Twitter Facebook Accueil

Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives de l'auteur : LDH Aix

Frontex 2.0 : le bras armé de l’Union européenne se renforce et demeure intouchable 28 avril 2016

Source: Frontex 2.0 : le bras armé de l’Union européenne se renforce et demeure intouchable

Communiqué Frontexit

 

D’ici août 2016, les institutions européennes veulent remplacer Frontex par une nouvelle agence de garde-côtes et de gardes-frontières qui portera encore davantage atteinte aux personnes en migration. Ce nouveau mandat renforce les inquiétudes dénoncées par la campagne FRONTEXIT depuis sa création : dissuader, contrôler et mettre à distance les hommes, les femmes et les enfants jugés indésirables alors qu’ils exercent leur droit à quitter tout pays et leur droit à demander l’asile.  

Presque un an jour pour jour après la terrible tragédie du 18 avril 2015, ayant causé la mort de près de 800 migrants et suscité l’émoi chez bon nombre de citoyens et de politiques européens, au moins 500 personnes en provenance de la Corne de l’Afrique auraient à nouveau péri en mer le 12 avril 2016.

Cet énième drame est insupportable et pourrait être évité. Cela prouve, s’il le fallait encore, que l’Union européenne (UE) n’a pas la volonté d’éviter les morts en mer. Déploiement de la force navale EUNAVFOR MED au large de la Libye en juin 2015, et création de cette nouvelle agence pour mieux « défendre l’espace Schengen » en 2016 : ce n’est pas la protection de vies humaines qui guide les politiques mais bien, au nom de la « lutte contre les passeurs », la mise à distance des migrants et des réfugiés.

De fait, l’agence européenne Frontex est inutile et dangereuse : elle n’empêche pas le recours aux passeurs puisque depuis sa mise en place ils se sont multipliés, et n’empêche pas non plus les morts en mer, considérant que le sauvetage n’est pas sa priorité, et qu’il pourrait même créer un « appel d’air ». Au contraire, le renforcement de la présence de Frontex déclenche l’utilisation de voies migratoires toujours plus dangereuses.

Les organisations membres de la campagne Frontexit alertent sur les dangers de cette nouvelle agence (voir document joint), qui, après l’accord UE-Turquie, est la nouvelle réponse cynique face à l’exode et aux naufrages de milliers de personnes en quête d’un lieu d’accueil en Europe.

Il est urgent de mettre un terme aux activités de l’agence plutôt que de la renforcer, d’accueillir les réfugiés et de reconsidérer radicalement la politique migratoire européenne.

27 avril 2016

Avant même l’adoption de la directive européenne, des sénateurs tentent d’introduire le secret des affaires dans la loi  » Numérique «  28 avril 2016

Source: Avant même l’adoption de la directive européenne, des sénateurs tentent d’introduire le secret des affaires dans la loi  » Numérique « 

#StopTradeSecrets

Avant même l’adoption de la directive européenne, des sénateurs tentent d’introduire le secret des affaires dans la loi « Numérique »

Les sénateurs ont adopté en commission des affaires sociales, mercredi 20 avril, un amendement introduisant la notion de secret d’affaires dans le projet de loi sur la République numérique. Ce projet de loi, supposé notamment garantir l’accès des citoyens aux données publiques, crée ainsi un droit discrétionnaire à l’opacité.

En effet actuellement, la communication des données publiques (notamment celles ayant trait aux marchés publics) est limitée par la protection du secret en matière commerciale et industrielle, lequel recouvre « le secret des procédés, le secret des informations économiques et financières et le secret des stratégies commerciales[1] ». Cette définition très large permet déjà de refuser de très nombreuses communications d’informations et s’appuie sur une jurisprudence fournie. Cependant, la commission des affaires sociales du Sénat a fait le choix d’élargir considérablement la définition du secret en matière commerciale et industrielle, en précisant dans l’article L311-6 du projet de loi qu’il comprend aussi le secret des affaires. L’exposé des motifs de l’amendement 233 indique ainsi qu’il est inutile « de préciser les modalités d’appréciation de ce secret, étant entendu qu’il ne peut s’agir que d’une appréciation au cas par cas prenant en compte le contexte dans lequel s’inscrit chaque demande de communication[2] ».

