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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives de l'auteur : psenegas

Le 3 mail 2020 – Tribune collective “Ouvrir le chantier de la lutte contre le racisme au sein de la police et la gendarmerie”, publiée dans Le Parisien 8 mai 2020

Tribune collective, signée par la LDH

Dans une tribune au Parisien – Aujourd’hui en France, plusieurs associations, dont la LDH, personnalités et partis politiques interpellent Edouard Philippe sur l’existence d’un racisme au sein des forces de l’ordre qui ne se traitera pas en le résumant à une succession de faits individuels isolés.

Depuis le début du confinement, ont été filmés plusieurs cas de violences verbales, physiques ou symboliques exercées par des membres des forces de l’ordre à l’endroit de personnes d’origine immigrée habitant dans les quartiers populaires. Outre qu’ils sont particulièrement irresponsables dans une période où les circonstances de nos vies sont sources de stress et de tensions, ces faits sont inadmissibles car ils contreviennent à un maintien de l’ordre respectueux des droits et de la dignité des citoyens. (…)

Ce que nous vous demandons, c’est que soit enfin ouvert le chantier de la lutte contre le racisme au sein de la police et la gendarmerie nationales (…).

Depuis le début du confinement, ont été filmés plusieurs cas de violences verbales, physiques ou symboliques exercées par des membres des forces de l’ordre à l’endroit de personnes d’origine immigrée habitant dans les quartiers populaires. Pour une police sans racisme, la LDH signe, et vous ?

Signer la pétition pour une police sans racisme !

Paris, le 3 mai 2020

Lire la tribune dans Le Parisien

Source: Le 3 mail 2020 – Tribune collective “Ouvrir le chantier de la lutte contre le racisme au sein de la police et la gendarmerie”, publiée dans Le Parisien

Retour à l’école : n’oublions pas les enfants les plus vulnérables ! 8 mai 2020

Communiqué commun et lettre ouverte commune à l’attention du ministre de l’Education nationale et de la jeunesse pour demander à ce que les mesures de renforcement de la continuité éducative soient étayées et élargies à tous les enfants en situation de précarité

A partir du 11 mai prochain, certains élèves reprendront le chemin de l’école. Pour ceux qui ont été privés de continuité scolaire durant le confinement, faute d’accès au numérique ou d’accompagnement suffisant, les problématiques sont multiples. A l’urgence sanitaire est venue s’ajouter, pour de nombreuses familles, une urgence éducative.

La récente volonté exprimée par le gouvernement de concentrer les efforts pour lutter contre les inégalités et favoriser la continuité éducative des enfants les plus vulnérables constitue un premier pas salué par nos organisations. Cependant, alors que ces mesures sont destinées aux élèves des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des « cités éducatives », nos organisations constatent qu’au-delà des territoires ciblés, les enfants et les jeunes en situation de grande précarité vivant en bidonvilles, squats, hôtels sociaux, hébergement d’urgence et d’insertion, aires d’accueil de gens du voyage, structures de la protection de l’enfance, sont exposés à des difficultés et des risques accrus de décrochage alors même que leur relation à l’école est essentielle.

Dans leur lettre adressée au gouvernement, nos associations dressent un état des lieux des principaux obstacles rencontrés par les enfants et les familles qu’elles accompagnent : entre 70 % et 80 % d’entre elles ne disposent ni d’un ordinateur, ni d’une tablette, ce qui rend quasiment impossible l’accès à l’enseignement à distance mis en place actuellement, qui repose entièrement sur la communication numérique. L’accès à l’électricité, à une connexion internet ou à un espace personnel est lui aussi compromis. Les adultes, souvent allophones et dépassés par les programmes scolaires qu’ils maîtrisent mal, sont souvent désarmés et peinent à accompagner et aider efficacement leurs enfants dans leur scolarité et l’appui aux devoirs. De nombreux parents rencontrent également des difficultés dans l’utilisation du numérique. Malheureusement pour beaucoup de ces familles, et ce malgré l’engagement des professeurs et associations, le maintien du lien se révèle très difficile, voire impossible.

Fortes de ces constats, nos associations demandent des mesures concrètes pour une meilleure prise en compte de tous les enfants et jeunes et de leurs besoins afin que le droit à l’éducation soit effectif pour toutes et tous. Parmi elles :

  • s’assurer que les mesures, destinées aux quartiers prioritaires, à la protection de l’enfance et à certains centres d’hébergement, bénéficient effectivement à l’ensemble des enfants et jeunes en grande précarité (bidonvilles, aires d’accueil de gens du voyage, squats, accueils sociaux, foyers, etc.), afin que tous puissent accéder aux outils informatiques ;
  • ils doivent aussi bénéficier de l’accompagnement scolaire prévu pendant l’été 2020 et pendant l’année 2020-2021 pour rattraper le retard, tout en s’assurant que ces mesures ne soient vécues ni comme une punition, ni comme un facteur de stigmatisation ;
  • au vu de l’impact différentiel du confinement sur la scolarité des enfants en fonction de leur milieu social et de leurs conditions de vie, il est impératif que la période actuelle soit uniquement considérée comme une période de consolidation des acquis, et que celle-ci ne soit pas considérée comme ayant été « suivie » par les enfants et les jeunes ;
  • l’investissement de l’Etat dans l’égalité numérique doit permettre à tous les enfants et jeunes d’être équipés et avoir accès à une connexion, et à tous les enseignants d’être formés à l’accompagnement des élèves à distance ;
  • développée cette année par le gouvernement dans les squats et bidonvilles, la médiation scolaire doit être renforcée dans la durée et élargie à tous les enfants et jeunes qui en ont besoin, quel que soit leur lieu de vie. En effet, l’attention portée aux élèves les plus fragiles à l’occasion de cette période de crise ne doit pas faire oublier les enfants et jeunes en situation de précarité les plus éloignés de l’école, qui ne sont pas encore élèves.

