe (PAN-Europe)
Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires
Public Concern At Work
Solidaires
Syndicat des Avocats de France (SAF)
Syndicat National des Chercheurs Scientifiques (SNCS – FSU)
Syndicat National des Journalistes (SNJ)
Syndicat National des Journalistes CGT (SNJ-CGT)
Tax Justice Network
Transparency International France
WeMove.eu
Whistleblower-Netzwerk e.V., Germany
Xnet

Télécharger le communiqué.

 

Réforme du Code de procédure pénale : sortir de la surenchère sécuritaire 7 avril, 2016

Source: Réforme du Code de procédure pénale : sortir de la surenchère sécuritaire

Le Sénat doit voter, ce mardi 5 avril, le projet de loi dit de « lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale ».

Ce texte a été contesté par différentes institutions indépendantes et qualifiées de notre pays. La Commission nationale consultative des droits de l’Homme, la Conférence des premiers présidents de cours d’appel et même le Conseil d’Etat ont pu dire que plusieurs propositions du projet sont de nature à entraîner des atteintes excessives à la liberté individuelleSourd à ces interpellations, le gouvernement a choisi la procédure accélérée pour l’examen du texte.

Cette loi donnerait au ministère de l’Intérieur et à la police des pouvoirs directement inspirés de l’état d’urgence : retenue administrative de quatre heures avec possibilité de consulter l’ordinateur de la personne, d’accéder à ses communications, de capter et d’enregistrer toutes ses données informatiques… Le projet introduit également une forme d’irresponsabilité pénale des forces de l’ordre, fondée non plus sur une stricte légitime défense mais sur la notion plus floue d’état de nécessité. Enfin, il développerait encore les moyens d’une surveillance massive des citoyennes et des citoyens.

Plus largement, le texte s’inscrit dans la continuité d’un ensemble de textes législatifs qui ont renforcé les pouvoirs de police administrative ainsi que les règles de répression. Dans ce cadre, il poursuit une logique de transfert des compétences et pouvoirs du juge judiciaire vers le parquet et l’autorité administrative qui dépendent plus directement du pouvoir exécutif.

La Ligue des droits de l’Homme constate que les lois comportant des dérives sécuritaires qui s’empilent depuis trente ans n’ont pas fait la preuve de leur efficacité, et refuse une société du contrôle généralisé glissant du principe de la présomption d’innocence à celui de la culpabilité potentielle. Ces dérives renforcent les discours populistes remettant en cause les principes guidant l’exercice des droits, et mettent en place des outils de contrôle de masse et de limitation des libertés particulièrement dangereux.

La LDH réaffirme la nécessité de maintenir le principe de la séparation des pouvoirs – exécutif, législatif, judiciaire –, fondement de la démocratie. Elle affirme qu’il est possible et nécessaire d’agir face au terrorisme et à la criminalité en respectant les libertés et en redonnant toute sa place à la justice.

La LDH demande donc aux parlementaires de rejeter ce projet de loi.

Paris, le 5 avril 2016

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Lettre ouverte sur la politique de la France menée à l’égard de la Chine 7 avril, 2016

Source: Lettre ouverte sur la politique de la France menée à l’égard de la Chine

Paris, le 1er avril 2016

Monsieur le Ministre,

À l’occasion de votre nouvelle prise de fonction et sachant l’importance que vous accordez au respect des droits de l’Homme, aussi bien comme magistrat élu de Nantes que comme ministre, nous tenons à vous exprimer les inquiétudes que suscite en nous la politique menée depuis des années à l’égard de la Chine.

Le 22 octobre 2013, la Ligue des droits de l’Homme a demandé à votre prédécesseur que le gouvernement français ne soutienne pas la candidature de la Chine au Conseil des Nations unies pour les droits de l’Homme « compte tenu des violations répétées et continues que le gouvernement de ce pays commet au fil des années ». La puissance économique et démographique ne suffit pas pour donner droit à arbitrer sur les droits de l’Homme. La Chine a pourtant été élue.