Et pour cause : la notion de secret des affaires n’est absolument pas définie dans le droit français. Une telle définition est proposée par la directive européenne  approuvée par les eurodéputés le 14 avril dernier, malgré une très large contestation citoyenne et syndicale, laquelle doit, avant d’être adaptée en droit national, être encore validée par le Conseil de l’Union Européenne le 17 mai prochain. Nous considérons que cette directive est dangereuse pour les libertés notamment parce que sa définition du secret des affaires est large et floue – ce qui permet de recouvrir la quasi-totalité des informations internes de l’entreprise – et parce qu’elle permet à l’entreprise de poursuivre toute personne qui divulguerait un secret d’affaires, même s’il n’y a aucune utilisation de ce secret à des fins commerciales. Le projet de directive menace donc gravement la liberté d’expression sur les entreprises et la capacité des citoyens à accéder aux informations sur les conséquences sociales, environnementales ou sanitaires des pratiques des entreprises. Mais aussi à des informations de base sur les conséquences budgétaires de contrats signés par les élus, notamment les partenariats public-privés, qui peuvent engager la puissance publique pour des délais et des montants très significatifs. Une coalition européenne de 54 organisations appelle au rejet cette directive[3].

L’examen du projet de loi débute en séance plénière au Sénat ce mardi 26 avril. Nous appelons les sénateurs à rejeter l’amendement introduisant la notion de secret d’affaires dans le projet de loi sur la République Numérique, car il limitera sans aucune justification valable la capacité des administrations publiques à communiquer des informations essentielles pour l’intérêt général. Nous appelons également le gouvernement à prendre position sur ce dossier et à refuser aussi bien cet amendement sur le secret des affaires que la directive sur laquelle il doit formellement se prononcer à Bruxelles le 17 mai prochain. Le procès d’Antoine Deltour et d’Edouard Perrin, lanceur d’alerte et journaliste à l’origine de l’affaire LuxLeaks et poursuivis au Luxembourg au nom de la protection du secret d’affaires, débute ce mardi 26 avril. Il y a deux semaines, François Hollande félicitait journalistes et lanceurs d’alerte pour leur courage dans l’affaire Panama Papers : «Je remercie les lanceurs d’alerte, je remercie la presse qui s’est mobilisée (…) c’est grâce à un lanceur d’alerte que nous avons ces informations (…) ils prennent des risques, ils doivent être protégés ».

Quelle politique le gouvernement et le Sénat veulent-ils aujourd’hui défendre, la défense du droit d’informer ou sa répression ?

 

[1] http://www.cada.fr/le-secret-en-matiere-commerciale-et-industrielle,6239.html

[2] http://www.nossenateurs.fr/amendement/20152016-325/COM-233

[3] https://act.wemove.eu/campaigns/les-lanceurs-d-alerte-en-danger

 

Paris, le 26 avril 2016

17 organisations de la société civile lancent une pétition pour renforcer la protection des lanceurs d’alerte en France 28 avril 2016

Source: 17 organisations de la société civile lancent une pétition pour renforcer la protection des lanceurs d’alerte en France

Cliquez ici pour signer la pétition nationale pour la protection des lanceurs d’alerte

Scandale des Panama Papers, choc de l’adoption par le Parlement européen de la directive « secret des affaires », procès d’Antoine Deltour, le lanceur d’alerte à l’origine des LuxLeaks : l’actualité nous démontre une fois encore l’urgence qu’il y a à protéger ceux qui prennent des risques pour renforcer nos démocraties. Il ne faut pas laisser le secret devenir la norme et la liberté l’exception.

Le projet de loi Sapin 2, une opportunité unique de protéger enfin les lanceurs d’alerte

Annoncé depuis 2015 par François Hollande, le projet de loi relatif à la transparence, la prévention de la corruption et la modernisation de la vie politique (dite « Loi Sapin 2 ») devait enfin doter la France d’une législation ambitieuse pour protéger les lanceurs d’alerte.