Aujourd’hui plus que jamais, le défi du respect du droit à l’éducation pour chaque enfant et chaque jeune revêt une importance considérable pour tous les acteurs de l’éducation et du secteur social. Ensemble, nous appelons le gouvernement à s’engager pour que le droit à l’éducation soit effectif pour tous les enfants en métropole et en Outre-mer et pour faire de la devise républicaine une réalité pour tous et toutes.

Télécharger la lettre ouverte

Signataires :
Sébastien Lyon, directeur général d’Unicef France
Florent Guéguen, directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité
Clémentine Sinquin, déléguée générale du CNDH Romeurope
Stéphane Lévêque, directeur de la Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes
Anne-Marie Harster, présidente de Solidarité Laïque
Malik Salemkour, président de la Ligue des droits de l’Homme

Paris, le 4 mai 2020




Source: Retour à l’école : n’oublions pas les enfants les plus vulnérables !

Le Conseil d’État confirme que l’urgence sanitaire ne peut pas justifier l’arrêt de la demande d’asile en IDF 8 mai 2020

Communiqué commun : Acat, Ardhis, Droits d’urgence, Gisti, Kâlî, LDH, Utopia 56

Plutôt que d’ouvrir un bureau en Île-de-France pour enregistrer les demandes d’asile comme le tribunal administratif de Paris le lui a ordonné le 21 avril, le ministre de l’Intérieur s’est entêté et a fait appel de cette ordonnance devant le Conseil d’État.

La plus haute juridiction administrative a donc été amenée à se prononcer aujourd’hui 30 avril 2020 sur une situation inédite : l’État peut-il décider, en dehors de tout cadre légal, de s’affranchir de ses obligations en matière d’accès à la demande d’asile dans le contexte de l’état d’urgence sanitaire ? La réponse est sans appel : NON

L’argument dont l’administration use et abuse habituellement n’a pas fonctionné aujourd’hui : elle ne peut prétendre ne pas avoir “les moyens” de remplir ses obligations ce qui la dispenserait, selon elle, de respecter les droits fondamentaux.
Le Conseil d’État a donné raison aux sept associations et au Défenseur des droits. Il est ordonné que les Guda réouvre dans un délai de 5 jours, en priorité pour les personnes plus vulnérables.

Nos associations seront dès lors attentives au respect scrupuleux de cette injonction par l’État et notamment au fait que toute personne arrivant en France et sollicitant l’asile est une personne vulnérable ! Actuellement, cette notion ne peut pas servir aux préfectures pour opérer un tri entre les personnes.

Le droit d’asile est un droit fondamental et l’État ne peut pas s’exonérer de ses obligations quand bon lui semble, même en période d’épidémie.

En espérant que cette fois-ci le message soit passé !

Paris le 30 avril 2020

Signataires : Acat, Ardhis, Droits d’urgence, Gisti, Kâlî, LDH, Utopia 56

Télécharger le communiqué au format PDF

Source: Le Conseil d’État confirme que l’urgence sanitaire ne peut pas justifier l’arrêt de la demande d’asile en IDF

Le futur doit être différent du passé 24 avril 2020

Appel du FCE, dont la LDH est membre

Dix leçons tirées dans la crise, pour être largement discutées

L’humanité traverse une crise sans précédent, avec beaucoup de souffrance, de sacrifices, de douleurs et de changement drastique pour notre vie quotidienne. La crise nous apporte de nombreuses leçons pour le future. Le Forum civique européen (FCE) vous en propose dix. 

Leçon une : notre propre sécurité dépend de la sécurité des autres.
Nous avons besoin d’une protection sociale et d’un système de santé universel pour tous et toutes, partout dans le monde.

Leçon deux : nous sommes toutes et tous vulnérables et nos destinées sont liées. Solidarité, égalité, droits, attention doit être au fondement des relations internationales comme du vécu de chaque jour.

Leçon trois : le bien commun existe.
Les institutions publiques doivent servir, protéger et mettre en œuvre le bien commun, pas les intérêts particuliers. 

Leçon quatre : la démocratie est l’antivirus indispensable dont nous avons tous besoin.
La conscience qu’on les citoyens, la participation citoyenne, une information digne de confiance, la recherche et l’éducation publiques, des institutions transparentes contribuer à assurer le bien public.

Leçon cinq : le marché mondialisé a échoué.
La production doit être relocalisée, l’économie circulaire développée, un revenu universel de base pour tous assuré.

Leçon six : nous sommes les dépositaires de la terre, pas ses propriétaires.
Avec notre confinement la nature récupère des dommages que nous faisons. Nous devons retourner au monde avec une responsabilité de justice écologique.

Leçon sept : les vrais héros sont les travailleurs essentiels, avec les femmes au premier rang. Leur contribution doit être reconnue dans la hiérarchie sociale, les invisibles doivent accéder pleinement à tous leurs droits.

Leçon huit : le temps doit ralentir.
Le confinement nous a obligés à donner toute leur place aux liens sociaux, à la patience, à la compassion : nous devons garder cela à long terme.

Leçon neuf : nous avons besoin des sécurités humaines, sociales, écologiques.
Nous nous engageons pour que la remise en état et la transition soient justes, dans notre pays, en Europe et partout dans le monde.

Leçon dix : le futur doit être différent d’hier Nous devons apprendre des Leçons et agir ensemble.

Le FCE est un réseau de plus de 100 associations de 28 pays en Europe, dont la LDH. Nous menons la #MEGA Campaign (Make Europe Great for All – une Europe pour tou-te-s), informons sur la situation dans l’espace civique en Europe avec Civic Space Watch. Nous œuvrons à ce que l’Article 11 du traité de l’Union européenne se traduise par une démocratie participative et un réel dialogue entre les institutions et les représentants des associations.