Nous constatons que les recommandations adressées à la Chine lors de l’Examen périodique universel, – y compris celles de la France – ne sont suivies d’aucun effet. Les pays qui les ont formulées semblent s’en contenter, comme si l’essentiel était non pas le résultat à atteindre mais la parole à prononcer. Les autorités chinoises ne peuvent que se réjouir des faiblesses exposées par leurs interlocuteurs et se sentent encouragées à ne faire aucun cas de leurs observations.

Le 23 décembre 2014, la Ligue des droits de l’Homme a adressé une lettre au président de la République à l’occasion du cinquantenaire des relations diplomatiques franco-chinoises. Elle s’y interrogeait sur les fondements et la qualité des liens noués dans le cadre du « partenariat stratégique global » décidé en 2004, au regard des espérances formulées par le général de Gaulle en 1964. Cette année du cinquantenaire fut en effet marquée par une intensification de la répression à l’encontre des militants des droits civiques, défenseurs de valeurs identiques aux nôtres et dont on ne peut que se sentir solidaire.

Cette répression, dont la lettre donnait de nombreux exemples, s’est depuis amplifiée. Elle touche les cybernautes, la presse – nationale et étrangère –, les avocats, les universitaires et les organisations non gouvernementales. Elle accompagne une concentration institutionnelle des pouvoirs sans précédent dans les mains du chef de l’Etat, chef du Parti, chef des armées et président de nombreux comités ad hoc constitués au sein du parti pour asseoir son autorité. La presse nationale, a-t-il récemment affirmé, doit être la voix du parti et ce dernier prend ouvertement la place de l’Etat. Cette évolution est dangereuse.

Elle s’exprime aussi à l’extérieur et la France ne peut y rester indifférente. Les tensions militaires s’accroissent dans le Pacifique occidental et en Asie du Sud-Est ; elles se traduisent par une course régionale aux armements qui devrait inquiéter les grandes puissances, l’Europe et les Nations unies. À tout le moins, la France pourrait s’abstenir d’y participer en respectant l’embargo sur les ventes d’armes décidé après le massacre du mouvement démocratique en 1989. Or une étude récente affirme qu’elle était le deuxième fournisseur d’armes de la Chine dans la période 2011-2015. Il nous semble préoccupant de substituer le commerce des armes à une politique de paix et de défense des valeurs universelles qui recueillerait l’adhésion enthousiaste du courant démocrate chinois.

Le gouvernement chinois ne trouve qu’avantage dans la complaisance des capitales occidentales qui font tout pour éviter qu’il perde la face et refusent voir ou de tenir compte de son expansion hégémonique. L’Europe, première puissance économique mondiale, dont la Chine a besoin pour son progrès industriel et technique, n’a pas plus à redouter de chantage économique que les Etats-Unis. Elle s’est exprimée pourtant ces dernières années lors de dialogues de routine sur les droits de l’Homme avec une discrétion et un manque de fermeté qui ne sont pas à son honneur.

Nous souhaitons que votre gouvernement se prononce avec clarté et conviction quand sont violés en Chine ces droits de l’Homme qui font partie de notre identité nationale. Nous souhaitons aussi qu’il use de son influence pour que l’Europe s’exprime avec la même netteté et sans craindre de rétorsions économiques, lesquelles ne nuiraient qu’à la Chine.