Si le texte offre une véritable opportunité d’adopter les meilleurs standards internationaux pour lutter contre la corruption, il ne saisit pas, en l’état, l’occasion de protéger véritablement tous les lanceurs d’alerte. Au contraire, il ajoute au millefeuille législatif français, à l’inégalité de traitement des salariés, à l’insécurité juridique et perpétue l’impunité des auteurs de représailles. Encore trop nombreux sont ceux qui se retrouvent isolés et dépourvus de soutien alors qu’ils agissent dans l’intérêt de tous en dévoilant les failles de nos sociétés.

Toutes les organisations signataires appellent les parlementaires à se saisir de l’examen de cette prochaine loi anticorruption pour accorder enfin un statut global et une protection effective aux lanceurs d’alerte en France. Elles ne manqueront pas de mobiliser le plus grand nombre à travers leur pétition nationale.

Pétition lancée à l’initiative de Powerfoule et Transparency International France, avec le soutien des organisations suivantes :

– Attac
– CCFD Terre Solidaire
– CFDT cadres
– Greenpeace
– Pacte Civique
– Pugwash – France
– Sherpa
– UGICT – CGT
– Anticor
– Bloom
– CFDT
– Collectif Roosevelt
– Ligue des droits de l’Homme
– Plate-forme paradis fiscaux et judiciaires
– Réseau Environnement Santé
– Survie

 

Un gouvernement drogué à l’état d’urgence 28 avril 2016

Source: Un gouvernement drogué à l’état d’urgence

Communiqué LDH

Comme on pouvait s’y attendre, le gouvernement veut proroger une nouvelle fois l’état d’urgence. Le motif ? La Coupe européenne de football et le Tour de France. Alors que le gouvernement s’apprête à obtenir du Parlement qu’il intègre certaines dispositions de l’état d’urgence dans le droit commun et qu’il renforce considérablement les pouvoirs du parquet et de la police, voici qu’il y ajoute une prolongation de mesures d’exception qui n’ont aucune raison de subsister. Cette décision qui sera, bien sûr, approuvée par un Parlement qui accepte de se transformer en chambre d’enregistrement, traduit l’addiction du gouvernement aux mesures d’exception. Il traduit aussi sa volonté de nous habituer à vivre sous ce régime, espérant ainsi que les femmes et les hommes de ce pays oublieront que la défense de nos libertés est aussi un des moyens essentiels de lutter contre les actes de terrorisme. La LDH appelle chacun à ne pas tomber dans ce piège.

Paris, le 20 avril 2016

100 000 citoyens européens appellent les eurodéputés à voter contre la directive secret des affaires 14 avril 2016

Source: 100 000 citoyens européens appellent les eurodéputés à voter contre la directive secret des affaires

Une coalition de 51 ONG européennes a lancé le 30 mars un appel aux eurodéputés ainsi qu’une pétition leur demandant de rejeter la directive sur le secret des affaires. En quelques jours, cette pétition a recueilli plus de 100.000 signatures. En France, ce sont plus de 20 associations et organisations syndicales qui se mobilisent.

En Allemagne, le DGB, la confédération syndicale allemande, qui compte 6 millions d’adhérents, vient d’appeler à son tour les eurodéputés à rejeter le projet de directive (voir courrier ci-joint).

La directive secret des affaires a été rédigée en toute opacité, suite au lobbying de quelques multinationales. Elle menace les libertés et l’intérêt général. Elle donne aux entreprises des moyens juridiques supplémentaires pour poursuivre des journalistes, des syndicalistes ou des journalistes publiant sans leur consentement des documents et des informations internes. La définition du secret des affaires prévue par la directive est tellement large que presque toutes les informations internes d’une société peuvent y correspondre.

La directive secret des affaires est inscrite à l’ordre du jour du parlement européen le 13 avril et doit être soumis au vote le 14 avril. L’affaire « Panama Papers » est un argument supplémentaire pour demander le rejet de ce projet de directive : comment lutter contre la fraude fiscale en adoptant un texte qui permettra aux multinationales de poursuivre les journalistes et les lanceurs d’alerte ?