 

 

Source: Le futur doit être différent du passé

20 organisations interpellent le Premier ministre pour défendre la liberté d’expression des associations dans les centres de rétention 24 avril 2020

Lettre ouverte signée par la LDH

Monsieur le Premier ministre,

La politique migratoire que vous menez a-t-elle besoin de s’entourer de silence ? N’est-il pas essentiel qu’elle soit au contraire soumise à la transparence, à l’examen et à l’interpellation citoyenne et au regard critique des organisations de la société civile ?

La récente ouverture par l’administration du marché de l’accompagnement juridique des personnes étrangères enfermées dans les centres de rétention administrative semble pourtant marquée par cette volonté de silence.

Alors même qu’il s’agit d’un droit fondamental garanti par la Constitution et la Convention européenne des droits de l’homme, le ministère de l’intérieur a supprimé, dans le nouveau marché, les clauses qui garantissaient explicitement la liberté d’expression et de témoignage sur les situations vécues par les personnes enfermées. Il a durci les clauses de confidentialité et de discrétion. N’est ainsi plus garantie la possibilité de rendre publiques, avec l’accord de la personne retenue et dans le respect de sa vie privée, les informations sur une situation individuelle. Alors que dans le même temps le ministère sanctionne financièrement très lourdement la diffusion de données à caractère personnel ! Enfin, il se donne la possibilité de retirer l’agrément sans motif et sans délai à toute personne salariée d’une association intervenante.

Or, les personnes qui sont enfermées en rétention le sont sur décision administrative — jusqu’à 90 jours, dans la promiscuité et des tensions connues — et il s’agit d’hommes, de femmes, de familles, d’enfants, de personnes malades, et souvent vulnérables. Elles sont enfermées dans des lieux oppressants, dont l’existence même est méconnue par la plupart, difficiles d’accès, marqués par un contexte de tensions extrêmes.

Il est essentiel de faire entendre la parole de ces personnes fragilisées, et de témoigner de ce qu’elles vivent, de rendre compte des procédures administratives très complexes qui les concernent, des conditions de restriction de liberté qui les frappent et de l’expulsion qui les attend, mais aussi des procédures mises en œuvre pour faire valoir leurs droits et parfois des raisons de leur remise en liberté.

Réduire au silence les associations qui interviennent auprès de ces personnes serait une atteinte grave à leurs droits et à la liberté d’expression et de témoignage des associations alors même que ce droit est garanti par la Charte d’engagements réciproques entre l’État, le mouvement associatif et les collectivités territoriales signée par un de vos prédécesseurs le 14 février 2014 qui indique en son article II : « L’État et les collectivités territoriales reconnaissent aux associations une fonction d’interpellation indispensable au fonctionnement de la démocratie. »

La liberté d’expression et d’interpellation est un bloc indivisible. Interdire aujourd’hui de témoigner de ce que vivent les personnes étrangères en centre de rétention, ce serait comme interdire demain de témoigner de ce que vivent les personnes en prison, les malades dans les hôpitaux, les personnes à la rue. Cette liberté est un pilier des libertés civiques, garant de la transparence de la vie démocratique, de la responsabilité et de la redevabilité des pouvoirs publics et des autorités administratives auprès de l’opinion. Dans le contexte épidémique actuel, nos organisations se mobilisent. Elles restent convaincues que le regard extérieur des associations est essentiel pour la protection de la santé publique et le respect des droits de tous.

Monsieur le Premier ministre, nous vous demandons d’exercer votre autorité pour que soit garantie la liberté d’expression et de témoignage des associations intervenantes dans les centres de rétention administrative, comme doit être préservée celle de l’ensemble des associations et organisations de la société civile chargées d’une mission d’intérêt général.

Le 23 avril 2020

Signataires : Acat ; ADDE ; Amnesty International France ; Anafé ; ATD Quart Monde ; La Cimade ; CCFD – Terre Solidaire ; Comede ; Emmaüs France ; Fédération des Acteurs de la Solidarité ; Fasti ; Gisti; LDH ; MDM ; Mrap ; Observatoire citoyen du centre de rétention de Palaiseau ; Secours islamique France ; Syndicat des avocats de France ; Syndicat magistrature ; Uniopss

Source: 20 organisations interpellent le Premier ministre pour défendre la liberté d’expression des associations dans les centres de rétention

Coup bas contre les droits au recours des étrangers 24 avril 2020

Communiqué LDH

Par ordonnance du 15 avril, le gouvernement vient de ramener à un jour après la fin de l’état d’urgence sanitaire le point de départ des délais de recours à l’encontre des obligations de quitter le territoire français (OQTF), quelles que soient leurs modalités, les arrêtés de transfert Dublin et les décisions de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), alors que dans une précédente ordonnance ce point de départ était prévu d’un mois.

En temps ordinaire, les délais de recours (quarante-huit heures, quinze jours ou un mois selon les cas) sont déjà extrêmement brefs et difficiles à mettre en œuvre, et sont loin de permettre à toutes les personnes concernées de faire valoir leurs droits. Cette nouvelle ordonnance restrictive qui s’imposerait à la sortie de l’état d’urgence sanitaire, sans tenir compte des circonstances exceptionnelles, est une négation de l’accès réel à la justice et présente un caractère discriminatoire totalement infondé.

En effet, si des incertitudes persistent sur la date et les conditions de cette sortie, une chose paraît certaine, le Premier ministre l’a d’ailleurs affirmé, il faudra un temps long pour le « retour à la normale ».

Les étrangers les plus précaires, qui font déjà partie des habitants de ce pays qui souffrent le plus actuellement des difficultés d’accès aux ressources vitales, ne pourront certainement pas avoir accès normalement du jour au lendemain aux conseils et aides juridiques indispensables. Nul ne sait comment les permanences d’accueil associatives qui jouent un rôle central pour le droit des étrangers, comme les cabinets d’avocats, pourront reprendre leurs activités, particulièrement celles tenues dans des locaux publics, et faire face à tous les dossiers en retard accumulés.