Plus précisément nous attendons de votre ministère,

1) dans son action nationale :

  • qu’il place les relations franco-chinoises dans un cadre purement interétatique et s’abstienne de parler constamment d’amitié avec un régime qui rejette ouvertement les fondements de notre vie sociale ;
  • qu’il réintègre les droits de l’Homme dans la liste des problèmes abordés dans le « dialogue de haut niveau sur les échanges humains » initié par votre prédécesseur ;
  • qu’il tienne à jour une liste des prisonniers politiques ou des prisonniers de conscience et interroge à leur sujet les autorités chinoises lors des discussions renouvelées sur les droits de l’Homme ;
  • qu’il demande leur libération sur la base des engagements pris au titre de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, du Pacte pour les droits civiques et politiques et de la Constitution chinoise ;
  • qu’il tire des conséquences concrètes des acceptations ou des refus de la partie chinoise, faute de quoi ces discussions n’auraient aucun intérêt ;
  • qu’il respecte l’embargo sur les livraisons d’armes tant que le régime chinois n’aura pas reconnu ses responsabilités dans la sanglante répression du mouvement démocratique de 1989 et tant que ne seront pas retombées les menaces liées à la tension militaire dans la mer de Chine méridionale ;

2) dans son action extérieure :

  • qu’il redonne vigueur aux discussions sur les droits de l’Homme au niveau européen en favorisant des prises de position solidaires dans le dialogue avec la Chine, notamment dans une action concertée avec la République fédérale d’Allemagne ;
  • qu’il redonne toute son importance au Conseil des droits de l’Homme de l’ONU et exige de la Chine qu’elle réponde de façon concrète et précise aux questions posées lors de l’Examen périodique universel ;
  • qu’il exige, sous peine de nullité de la consultation, que des ONG authentiques chinoises aient la possibilité de présenter leurs observations au Conseil des droits de l’Homme, comme le prévoit la procédure de l’EPU ;
  • qu’il lutte pour le respect de l’embargo européen sur les livraisons d’armes à la Chine, tant que la direction chinoise continuera de nier le massacre de 1989 et tant que la course aux armements se poursuivra en Asie orientale ;
  • qu’il veille au respect des engagements pris par la Chine lors de la COP 21 en matière de réduction des gaz à effet de serre, alors même que ce pays prévoit d’accroître sa consommation de charbon dans les années prochaines.

Vous comprendrez que je rende publique cette lettre.

Je vous prie d’agréer, monsieur le Ministre, l’expression de ma haute considération.

Françoise Dumont
Présidente de la LDH

 

« Les expulsions forcées subies par les Roms atteignent des niveaux intolérables » 17 mars, 2016

Source: « Les expulsions forcées subies par les Roms atteignent des niveaux intolérables »

Paris, le 8 mars 2016

Monsieur le Ministre,

Nous vous adressons cette lettre car les expulsions forcées subies par les Roms (ou les personnes désignées comme telles) vivant dans des bidonvilles en France atteignent des niveaux intolérables durant cette période hivernale.

En effet, le recensement des évacuations forcées de lieux de vie occupés par des Roms (ou des personnes désignées comme telles), en France, indique que depuis le début de l’année 2 582 personnes ont été évacuées de force de leurs lieux de vie, soit près de 300 personnes par semaine.

Sans attendre la fin du premier trimestre 2016, nous voulons alerter sur cette situation indigne et inhumaine. Rien que durant la dernière semaine, en plein hiver, ce sont plus de 1 000 personnes qui ont été ainsi jetées à la rue à Roubaix, à Marseille, à Nantes et en d’Ile-de-France.

Dans votre réponse au Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, M. Nils Muižnieks, en date du 12 février 2016, vous affirmiez : « Des efforts sont faits pour atténuer au maximum les effets sur les parcours de scolarisation, ce qui explique notamment qu’une grande partie des évacuations ont lieu en été. » Si ce que vous dites est avéré et au vu du nombre élevé d’évacuations forcées exécutées durant les deux premiers mois de cette année, nous craignons le pire, pour l’été à venir. Dans le cas contraire, vos dires ne se vérifient pas dans les faits.