Paris, le 8 avril 2016

Des évacuations forcées en hiver : une « politique indigne de destruction » 8 avril 2016

Source: Des évacuations forcées en hiver : une « politique indigne de destruction »

Communiqué commun LDH et ERRC

Durant le premier trimestre 2016, 3 683 personnes ont été expulsées de force par les autorités de 25 lieux de vie. 100 personnes ont dû quitter un lieu de vie faisant suite à un incendie. Ces chiffres qui restent élevés indiquent que les conditions hivernales ne sont pas prises en compte lors des évacuations de ces bidonvilles ou squats.

Nous observons aussi une montée significative des expulsions fondées sur un arrêté de péril ou d’insalubrité de l’autorité communale. En effet, il y eut 11 évacuations forcées faisant suite à une assignation devant les tribunaux par les propriétaires des terrains ou des squats contre 14 faisant suite à un arrêté d’insalubrité ou de péril pris par la mairie ou le préfet. Sur les 25 évacuations effectuées par les autorités, des solutions d’hébergement temporaires n’ont été proposées que 13 fois. À la suite des 12 autres évacuations, les familles ont été tout simplement mises à la rue par les forces de l’ordre. Durant l’évacuation faisant suite à un incendie, il y n’y a pas eu de solution d’hébergement d’urgence mise en place, la majorité des habitants ayant déjà quitté les lieux avant le sinistre.

Depuis le début de l’année, la région Ile-de-France concentre 74 % des personnes expulsées, suivie par la région Auvergne-Rhône-Alpes avec 16 % et les Pays-de-la-Loire avec 8 %.

L’analyse des terrains selon le type de propriétaire montre que 17 terrains évacués de force sont publics, et deux de ces terrains publics font l’objet d’un projet justifiant cette évacuation. Ces évacuations forcées restent donc bien l’expression d’une volonté politique de rejet émise par un ensemble d’autorités étatiques. Ceci démontre aussi que cette politique d’évacuation forcée systématique n’est pas mise en place pour défendre la propriété privée (prétexte souvent employé), puisque les propriétaires sont publics dans la très grande majorité des cas.

Nous considérons que la circulaire du 26 août 2012 n’est pas appliquée.

Ces expulsions sont à nouveau condamnées par le Commissaire aux droits de l’Homme ou la Commission antiracisme (Ecri) du Conseil de l’Europe. Dans la lettre que le Commissaire aux droits de l’Homme a envoyée le 26 janvier 2016 à M. B. Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, M. Nils Muižnieks spécifiait en effet : « En outre, comme je l’ai rappelé dans mon rapport de 2015, le Comité européen des droits sociaux a rendu une série de décisions concernant la France, constatant plusieurs violations de la Charte sociale européenne concernant les droits sociaux des Roms. »[1]

Nous réitérons la même demande, de manière inlassable : la suspension des expulsions systématiques, la sécurisation des bidonvilles et leur assainissement, la mise en place de solutions adaptées pour l’insertion des familles à travers le droit commun et ceci avant toute expulsion, pour toutes les familles et sur tout le territoire. Le suivi de ces politiques devrait être organisé dans le cadre d’un dialogue permanent entre les pouvoirs locaux (communes, collectivités territoriales), les autorités régionales et nationales et les acteurs publics et associatifs actifs dans les bidonvilles.

Paris, le 8 avril 2016.

Téléchargez le communiqué.

Téléchargez le recensement des évacuations forcées de lieux de vie occupés par des Roms (ou des personnes désignées comme telles) en France.

[1] CommHR/MB/sf 005-2016, Commissaire aux droits de l’Homme, Strasbourg, le 26 janvier 2016.

Le droit à l’avortement, un combat toujours d’actualité ! 7 avril 2016

Source: Le droit à l’avortement, un combat toujours d’actualité !

Communiqué LDH

En Pologne, le nouveau projet de loi pour interdire le droit à l’avortement des femmes polonaises inquiète aujourd’hui tous les citoyens et citoyennes européen-ne-s, défenseurs des droits et des libertés.