A l’heure où de nombreuses voix s’élèvent pour dire la nécessité de remettre en débat la question de la régularisation des étrangers vivant en France, cette décision visant à faire obstacle à l’accès réel à la justice est un signal particulièrement négatif. La Ligue des droits de l’Homme (LDH) en demande l’annulation.

Paris, le 22 avril 2020

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Source: Coup bas contre les droits au recours des étrangers

Prud’hommes : les salariés doivent pouvoir défendre leurs droits 24 avril 2020

Communiqué LDH

De très nombreux conseils des prud’hommes sont actuellement fermés sur le territoire. L’activité juridictionnelle a totalement cessé depuis le début de l’état d’urgence sanitaire, y compris en matière de référé, empêchant les salariés de défendre leurs droits.

La cessation de la justice prud’homale n’est pourtant pas imposée par les ordonnances issues de l’état d’urgence sanitaire. L’ordonnance du 25 mars 2020 prévoit au contraire la possibilité de poursuivre l’activité juridictionnelle, en aménageant son fonctionnement, en permettant de pallier l’empêchement d’un ou plusieurs conseillers prud’homaux, en restreignant éventuellement leur nombre, en organisant les débats par tous moyens de communication électroniques ou par visioconférence.

La fermeture de conseils des prud’hommes, parmi les plus importants en termes de volume d’affaires traitées, porte une atteinte grave et illégale au droit de tout citoyen d’accéder au service public de la justice prud’homale et au principe d’égal accès à la justice dès lors que tous les salariés de France ne se retrouvent pas dans la même situation.

Le comportement abusif d’employeurs n’est donc plus sanctionné et certains salariés lésés se retrouvent dans l’impossibilité d’accéder aux moyens financiers nécessaires à leur subsistance en particulier en situation de confinement, faute de pouvoir faire respecter le droit du travail.

C’est la responsabilité du ministère de la Justice et des présidents des cours d’appel de rétablir sans délais l’accès à la justice en leur en donnant les moyens.

Paris, le 21 avril 2020

Source: Prud’hommes : les salariés doivent pouvoir défendre leurs droits

Réquisition et Covid-19 24 avril 2020

Par la Fondation Abbé Pierre et la Ligue des droits de l’Homme

L’épidémie de Covid-19 et la période de confinement soulèvent la question, depuis quinze jours, de la réquisition pour protéger les personnes sans-abri et mal-logées.

Cette note donne un rapide aperçu des pouvoirs de réquisitions qui existent, au regard de l’état d’urgence, avec illustration de la jurisprudence. Cela ne répond pas à toutes les questions, voire en soulève, mais éclairera un peu le sujet. 

Toute sorte de locaux peuvent être réquisitionnés. La réquisition ne garantit pas en soi des réponses satisfaisantes en terme de qualité, encore moins de maintenir ces réponses après la période de confinement. 

Il convient donc, au-delà des textes et de l’intention, de rester très vigilant à ce qui est effectivement réquisitionné par la puissance publique, si réquisition il y a.

 

Les autorités publiques peuvent être en droit de réquisitionner des biens ou des personnes lorsque l’intérêt public l’exige. Concernant les biens, il ne s’agit pas d’un transfert de propriété (comme dans la préemption), ni d’une mise à disposition ou une location par le propriétaire, mais d’un usage temporaire décidé unilatéralement par la puissance publique à ses fins (avec indemnisation du propriétaire).

Plusieurs régimes de réquisition concernant le logement et l’hébergement des personnes en difficulté existent, tandis que la loi Covid-19 crée une nouvelle possibilité.

 

1. La réquisition de la loi Covid-19

La loi d’état d’urgence sanitaire du 23 mars 2020[1] permet au Premier ministre de prendre un décret afin de procéder à la réquisition de « tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire », suivant le régime d’indemnisation organisé par le Code de la Défense[2].

L’article 12-1 du décret du 23 mars 2020 prescrivant les mesures nécessaires pour faire face à l’épidémie dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire prévoit la possibilité de réquisitionner des établissements recevant du public (ERP), tels que des hôtels.

Cet article ne vise donc pas les logements (appartements et maisons individuels[3]).

Toutefois, il ne réserve pas, explicitement, le bénéfice de la réquisition au personnel de santé ou aux salariés employés par des entreprises dont le fonctionnement est nécessaire. Il devrait pouvoir servir l’hébergement des personnes sans-abri ou mal-logées.

Lorsqu’une telle mesure est nécessaire pour répondre aux besoins d’hébergement ou d’entreposage résultant de la crise sanitaire, le représentant de l’Etat dans le département est habilité à procéder à la réquisition des établissements (ERP) mentionnés par le règlement          pris en application de l’article R. 123-12 du Code de la construction et de l’habitation, à l’exception de ceux relevant des catégories suivantes : restaurants et débits de boissons ; établissements de cultes ; établissements flottants ; refuges de montagne.

Ce pouvoir spécifique de réquisition ne devrait pas ôter aux préfets et aux maires celui qu’ils tiennent de leurs pouvoirs de police.

 

2. Les pouvoirs de police du préfet et du maire

Au titre de leurs pouvoirs de police respectifs, le préfet (CGCT[4], art. L. 2215-1, 4°[5]) et le maire (CGCT, art. L. 2212-2) peuvent prononcer la réquisition de locaux nécessaires au logement à l’hébergement de personnes sans abri, en cas d’urgence, de trouble à l’ordre public et à titre exceptionnel.

Si le maintien de l’ordre est menacé dans 2 ou plusieurs communes limitrophes, le représentant de l’Etat dans le département peut se substituer aux maires de ces communes (CGCT, art. L. 2215-1, 2°).

Ces deux bases juridiques correspondent à la situation de crise sanitaire actuelle pour protéger les personnes sans-abri et les personnes mal-logées (notamment en habitat indigne).

 a. La réquisition par le préfet (L. 2215-1, 4° CGCT)

La réquisition par le préfet doit être motivée, justifiée par l’urgence et proportionnée.