Dans le même courrier, vous faites référence à la circulaire du 26 août 2012, indiquant son application lors des évacuations forcées. Nous devons vous contredire aussi sur ce sujet : sur les 19 expulsions recensées depuis le début de l’année, seules 11 ont fait l’objet d’une proposition d’hébergement temporaire. L’application de cette circulaire n’est pas du tout systématique, et ceci depuis le mois d’août 2012. Quand elle l’est, ce n’est que de manière très partielle. Cette observation est faite par tous les acteurs opérant sur le terrain. Ces expulsions se font, de fait, toujours sans solution de relogement valide et pérenne.

Ces expulsions sont condamnées par le Commissaire aux droits de l’Homme ou la Commission antiracisme (Ecri) du Conseil de l’Europe. Dans la lettre que le Commissaire aux droits de l’Homme vous a envoyé le 26 janvier 2016, M. Nils Muižnieks spécifiait en effet : « En outre, comme je l’ai rappelé dans mon rapport de 2015, le Comité européen des droits sociaux a rendu une série de décisions concernant la France, constatant plusieurs violations de la Charte sociale européenne concernant les droits sociaux des Roms. »

L’inquiétude est grande car on ne comprend pas pourquoi se perpétue cette politique inhumaine, indigne et inutile, car elle ne résout rien. Elle aboutit à précariser encore plus une population déjà très fragilisée. On estime qu’un tiers des personnes ainsi rejetées sans abri sont des enfants.

Nous voulons vous alerter ainsi que l’opinion publique, car, comme pour les réfugiés de Calais, c’est une politique du bulldozer qui est mise en place.

Nous réitérons la même demande, de manière inlassable : la suspension des expulsions systématiques, la sécurisation des bidonvilles et leur assainissement, la mise en place de solutions adaptées pour l’insertion des familles à travers le droit commun et ceci avant toute expulsion, pour toutes les familles et sur tout le territoire. Le suivi de ces politiques devrait être organisé dans le cadre d’un dialogue permanent entre les pouvoirs locaux (communes, collectivités territoriales), les autorités régionales et nationales et les acteurs publics et associatifs actifs dans les bidonvilles.

Vous comprendrez, monsieur le Ministre, que nous rendions cette lettre publique.

Je vous prie de croire, monsieur le Ministre, en l’expression de ma haute considération.

Françoise Dumont
Présidente de la LDH

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Grande-Synthe : un cynisme hors norme 11 mars, 2016

Source: Grande-Synthe : un cynisme hors norme

Communiqué commun

D’une capacité d’accueil de 2 500 personnes, le camp de Grande-Synthe qui vient d’ouvrir ses portes est déjà menacé de fermeture. Il doit pourtant permettre à des migrants vivant jusqu’à présent dans des conditions inhumaines de se délester un peu des angoisses quotidiennes nourries par l’insalubrité et la précarité.

Qu’importe. Malgré l’urgence d’héberger les migrants dans de bonnes conditions, les autorités françaises dénoncent dans une lettre de mise en demeure adressée au maire de Grande-Synthe l’ouverture précipitée du camp, qu’elles estiment « préjudiciable à la sécurité de centaines de personnes ». Au lieu de s’engager enfin dans des actions concrètes dont beaucoup relèvent de sa responsabilité, voici que l’Etat se pose en inspecteur des travaux finis : au prétexte de normes qui ne sont pas respectées, il menace le maire de Grande-Synthe, insistant sur le risque juridique qu’il encourt à titre personnel. A ce dernier, nous témoignons ici notre total soutien.

La situation ne manque pas d’ironie : alors que l’Etat a lui-même été condamné en novembre pour avoir manqué à ses obligations, notamment celles concernant la santé publique et l’hébergement d’urgence, le voilà qui sanctionne celles et ceux qui ont joint leurs efforts pour pallier ses manquements, et enfin proposer aux migrants une nette amélioration de leurs conditions d’existence : un camp ouvert, composé d’abris privatifs plus solides, et disposant des conditions requises en termes sanitaires et d’hygiène.