Le droit à l’avortement est une liberté fondamentale qui fait partie du droit à la santé sexuelle et reproductive, inscrit dans les textes internationaux. L’accès à l’avortement est un droit des femmes à disposer de leur corps et à choisir. Refuser ce droit aux femmes polonaises, c’est nier un problème de santé publique. C’est également refuser l’égalité des sexes, l’émancipation et l’autonomisation des femmes, facteurs du progrès de la société polonaise tout entière.

Déjà identifiée comme un pays où le droit à l’avortement était restreint, la Pologne connaît une dérive autoritaire suite à l’arrivée au pouvoir du président Andrzej Duda et de son nouveau gouvernement, en octobre 2015. Le nouveau projet de loi supprime le droit à l’avortement même en cas de viol et le « meurtre fœtal » entre dans le Code pénal.

La Ligue des droits de l’Homme est aux côtés de toutes celles et tous ceux qui, en Pologne, se mobilisent pour la sauvegarde de ce droit.

Avec de nombreuses autres organisations, elle appelle à se mobiliser dimanche 10 avril, à 14 heures, à Paris, devant l’ambassade de Pologne (1, rue de Talleyrand – M° Invalides), pour que cette liberté fondamentale soit reconnue et respectée.

Paris, le 7 avril 2016

Téléchargez le communiqué

Avec le Secrets des affaires, plus de « Panama Papers »? 7 avril 2016

Source: Avec le Secrets des affaires, plus de « Panama Papers »?

Mossack Fonseca, le cabinet d’avocats panaméen au centre du scandale et dont proviennent les Panama Papers, a répondu aux requêtes des journalistes en concluant avec une mise en garde explicite :

« Il semble que vous ayez eu accès de façon non autorisée à des documents et des informations appartenant à notre entreprise et les ayez présentés et interprétés hors de leur contexte. Nous ne doutons pas que vous sachiez parfaitement qu’utiliser des informations ou de la documentation obtenus illégalement est un crime, et nous n’hésiterons pas à utiliser tous les recours pénaux et civils disponibles. » (1)

Le projet de Directive UE sur la « protection des secrets d’affaires », sur lequel le Parlement Européen se prononcera en séance plénière à Strasbourg le 14 avril prochain, se propose justement de donner à de telles entreprises des moyens juridiques supplémentaires pour poursuivre des journalistes ou des entreprises de presse publiant sans leur consentement des documents et des informations internes.

Ce texte crée un droit au secret pour les entreprises qui est excessif : il menace directement le travail des journalistes et de leurs sources, les lanceurs d’alerte, les syndicalistes, la liberté d’expression des salariés et nos droits d’accéder à des informations d’intérêt public (par exemple sur les médicaments, les pesticides, les émissions des véhicules, etc.).

Une coalition européenne d’associations, de syndicats, de journalistes, de lanceurs d’alerte et de scientifiques (liste à la fin du Communiqué) demande aux membres du Parlement Européen de rejeter ce texte et de demander à la Commission Européenne d’en proposer une version conforme avec les exigences de transparence. Une pétition européenne a également été lancée et compte plus de 72.000 signatures après seulement quelques jours.

La définition du secret des affaires prévue par la directive est tellement large que presque toutes les informations internes d’une société peuvent y correspondre. Cela mettra en danger toute personne qui révèle ces informations sans le consentement de l’entreprise.

Pour Patrick Kamenka, membre du comité directeur de la Fédération Européenne des Journalistes « les citoyens, les journalistes ou encore les scientifiques ont parfois besoin d’avoir accès à ces informations et de les publier dans l’intérêt général. Ils risqueraient alors, comme Antoine Deltour et Edouard Perrin dans l’affaire LuxLeaks, des poursuites judiciaires pouvant se conclure par des peines de prison et des amendes de plusieurs centaines de milliers d’euros. C’est une manière très efficace d’empêcher les gens de dénoncer des cas de mauvaise conduite des entreprises. Quel rédacteur en chef peut se permettre de risquer la banqueroute de son journal? »

Et ce n’est pas tout. Si la directive est approuvée au niveau européen, les États membres pourront encore aller plus loin quand ils l’adapteront à leurs droits nationaux, et on peut compter sur les multinationales pour les pousser en ce sens.