Le motif de la réquisition : éviter un trouble à l’ordre public, dans l’intérêt général ou pour la protection de l’ordre public. Le trouble doit être réel et non hypothétique[6], manifeste ou probable[7].

La jurisprudence donne quelques illustrations. Elles concernent principalement la réquisition de personnel, mais aussi celle de locaux aux fins d’hébergement.

Par exemple :

  • l’urgence et les risques de graves troubles à la santé publique justifient la réquisition des sages-femmes en grève d’une clinique, en l’absence d’accord sur la mise en œuvre d’un service minimum pendant la période de grève, la santé des patientes et des nouveaux-nés étant en jeu[8],
  • la sécurité publique justifie la réquisition de quatre salariés d’un dépôt pétrolier en grève eu égard au risque d’interruption de l’activité des services de sécurité et de celle des professions de santé faute d’approvisionnement[9],
  • la continuité des soins ambulatoires en période hivernale épidémique justifie, cas d’urgence, de requérir tout médecin dans le but d’assurer le maintien d’un effectif suffisant pour garantir la sécurité des patients et la continuité des soins la nuit et les fins de semaine[10],
  • une résidence va fermer à cause d’une rupture de son contrat de gestion, mais au regard de toutes les personnes qui y vivent et des problèmes posés pour eux par la fermeture brutale de la résidence, le préfet la réquisitionne, puis proroge la réquisition car il n’aurait pas les moyens de reloger les familles si elles étaient évacuées[11].

Une condition d’urgence : la réquisition n’est justifiée que lorsque les intérêts publics sont mis en cause immédiatement ou à brève échéance. L’atteinte à l’ordre public doit donc être prévisible et immédiate.

Le préfet peut donc intervenir pour « prévenir »[12] ou « éviter »[13] une « menace »[14] ou des « risques »[15] de trouble à l’ordre public. La condition d’urgence est satisfaite, a fortiori, si l’atteinte à l’ordre public a déjà produit ses effets. Par exemple :

  • en cas de risque d’expulsion de l’ensemble des occupants d’une résidence, prévisible à la suite de la rupture des contrats d’exploitation de l’immeuble[16],
  • à l’annonce de l’arrivée de neuf groupes de personnes dites “Gens du voyage”, dans 1 023 caravanes, dans un département sans aire de grand passage prévue par le plan départemental d’accueil pour les accueillir, même à titre temporaire, dans des conditions satisfaisantes pour l’ordre public[17].

Une condition de proportionnalité : le préfet ne peut prendre « que les mesures nécessaires, imposées par l’urgence et proportionnées aux nécessités de l’ordre public »[18]. Ces mesures ne doivent pas être disproportionnées au risque en cause.

La réquisition doit enfin être l’ultime moyen à la disposition du préfet. Il ne peut s’y référer qu’après avoir effectué un examen complet des autres moyens dont il dispose[19] : nombre de places d’hébergement et de logements dont il dispose, bâtiments publics adaptés, par exemple.

b. La réquisition par le maire (L. 2212-2 CGCT)

Les conditions de l’intervention du maire et du préfet sont similaires.

Voici ce qu’illustre la jurisprudence.

  • Le pouvoir de réquisition « lui permet, en particulier, de prononcer la réquisition des locaux nécessaires au logement des familles sans abri ; (…) toutefois, ce pouvoir de réquisition ne saurait être exercé par le maire qu’en cas d’urgence et à titre exceptionnel lorsque le défaut de logement de la famille dont il s’agit est de nature à apporter un trouble grave à l’ordre public »[20].
  • Est légale la réquisition de logements au profit de cinq familles habitant un immeuble frappé d’une interdiction d’habiter et dont l’état ne cesse de se dégrader alors que la crise du logement sévissant dans la commune ne permet pas de procurer, par voie d’accord amiable, un abri aux habitants de l’immeuble[21].
  • Le maire peut réquisitionner une partie d’un immeuble pour assurer le logement des personnes évacuées d’un immeuble voisin ayant fait l’objet, trois jours auparavant, d’un arrêté de péril même si ces personnes avaient pu être provisoirement accueillies dans les hôtels de la ville[22].
  • Est légale la réquisition d’un local inoccupé compte tenu de la nécessité urgente à loger une famille avec quatre enfants se trouvant sans aucun abri, sur la voie publique, après avoir été expulsée du logement qu’elle occupait[23].
  • Il faut que la famille se soit trouvée dans l’impossibilité de se procurer un appartement par les procédés de droit commun[24]. En période de confinement, ces procédés sont évidemment entravés, pour louer un logement dans le parc privé et pour accéder au parc social.

Le pouvoir du maire est aussi limité aux cas d’urgence. La condition n’est pas remplie quand la réquisition répond à une situation de mal-logement ou de sans-abrisme qu’il connaissait depuis plusieurs années (voire plusieurs semaines[25]) : il doit résulter d’un événement créateur d’une situation d’urgence[26]. L’événement créateur, en cette période, est le Covid-19, qui justifie de l’urgence, malgré l’état de sans-abrisme ou de mal-logement antérieur.

 

III. La réquisition des logements vacants prévue par le Code de la construction et de l’habitation

Au titre des compétences de l’Etat dans le domaine du logement, le préfet dispose d’un pouvoir de réquisition des locaux vacants, inoccupés ou insuffisamment occupés, en zone tendue ou en cas de crise du logement :

  • La réquisition des locaux vides (L. 641-1 à L. 641-14 du CCH) concernant les zones tendues, au bénéfice des personnes dépourvues de logement, mal-logées ou menacées d’expulsion.
  • La réquisition avec attributaire (L. 642-1 CCH) concernant les communes touchées par une grave crise du logement, au bénéfice de personnes mal-logées ou sans-abri, après avis du maire.

Ces dispositions ne semblent pas parfaitement correspondre à l’urgence résultant du confinement et à sa durée, la procédure pour les mettre en œuvre pouvant s’étendre d’un à trois mois.