Certes, beaucoup reste à faire. Ce nouveau camp de Grande-Synthe n’a jamais eu la prétention de tout régler ni de se conformer aux exigences légales les plus strictes. Dans l’urgence, il s’agissait avant tout de mettre les personnes à l’abri comme de leur assurer les conditions minimales d’une existence décente. C’est à nous – ONG, associations d’aide et bénévoles – qu’il revient désormais d’investir ce lieu choisi par défaut. C’est à nous et aux migrants eux-mêmes qu’il appartiendra d’en faire, avec le concours des habitants de la région, un endroit qui leur fasse oublier pour un temps ce qu’ils ont subi trop longtemps.

Car avant d’exiger le respect des normes, c’est la politique subie par les migrants en France qui reste à ce jour anormale et à laquelle il faut impérativement renoncer. Reflet des pratiques migratoires observées en Europe, elle emprunte à chaque fois des chemins plus funestes, tandis que les autorités devraient se mobiliser au contraire pour améliorer dans l’urgence l’accueil des gens fuyant la guerre, la répression ou la misère.

A la gestion dissuasive et policière s’ajoute à présent une gestion administrative et technocratique menée contre les espaces dédiés aux migrants, et contre un élu qui tente de les accueillir dignement. Le camp de Grande-Synthe est menacé de fermeture. Il n’est peut-être pas aux normes. Une chose est sûre. En France, le cynisme d’Etat, lui, est désormais hors norme.

 

Paris, le 9 mars 2016

 

Premiers signataires :

  • Amnesty International
  • Emmaüs France
  • Gisti
  • L’Auberge des migrants
  • LDH – Ligue des droits de l’Homme
  • Médecins du monde
  • Médecins sans frontières
  • Secours catholique
  • Utopia 56

Un Premier ministre pyromane 8 mars, 2016

Source: Un Premier ministre pyromane

Le Premier ministre vient d’assimiler l’antisionisme à l’antisémitisme et à la haine d’Israël, lors du dîner annuel du Crif.

En se livrant à cet amalgame, le Premier ministre emboîte le pas à tous ceux qui, du Crif à Benjamin Netanyahou, tentent de faire taire ceux et celles qui critiquent la politique du gouvernement israélien.

Pire encore, il alimente de la pire manière qui soit l’idée selon laquelle soutenir les droits du peuple palestinien équivaut à délégitimer l’Etat d’Israël.

La lutte contre l’antisémitisme, comme contre toutes les formes de racisme, exige des pouvoirs publics qu’ils s’abstiennent d’alimenter des discours mensongers qui ne peuvent qu’alimenter haines et conflits.

Paris, le 8 mars 2016

Appel à un 8 mars de lutte pour l’égalité femmes-hommes au travail et dans la vie ! 7 mars, 2016

Source: Appel à un 8 mars de lutte pour l’égalité femmes-hommes au travail et dans la vie !

Ce 8 mars : luttons, faisons grève, manifestons, rassemblons-nous, menons ensemble des actions festives et symboliques !

A Paris :

Rassemblement le 8 mars à 12h30 devant le Medef, 55 avenue Bosquet, paris 7e (M° Ecole militaire)

Manifestation le 8 mars au soir, rendez-vous à 18 heures, Fontaine des innocents (M° Les Halles) vers Saint-Lazare.


Le 8 mars, c’est la Journée internationale de luttes pour les droits des femmes du monde entier !
Les luttes des femmes ont permis de conquérir des droits et de progresser vers l’égalité entre les femmes et les hommes.

La journée du 8 mars, qui célèbre l’histoire de ces luttes, est plus qu’un symbole. C’est la journée internationale de luttes pour les droits des femmes du monde entier. Ce n’est pas la journée de « la » femme, comme les médias se complaisent à le répéter. Nous refusons la récupération de cette journée à des fins commerciales, avec des messages publicitaires proposant de la « fêter » par un cadeau ou une distribution de fleurs sur le lieu de travail… sans doute pour mieux faire oublier, le reste de l’année, l’ampleur des inégalités qui restent à combattre.