Pour Martin Pigeon, de Corporate Europe Observatory, « cette bataille ne sera pas facile : les multinationales mènent un lobbying acharné depuis des années pour obtenir cette directive et ont lourdement influencé la rédaction du texte, mais le grand public n’en sait presque rien. Il n’est aujourd’hui malheureusement plus possible, politiquement, d’amender le texte. Nous devons donc demander aujourd’hui aux députés européens de le rejeter en bloc, mais sans mobilisation des citoyens nous n’arriverons à rien. »
Pour Françoise Dumont, présidente de la Ligue des Droits de l’Homme, « le président Hollande vient de remercier les lanceurs d’alerte et la presse pour leur travail sur les Panama Papers et les rentrées fiscales qu’elles vont permettre. Pourrait-il soutenir publiquement Antoine Deltour (Luxleaks) et exiger que ce texte dangereux pour les lanceurs d’alerte et la presse soit retiré? »

Bruxelles, le 5 avril 2016

(1) http://www.irishtimes.com/business/retail-and-services/panama-papers-mossack-fonseca-responds-to-leak-1.2597622
(2) Cette directive est officiellement appelée « Directive sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites ».
(3) Voir http://corporateeurope.org/power-lobbies/2016/03/trade-secrets-protection
(4) Voir https://act.wemove.eu/campaigns/les-lanceurs-d-alerte-en-danger

Liste des membres de la coalition européenne

Anticor
ATTAC Spain
ATTAC France
Association Européenne pour la Défense des droits de l’Homme
Centre national de coopération au développement, CNCD-11.11.11
Correctiv.org, Germany
BUKO Pharma-Kampagne
CCFD-Terre Solidaire
CGT Cadres, Ingénieurs, Techniciens (UGICT-CGT)
Collectif Europe et Médicament
Collectif de journalistes “Informer n’est pas un délit”
Comité de soutien à Antoine Deltour
Commons Network
conseil d’urgence citoyenne
Corporate Europe Observatory
Courage Foundation
EcoNexus
European Network of Scientists for Social and Environmental Responsibility (ENSSER)
Fédération Syndicale Unitaire (FSU)
Fondation Sciences Citoyennes
Force Ouvrière-Cadres
Genewatch
GMWatch
Health and Trade Network
Inf’OGM
Institut Veblen
International Society of Drug Bulletins
Les économistes atterrés
Ligue des Droits de l’Homme
Observatoire Citoyen pour la Transparence Financière Internationale (OCTFI)
OGM Dangers
Peuples Solidaires-ActionAid France
Nordic Cochrane Centre
Pesticides Action Network Europe (PAN-Europe)
Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires
Public Concern At Work
Solidaires
Syndicat des Avocats de France (SAF)
Syndicat National des Chercheurs Scientifiques (SNCS – FSU)
Syndicat National des Journalistes (SNJ)
Syndicat National des Journalistes CGT (SNJ-CGT)
Tax Justice Network
Transparency International France
WeMove.eu
Whistleblower-Netzwerk e.V., Germany
Xnet

Télécharger le communiqué.

 

Réforme du Code de procédure pénale : sortir de la surenchère sécuritaire 7 avril 2016

Source: Réforme du Code de procédure pénale : sortir de la surenchère sécuritaire

Le Sénat doit voter, ce mardi 5 avril, le projet de loi dit de « lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale ».

Ce texte a été contesté par différentes institutions indépendantes et qualifiées de notre pays. La Commission nationale consultative des droits de l’Homme, la Conférence des premiers présidents de cours d’appel et même le Conseil d’Etat ont pu dire que plusieurs propositions du projet sont de nature à entraîner des atteintes excessives à la liberté individuelleSourd à ces interpellations, le gouvernement a choisi la procédure accélérée pour l’examen du texte.

Cette loi donnerait au ministère de l’Intérieur et à la police des pouvoirs directement inspirés de l’état d’urgence : retenue administrative de quatre heures avec possibilité de consulter l’ordinateur de la personne, d’accéder à ses communications, de capter et d’enregistrer toutes ses données informatiques… Le projet introduit également une forme d’irresponsabilité pénale des forces de l’ordre, fondée non plus sur une stricte légitime défense mais sur la notion plus floue d’état de nécessité. Enfin, il développerait encore les moyens d’une surveillance massive des citoyennes et des citoyens.