Il n’empêche qu’elles sont des outils mobilisables face à la crise du logement qui ne disparaîtra pas avec le Covid-19, et pour gérer l’après confinement, et reloger toutes les personnes qui auront été hébergées durant la période de confinement et celles qui seront restées à la rue, en bidonville, en squat ou en habitat indigne.

Ces deux procédures conservent toute leur pertinence et peuvent être engagées dès à présent. Les services fiscaux disposent de la liste des logements vacants et l’administration peut d’ores et déjà préparer la procédure. Le CGDD estimait à 103 000 le nombre de logements durablement vides et directement habitables en zone tendue.

 

[1]Art. 2 une modification de l’article L. 3131-15 du Code de la santé publique.
[2]Articles L. 2234-1 et suivants et R. 2234-1 et suivants.
[3]Un meublé de tourisme pouvant accueillir plus de quinze personnes est soumis à la réglementation des ERP.
[4]Code général des collectivités territoriales.
[5]En cas d’urgence, lorsque l‘atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l’exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d’entre elles, réquisitionner tout bien ou service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l’usage de ce bien et prescrire toute mesure utile jusqu’à ce que l’atteinte à l’ordre public ait pris fin ou que les conditions de son maintien soient assurées.”
[6]CE, 27 oct. 2010, n°343966, Féd. nationale des industries chimiques CGT et a.
[7]TA Poitiers, 11 oct. 2007, n°0602114, aéroclub de France et a.
[8]CE, 9 déc. 2003, n°262186, Aguillon et a.
[9]TA Nantes, 22 oct. 2010, n° 1007766, M. M. et a.
[10]CAA Douai, 13 nov. 2013, n°12DA00904, préfet de la Seine-Maritime.
[11]TA Montreuil, 5 juin 2014, n°1305002, Cne Saint-Denis.
[12]TA Poitiers, 11 oct. 2007, n°0602114, Aéroclub de France et a.
[13]TA Nantes, 22 oct. 2010, n°1007766, M. M. et a.
[14]CE, 27 oct. 2010, n° 343966, Féd. nationale des industries chimiques CGT et a.
[15]CAA Douai, 13 nov. 2013, n°12DA00904, préfet de la Seine-Maritime : inédit au Recueil Lebon.
[16]TA Montreuil, 5 juin 2014, n°1305002, Cne Saint-Denis.
[17]TA Nice, 3 mars 2015, Ville de Nice c/ préfet des Alpes-Maritimes.
[18]CE, 27 oct. 2010, n°343966, Fédération nationale des industries chimiques CGT et a.
[19]CE, 11 déc. 1991, n°92673, Sté d’HLM Le logement familial du bassin parisien.
[20]CE 7 janv. 1957, Épx de Lagrevol ; CE, 11 déc. 1991, Sté d’HLM “Le logement familial du bassin parisien”, n°192673 ; CE, 29 déc. 1997, préfet du Val-de-Marne, n°172556.
[21]CE, 1er avr. 1960, Dame Rousseau.
[22]CE, 15 févr. 1961, Werquin.
[23]CE, 19 oct. 1963, Godier.
[24]CE, 14 juin 1972, ville de Saint-Germain-en-Laye.
[25]CE, 7 janv. 1957, Épx de Lagrevol.
[26]CE, 15 mars 1961, maire de Bagnolet c/ dames Planchat et Barrat ; CE, 28 avr. 1961, Cne de Cormeilles-en-Parisis ; CE, 7 juill. 1961, ville d’Alger ; CE 29 déc. 1997, préfet du Val-de-Marne.

Source: Réquisition et Covid-19

Déplacement dérogatoire : verbalisation et contestation 24 avril 2020

Qu’est-ce que l’état d’urgence sanitaire (EUS) ?

La loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, insérée dans le code de la santé publique, précise que les pouvoirs spéciaux d’état d’urgence sanitaire peuvent être déclenchés « en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population. » (article L.3131-12 du Code de la santé publique).

En vertu de l’article L.3131-15 du Code de la santé publique, le Premier ministre peut, par décret réglementaire, « aux seules fins de garantir la santé publique », édicter diverses mesures restrictives de liberté, par exemple :

  • restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules dans certains lieux et à certaines heures ;
  • interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ;
  • limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature.

Ces mesures prescrites doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu’elles ne sont plus nécessaires.

 

Quels sont les déplacements possibles ?

L’article 3 du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire prévoit que : « tout déplacement de personne hors de son domicile est interdit à l’exception des déplacements pour les motifs suivants en évitant tout regroupement de personnes :

° Trajets entre le domicile et le ou les lieux d’exercice de l’activité professionnelle et déplacements professionnels insusceptibles d’être différés ;

2° Déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l’activité professionnelle et des achats de première nécessité dans des établissements dont les activités demeurent autorisées par l’article 8 du présent décret ;

3° Déplacements pour motifs de santé à l’exception des consultations et soins pouvant être assurés à distance et, sauf pour les patients atteints d’une affection de longue durée, de ceux qui peuvent être différés ;

4° Déplacements pour motif familial impérieux, pour l’assistance des personnes vulnérables et pour la garde d’enfants ;

5° Déplacements brefs, dans la limite d’une heure quotidienne et dans un rayon maximal d’un kilomètre autour du domicile, liés soit à l’activité physique individuelle des personnes, à l’exclusion de toute pratique sportive collective et de toute proximité avec d’autres personnes, soit à la promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile, soit aux besoins des animaux de compagnie ;

6° Déplacements résultant d’une obligation de présentation aux services de police ou de gendarmerie nationales ou à tout autre service ou professionnel, imposée par l’autorité de police administrative ou l’autorité judiciaire ;

7° Déplacements résultant d’une convocation émanant d’une juridiction administrative ou de l’autorité judiciaire ;

8° Déplacements aux seules fins de participer à des missions d’intérêt général sur demande de l’autorité administrative et dans les conditions qu’elle précise 

».