Dans la société les femmes sont partout mais l’égalité nulle part !

Les femmes sont touchées par les inégalités de salaire et de retraite, par le temps partiel subi, la précarité, elles sont majoritairement en charge des tâches domestiques et familiales, minoritaires dans les postes de responsabilité politique ou économique. Elles sont trop souvent victimes de multiples formes de violences : viols, violences conjugales, violences sexistes et sexuelles au travail, lesbophobie, prostitution, agressions racistes, violences contre des femmes réfugiées. Les femmes sont les premières victimes des guerres.

Aujourd’hui plus que jamais nous devons nous rassembler, faire converger nos luttes pour l’égalité et contre toute forme de violence.

Les politiques d’austérité, la montée des extrêmes droites et le retour des extrémismes religieux imposent plus que jamais des régressions pour les femmes :

la loi Rebsamen (dilution des rapports de situation comparée et des négociations égalité professionnelle), la loi Macron (travail du dimanche et de nuit), précarisent encore plus la situation des femmes ;

la diminution drastique des dépenses publiques met en danger les services publics et touche particulièrement les femmes : menace sur les gardes d’enfants, sur l’accès au droit à l’IVG (150 centres IVG fermés en 10 ans), sur l’accès aux soins (notamment l’éloignement des services de maternité…) ;

la diminution voire la fin des subventions publiques menace l’existence même des associations féministes qui œuvrent tous les jours pour les femmes ;

les courants extrémistes ont réussi à faire enterrer les ABCD de l’égalité à l’école, et menacent le droit à l’IVG. Ils refusent la PMA pour toutes les femmes.

AGIR ! RENDRE TOUTES LES LUTTES DES FEMMES VISIBLES !

Comme les coiffeuses et manucures du boulevard de Strasbourg, comme les femmes de chambre des grands hôtels, comme les femmes de ménage grecques, comme les femmes de Latelec en Tunisie, comme toutes les anonymes qui disent tous les jours STOP à toute forme de violence, comme toutes celles et ceux qui œuvrent chaque jour pour le droit des femmes, faisons entendre la voix des femmes !

Luttons pour obtenir l’égalité salariale, contre le temps partiel imposé et la précarité

Imposons le partage des tâches domestiques. Les femmes ne sont pas programmées génétiquement pour accomplir ce travail. Assez de la double journée !

Pour faire reculer le système patriarcal et obtenir l’égalité, aussi bien au travail, dans la famille que dans la société toute entière, le 8 mars ne doit pas être une journée sans lendemain. Plus que jamais, il doit s’inscrire dans une dynamique de mobilisations, de luttes et de revendications des femmes, ici et partout dans le monde,

Sur la base de ce texte, les signataires appellent à renforcer ou à créer partout des collectifs unitaires pour préparer ensemble des 8 mars de luttes, revendicatifs, féministes et syndicaux.

Premiers signataires : Collectif national pour les droits des Femmes, Agir contre le chômage !, Ailes-Femmes du Maroc, ANEF, Alternative Libertaire, CADAC, les Chiennes de garde, CGT, Collectif 20e/Tenon, Coordination Lesbienne en France, DIDF Fédération des associations des travailleurs et des jeunes, Les Effronté-e-s, EELV, Ensemble !, Étudiants communistes de Nice, Femmes Égalité, Femmes libres Radio Libertaire, Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir, Femmes Migrantes Debout, FSU, Jeunes communistes des Alpes-Maritimes, Ligue des droits de l’Homme, Ligue des femmes iraniennes pour la démocratie, Maison des Femmes de Montreuil, Maison des Femmes de Paris, Marche mondiale des femmes, Ile de France, Mémoire Traumatique et Victimologie, Mouvement du Nid Paris, NPA, Osez le Féminisme, Parti de Gauche, PCF, PCOF, Rajfire, Réseau féministe Ruptures, Sans compromis, Snpes-PJJ-FSU, UFAL, Union Syndicale Solidaires.