Plus largement, le texte s’inscrit dans la continuité d’un ensemble de textes législatifs qui ont renforcé les pouvoirs de police administrative ainsi que les règles de répression. Dans ce cadre, il poursuit une logique de transfert des compétences et pouvoirs du juge judiciaire vers le parquet et l’autorité administrative qui dépendent plus directement du pouvoir exécutif.

La Ligue des droits de l’Homme constate que les lois comportant des dérives sécuritaires qui s’empilent depuis trente ans n’ont pas fait la preuve de leur efficacité, et refuse une société du contrôle généralisé glissant du principe de la présomption d’innocence à celui de la culpabilité potentielle. Ces dérives renforcent les discours populistes remettant en cause les principes guidant l’exercice des droits, et mettent en place des outils de contrôle de masse et de limitation des libertés particulièrement dangereux.

La LDH réaffirme la nécessité de maintenir le principe de la séparation des pouvoirs – exécutif, législatif, judiciaire –, fondement de la démocratie. Elle affirme qu’il est possible et nécessaire d’agir face au terrorisme et à la criminalité en respectant les libertés et en redonnant toute sa place à la justice.

La LDH demande donc aux parlementaires de rejeter ce projet de loi.

Paris, le 5 avril 2016

Téléchargez le communiqué

Lettre ouverte sur la politique de la France menée à l’égard de la Chine 7 avril 2016

Source: Lettre ouverte sur la politique de la France menée à l’égard de la Chine

Paris, le 1er avril 2016

Monsieur le Ministre,

À l’occasion de votre nouvelle prise de fonction et sachant l’importance que vous accordez au respect des droits de l’Homme, aussi bien comme magistrat élu de Nantes que comme ministre, nous tenons à vous exprimer les inquiétudes que suscite en nous la politique menée depuis des années à l’égard de la Chine.

Le 22 octobre 2013, la Ligue des droits de l’Homme a demandé à votre prédécesseur que le gouvernement français ne soutienne pas la candidature de la Chine au Conseil des Nations unies pour les droits de l’Homme « compte tenu des violations répétées et continues que le gouvernement de ce pays commet au fil des années ». La puissance économique et démographique ne suffit pas pour donner droit à arbitrer sur les droits de l’Homme. La Chine a pourtant été élue.

Nous constatons que les recommandations adressées à la Chine lors de l’Examen périodique universel, – y compris celles de la France – ne sont suivies d’aucun effet. Les pays qui les ont formulées semblent s’en contenter, comme si l’essentiel était non pas le résultat à atteindre mais la parole à prononcer. Les autorités chinoises ne peuvent que se réjouir des faiblesses exposées par leurs interlocuteurs et se sentent encouragées à ne faire aucun cas de leurs observations.

Le 23 décembre 2014, la Ligue des droits de l’Homme a adressé une lettre au président de la République à l’occasion du cinquantenaire des relations diplomatiques franco-chinoises. Elle s’y interrogeait sur les fondements et la qualité des liens noués dans le cadre du « partenariat stratégique global » décidé en 2004, au regard des espérances formulées par le général de Gaulle en 1964. Cette année du cinquantenaire fut en effet marquée par une intensification de la répression à l’encontre des militants des droits civiques, défenseurs de valeurs identiques aux nôtres et dont on ne peut que se sentir solidaire.

Cette répression, dont la lettre donnait de nombreux exemples, s’est depuis amplifiée. Elle touche les cybernautes, la presse – nationale et étrangère –, les avocats, les universitaires et les organisations non gouvernementales. Elle accompagne une concentration institutionnelle des pouvoirs sans précédent dans les mains du chef de l’Etat, chef du Parti, chef des armées et président de nombreux comités ad hoc constitués au sein du parti pour asseoir son autorité. La presse nationale, a-t-il récemment affirmé, doit être la voix du parti et ce dernier prend ouvertement la place de l’Etat. Cette évolution est dangereuse.