 

Comment justifier mon déplacement ?

Les personnes souhaitant bénéficier de l’une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d’un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l’une de ces exceptions.

Les attestations de déplacement dérogatoire, qu’il soit professionnel ou à titre personnel, peuvent :

  • être imprimées ;
  • être remplies au format numérique sur smartphone, uniquement pour les déplacements dérogatoires à l’exclusion de l’attestation réservée exclusivement au déplacement professionnel ;
  • être rédigées de façon manuscrite sur papier libre.

L’attestation doit être nominative et à usage unique. Ainsi, selon la foire aux questions du site du ministère de l’Intérieur, la version papier doit être renseignée à l’aide d’un stylo à encre indélébile.

En revanche, il est possible d’indiquer plusieurs motifs sur une même attestation aux fins de limitation des sorties même s’il a pu être constaté en pratique que des verbalisations ont été prises sur ce fondement.

Attention ! Le formalisme de l’attestation n’étant réglementé par aucun texte, son appréciation est laissé à un risque d’arbitraire des forces de l’ordre susceptible d’entraîner une verbalisation injustifiée (voir plus loin : Comment contester ma contravention ?).

 

Quels sont les motifs de verbalisation lors de mon déplacement ?

Seules trois hypothèses de verbalisation sont possibles :

  • le défaut d’attestation  ou, la pratique à démontrer, si vous êtes dans l’impossibilité de prouver que vous êtes bien la personne ayant signé ;
  • le formalisme de l’attestation non respecté (date, heure, éléments de l’état civil et du domicile ainsi que les motifs) ;
  • un déplacement ne figurant pas à la liste exhaustive des exceptions ou considérées comme telles (exemples de cas acceptés bien que non-inscrits sur l’attestation : se rendre à un distributeur pour chercher de l’argent ou aller jeter sa poubelle au bout de la rue relèvent des déplacement “d’achats de première nécessité”, d’après le ministère).

Attention ! La pratique démontre que les forces de l’ordre font preuve d’une grande latitude dans l’appréciation des motifs censés justifier le déplacement ainsi que dans la validité de l’attestation. Aussi la régularité de certaines contraventions pourrait être remise en cause (voir plus loin : Comment contester ma contravention ?).

 

Quels agents peuvent me verbaliser ?

Les agents verbalisateurs sont : la police et la gendarmerie nationales (OPJ, APJ, APJD), la police municipale, les gardes champêtres, les agents de la ville de Paris chargés d’un service de police, les contrôleurs de la préfecture de police exerçant leur fonction dans la spécialité voie publique et les agents de surveillance de Paris.

 

Combien coûte l’amende ?

Aux termes de l’article 3136-1 du Code de la santé publique, la violation des interdictions ou obligations édictées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire est punie d’une amende prévue pour les contraventions de la 4e classe.

Cette contravention fait l’objet de la procédure de l’amende forfaitaire.

Le montant de l’amende forfaitaire est fixé à 135 € pour les contraventions de la 4e classe.

Le montant de l’amende forfaitaire majorée est fixé à 375 € pour les contraventions de la 4e classe.

 

Que se passe-t-il si je suis à nouveau verbalisé ?

Aux termes de l’article L.3136-1du Code de la santé publique, si la violation des interdictions ou obligations édictées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire est constatée à nouveau dans un délai de quinze jours, l’amende forfaitaire est celle prévue pour les contraventions de la 5e classe.

Le montant de l’amende forfaitaire est fixé à 200 € pour les contraventions de la 5e classe.

Le montant de l’amende forfaitaire majorée est fixé à 450 € pour les contraventions de la 5e classe.

Le paiement par timbre amende n’est pas applicable pour les contraventions de la 5e classe.

Attention ! Si vous avez été verbalisé à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, les faits deviennent un délit et sont punis de six mois d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende ainsi que de la peine complémentaire de travail d’intérêt général et de la peine complémentaire de suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire lorsque l’infraction a été commise à l’aide d’un véhicule. Nous vous conseillons alors d’être assisté d’un avocat pour préparer au mieux votre défense, les arguments développés ci-après pourront être par ailleurs soulevés.

Depuis l’arrêté du 14 avril 2020 modifiant l’arrêté du 13 octobre 2004 portant création du système de contrôle automatisé, vos données à caractère personnel recueillies par l’agent verbalisateur, au moyen d’appareils électroniques à l’occasion de la constatation des infractions faisant l’objet d’une procédure d’amende forfaitaire, seront enregistrées et conservées dans un fichier automatisé.

Ce fichier permettra ainsi de contrôler si vous avez déjà fait l’objet d’une verbalisation et de comptabiliser le nombre d’amendes forfaitaires prononcées à votre encontre en vous rappelant qu’au delà de trois verbalisations dans le délai d’un mois, vous pouvez être poursuivi devant le tribunal correctionnel.

A noter ! La tardiveté de publication de l’arrêté du 14 avril 2020 pose la question de la légalité des verbalisations antérieures.

Vos données seront conservées dans une limite de cinq ans mais vous aurez la possibilité de demander au procureur de la République territorialement compétent d’ordonner l’effacement des données le concernant lorsque la procédure le concernant a donné lieu à une décision définitive de relaxe.

 

Dans quel délai puis-je payer ou contester l’amende forfaitaire ?

L’exposé ci-après concerne exclusivement la procédure de l’amende forfaitaire[1].

Le contrevenant peut procéder au règlement de l’amende ou formuler une requête en exonération (réclamation) auprès de l’officier du ministère public compétent territorialement par rapport au lieu de l’infraction dans les 90 jours suivant la constatation de celle-ci, mais il vous est conseillé de régler ou de contester dans les 45 jours, faute de quoi l’amende forfaitaire sera majorée de plein droit par le Trésor public.

Le délai est décompté en jour francs (à savoir à partir du lendemain de la constatation de l’infraction). Lorsque l’avis de contravention est envoyé par voie postale, le délai de 45 jours est décompté à partir de la date d’envoi de l’avis. 