 

Réfugiés à Calais : vingt-deux millions d’euros pour servir de garde-chiourme ! 7 mars, 2016

Source: Réfugiés à Calais : vingt-deux millions d’euros pour servir de garde-chiourme !

Communiqué LDH

Vingt-deux millions d’euros, c’est ce que le gouvernement britannique offre de payer à la France pour cantonner les réfugiés à distance de ses côtes. Peu importe les attaches familiales, peu importe les devoirs de la Grande-Bretagne, l’essentiel est que la France continue à faire obstacle. Et le gouvernement français accepte de jouer ce jeu aussi malsain qu’honteux, s’inscrivant ainsi dans les accords du Touquet souscrits par N. Sarkozy.

Pourtant, l’Elysée et Matignon savent que la situation actuelle est intenable et qu’elle ne peut que générer drames humains et affrontements en série. Les conditions particulièrement brutales dans lesquelles le gouvernement procède à la destruction d’une partie de la « jungle » en attestent.

Il est plus que temps que les gouvernements français et britannique, et l’Union européenne dans son ensemble, changent de politique. Accueillir ces réfugiés est un devoir d’humanité ; cesser de les balloter au gré de procédures qui ont fait la preuve de leur nocivité relève du simple bon sens politique. C’est ce qu’on attend de gouvernements qui se disent soucieux de respecter les valeurs proclamées de l’Union européenne.

Vingt-deux millions d’euros pour laisser des milliers de personnes, hommes, femmes et enfants, croupir dans le dénuement ! Cet argent peut être mieux utilisé. Plutôt que de parquer, décidons enfin d’accueillir.

Paris, le 4 mars 2016

Pas de compromis sur les droits humains ! La Turquie n’est pas un pays sûr – La migration n’est pas une menace 7 mars, 2016

Source: Pas de compromis sur les droits humains ! La Turquie n’est pas un pays sûr – La migration n’est pas une menace

Pas de compromis sur les droits humains !

La Turquie n’est pas un pays sûr – La migration n’est pas une menace

Bruxelles, 4/03/16 – Ces derniers mois, l’Union européenne (UE) a déployé tous les efforts possibles, y compris des moyens militaires, pour protéger sa frontière de ce qu’elle présente sans relâche et à tort comme une menace à sa sécurité intérieure. En détournant le regard des violations des droits perpétrés en Turquie ainsi que de ses obligations internationales envers les personnes migrantes et réfugiées, l’UE et ses Etats membres mettent en danger – directement et honteusement – la vie de millions de personnes.

 

Le 7 mars 2016, les chefs d’Etats et de gouvernement se réuniront avec les autorités turques à Bruxelles, après avoir rencontré le premier ministre et le président turcs ainsi que les représentants de l’OTAN et de Frontex le 4 mars 2016 à Ankara. Depuis octobre 2015, la Commission européenne et ses Etats membres déploient leur « plan de coopération UE-Turquie » sur la migration qui vise à « tarir les flux migratoires » ainsi que l’a exprimé sans détour le président du Conseil de l’UE.

Un certain nombre de mesures ont été prises pour mettre en œuvre ce plan. L’Union pousse notamment pour l’inscription de la Turquie sur la liste des pays d’origine sûrs, pour la renégociation de l’accord de réadmission controversé UE-Turquie de 2014 afin que les non-Turcs puissent être renvoyés en Turquie avant la date initialement prévue, et déploie des moyens civils et militaires contre les personnes migrantes et réfugiées (Frontex, opération OTAN). En parallèle, les Etats membres n’ont pas été capables de respecter leurs engagements de réinstallation et de répartition des personnes réfugiées.