Elle s’exprime aussi à l’extérieur et la France ne peut y rester indifférente. Les tensions militaires s’accroissent dans le Pacifique occidental et en Asie du Sud-Est ; elles se traduisent par une course régionale aux armements qui devrait inquiéter les grandes puissances, l’Europe et les Nations unies. À tout le moins, la France pourrait s’abstenir d’y participer en respectant l’embargo sur les ventes d’armes décidé après le massacre du mouvement démocratique en 1989. Or une étude récente affirme qu’elle était le deuxième fournisseur d’armes de la Chine dans la période 2011-2015. Il nous semble préoccupant de substituer le commerce des armes à une politique de paix et de défense des valeurs universelles qui recueillerait l’adhésion enthousiaste du courant démocrate chinois.

Le gouvernement chinois ne trouve qu’avantage dans la complaisance des capitales occidentales qui font tout pour éviter qu’il perde la face et refusent voir ou de tenir compte de son expansion hégémonique. L’Europe, première puissance économique mondiale, dont la Chine a besoin pour son progrès industriel et technique, n’a pas plus à redouter de chantage économique que les Etats-Unis. Elle s’est exprimée pourtant ces dernières années lors de dialogues de routine sur les droits de l’Homme avec une discrétion et un manque de fermeté qui ne sont pas à son honneur.

Nous souhaitons que votre gouvernement se prononce avec clarté et conviction quand sont violés en Chine ces droits de l’Homme qui font partie de notre identité nationale. Nous souhaitons aussi qu’il use de son influence pour que l’Europe s’exprime avec la même netteté et sans craindre de rétorsions économiques, lesquelles ne nuiraient qu’à la Chine.

Plus précisément nous attendons de votre ministère,

1) dans son action nationale :

  • qu’il place les relations franco-chinoises dans un cadre purement interétatique et s’abstienne de parler constamment d’amitié avec un régime qui rejette ouvertement les fondements de notre vie sociale ;
  • qu’il réintègre les droits de l’Homme dans la liste des problèmes abordés dans le « dialogue de haut niveau sur les échanges humains » initié par votre prédécesseur ;
  • qu’il tienne à jour une liste des prisonniers politiques ou des prisonniers de conscience et interroge à leur sujet les autorités chinoises lors des discussions renouvelées sur les droits de l’Homme ;
  • qu’il demande leur libération sur la base des engagements pris au titre de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, du Pacte pour les droits civiques et politiques et de la Constitution chinoise ;
  • qu’il tire des conséquences concrètes des acceptations ou des refus de la partie chinoise, faute de quoi ces discussions n’auraient aucun intérêt ;
  • qu’il respecte l’embargo sur les livraisons d’armes tant que le régime chinois n’aura pas reconnu ses responsabilités dans la sanglante répression du mouvement démocratique de 1989 et tant que ne seront pas retombées les menaces liées à la tension militaire dans la mer de Chine méridionale ;

2) dans son action extérieure :

  • qu’il redonne vigueur aux discussions sur les droits de l’Homme au niveau européen en favorisant des prises de position solidaires dans le dialogue avec la Chine, notamment dans une action concertée avec la République fédérale d’Allemagne ;
  • qu’il redonne toute son importance au Conseil des droits de l’Homme de l’ONU et exige de la Chine qu’elle réponde de façon concrète et précise aux questions posées lors de l’Examen périodique universel ;
  • qu’il exige, sous peine de nullité de la consultation, que des ONG authentiques chinoises aient la possibilité de présenter leurs observations au Conseil des droits de l’Homme, comme le prévoit la procédure de l’EPU ;
  • qu’il lutte pour le respect de l’embargo européen sur les livraisons d’armes à la Chine, tant que la direction chinoise continuera de nier le massacre de 1989 et tant que la course aux armements se poursuivra en Asie orientale ;
  • qu’il veille au respect des engagements pris par la Chine lors de la COP 21 en matière de réduction des gaz à effet de serre, alors même que ce pays prévoit d’accroître sa consommation de charbon dans les années prochaines.

Vous comprendrez que je rende publique cette lettre.

Je vous prie d’agréer, monsieur le Ministre, l’expression de ma haute considération.

Françoise Dumont
Présidente de la LDH