Les autorités turques n’ont eu, de leur côté, aucun scrupule à conditionner leur coopération au versement de 3 milliards d’EUR, un « accord dangereux » largement dénoncé par les organisations de défense des droits humains. Une telle collaboration est non seulement immorale, mais aussi illégale. En bloquant les personnes loin de son territoire par tous les moyens, l’Union européenne viole le droit de quitter tout pays et le droit de demander l’asile, contrevenant ainsi aux obligations juridiques qui sont les siennes selon la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, le Pacte International sur les Droits Civils et Politiques, et la Convention de Genève relative au statut des Réfugiés. Cette coopération expose potentiellement les personnes à des formes de discrimination, voire de violence, en Turquie, pays où la situation des droits humains a rarement été aussi préoccupante.

Reconnaître l’importante contribution de la Turquie à l’effort humanitaire apporté aux réfugiés de Syrie ces dernières années ne doit pas faire oublier les évolutions récentes extrêmement inquiétantes qui, depuis plusieurs mois, entachent les engagements turcs de respect des droits humains dans des proportions sans précédent.

C’est notamment le cas pour les réfugiés de Syrie dont l’insécurité en Turquie va croissante : au moins trois militants qui documentaient les violations des droits commises par Da’esh ont été tués, et un journaliste syrien arrêté sans motif ni contact avec l’extérieur pendant trois jours en février 2016. La fermeture de la frontière syrienne et l’imposition de visas depuis janvier 2016 aux ressortissants de Syrie désirant entrer en Turquie par avion ont considérablement accru la vulnérabilité des personnes réfugiées abandonnées dans un pays ravagé par la guerre. Le regroupement familial, ainsi que la liberté d’association, d’assemblée et de circulation des réfugiés de Syrie sont aussi restreints via l’imposition de permis spécifiques nécessaires aux déplacements au sein du pays (par voies terrestre et aérienne).

D’un point de vue de politique intérieure, le pays s’éloigne peu à peu d’une gouvernance démocratique fondée sur un état de droit. Dans le sud-est, les autorités ont imposé 58 mesures de couvre-feu depuis août 2015 dans 19 districts de 7 villes, certains pendant des mois d’affilée – avec des conséquences sur environ 1,4 millions de personnes – dans une stratégie proche de la punition collective et alors que le conflit entre le PKK et le gouvernement turc a repris en intensité. Des violations graves des droits humains par les forces de sécurité, parmi lesquelles des assassinats extra-judiciaires, des actes de tortures, et des violations de la neutralité des espaces et des employés médicaux ont été documenté par des organisations de défense des droits humains.  En parallèle, les autorités ont sanctionné toute forme de critique ou d’opposition, emprisonnant journalistes, opposants politiques et défenseurs des droits humains. La répression violente envers les universitaires signataires de la déclaration pour la paix est l’exemple le plus récent de l’intolérance des autorités turques à toute opinion divergente, et de la manipulation du système judiciaire à des fins répressives.

Si la notion de « pays sûr » est, en soi, en opposition totale avec la notion d’asile, l’ambition de l’UE d’inscrire la Turquie comme un pays sûr relève assurément d’un aveuglement volontaire aux fins de contrôles aux frontières. Que ce soit pour les minorités et les opposants, ou encore pour les étrangers, la Turquie ne peut être qualifiée de sûre.

L’absence de réaction de l’Union européenne à ces violations des droits est tristement emblématique d’une volonté délibérée d’ignorer le penchant autoritaire de son interlocuteur, reléguant sa politique des droits humains au rang d’un vœu pieu.

Le respect des droits humains ne peut être l’otage d’une politique de gestion des frontières, en particulier lorsque celle-ci est engagée contre des hommes, des femmes et des enfants. Il est grand temps que l’Union européenne use de ses moyens diplomatiques pour s’opposer aux auteurs des violations des droits humains si elle souhaite rester fidèle à ses valeurs et ses obligations*.

*Lire la lettre adressée à HR / VP Federica Mogherini dans laquelle EuroMed Droits exprime sa profonde préoccupation au sujet de la répression en cours contre les voix dissidentes en Turquie.