Le recouvrement de l’amende peut être fait :

  • directement entre les mains de l’agent verbalisateur sous réserve que celui-ci détienne un carnet de quittance à souche de contravention, le paiement devant alors donner lieu à la délivrance d’une quittance extraite de ce carnet à souche ou lorsqu’il est muni d’un dispositif permettant d’adresser une quittance dématérialisée ;
  • auprès de l’officier du ministère public du ressort du lieu de l’infraction à l’adresse suivante : CS 41101 – 35911 RENNES Cedex 9 ;
  • sur le site de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (Antai).

A défaut de paiement de l’amende ou de requête formulée dans ce délai, l’amende forfaitaire est majorée de plein droit et l’officier du ministère public émettra un titre exécutoire permettant au Trésor public de recouvrer le montant de l’amende. En cas de paiement volontaire de l’amende forfaitaire majorée dans le délai d’un mois à compter de sa date d’envoi, le montant des sommes dues sera diminué de 20 %.

Attention ! Le paiement de l’amende ne permet plus de contester l’avis de contravention ou d’amende forfaitaire majorée. En effet, tout paiement vaut reconnaissance des faits reprochés.

 

En revanche, il est important de savoir que si vous contestez l’avis de contravention ou l’amende majorée selon les formes exigées par la loi, l’officier du ministère public doit soit classer sans suite la contravention soit renvoyer votre dossier devant le tribunal de police pour que vous soyez à même d’expliquer les raisons de votre contestation. En aucun cas, il ne détient le pouvoir de rejeter purement et simplement votre réclamation (sauf si celle-ci est irrecevable car formulée hors délai par exemple, ou sans envoyer l’original de l’avis, ou sans motivation).

Lorsque l’amende forfaitaire a été majorée, vous disposez d’un délai de 30 jours à compter de la date d’envoi de l’avis pour formuler une réclamation auprès de l’officier du ministère public du tribunal de police du lieu de l’infraction.

Pour info ! Aux termes de l’article 530 du Code de procédure pénale, le délai de réclamation reste ouvert pendant trois ans (durée de prescription de la peine) tant que rien ne permet d’établir que vous avez eu connaissance de l’amende forfaitaire majorée. Force est de constater que la plupart des amendes forfaitaires majorées ne sont pas envoyées en courrier recommandé. Aucune preuve ne peut être ainsi apportée de l’envoi de cette amende. Mais il est extrêmement difficile de contester une contravention, de sorte que si le titre exécutoire est mis à exécution (saisie sur salaire, sur compte bancaire etc…), faute de paiement ou de contestation dans les délais, vous pourrez certes toujours former une contestation mais il sera d’autant plus compliqué d’obtenir gain de cause que l’avis a été délivré à la bonne adresse, mais que vous dites n’avoir reçu ni l’avis ni l’amende forfaitaire.

Attention ! La requête en exonération ou la réclamation doivent être accompagnées de l’original de l’avis de contravention ou de l’amende forfaitaire majorée et être envoyées en courrier recommandé avec demande d’avis de réception sauf si vous décidez de formuler votre réclamation via le site Antai.

Focus : difficultés financières et le paiement de la contravention

L’article 530-4 du Code de procédure pénale dispose que « lorsque la personne qui a fait l’objet d’une amende forfaitaire majorée ne conteste pas la réalité de la contravention mais sollicite, en raison de ses difficultés financières, des délais de paiement ou une remise gracieuse, elle adresse sa demande motivée non pas à l’officier du ministère public, mais au comptable public compétent. Dans ce cas, l’article 529-10 n’est pas applicable. S’il estime la demande justifiée, le comptable public compétent peut alors octroyer des délais ou rendre une décision de remise gracieuse partielle ou totale, le cas échéant en appliquant une diminution de 20 % des sommes dues, conformément à l’article 707-4 ».

 

Quels motifs peuvent être invoqués pour contester ma contravention ?

 

  • Les motifs de la requête ou de la réclamation fondés sur l’irrégularité des avis de contravention

Les règles qui fixent la forme des contraventions sont édictées par les articles 429 et 529-2 du Code de procédure pénale et des articles A 37 et A 37-1 de ce même Code.

En vertu des articles A37 et A 37-1 du Code de procédure pénale, pour relever les contraventions soumises à la procédure de l’amende forfaitaire dans le cas où celles-ci ne sont pas payées immédiatement entre les mains de l’agent verbalisateur, ce dernier utilise des formulaires dont les caractéristiques sont les suivantes :

  • un premier volet, de format 100 mm × 186 mm, qui constitue la carte de paiement ;
  • un deuxième volet, de format 100 mm × 186 mm, qui constitue l’avis de contravention ;
  • un troisième volet, de format 100 mm × 186 mm, qui constitue le procès-verbal de contravention.

 

La carte de paiement et l’avis de contravention sont destinés au contrevenant.

Il convient donc avant toute contestation de demander à consulter le procès-verbal de contravention, le 3e volet conservé par l’agent verbalisateur. Ce droit ignoré par beaucoup ne peut vous être refusé.

En effet, en application de l’article 429 du Code de procédure pénale, tout procès-verbal n’a de valeur probante que s’il est régulier en la forme, si son auteur a agi dans l’exercice de ses fonctions et a rapporté sur une matière de sa compétence ce qu’il a vu, entendu ou constaté personnellement.

Il y a des anomalies que les juridictions qualifieront de simple erreur matérielle et qui n’entraîneront pas la nullité du procès-verbal, contrairement à d’autres plus substantielles qui entacheront de nullité le procès-verbal pour vice de forme.

Aussi, une irrégularité du procès-verbal peut constituer un moyen devant être soulevé avant toute défense au fond afin d’obtenir la nullité de ce dernier.

A cet égard, et à titre d’exemple, doit figurer sur le procès-verbal, la date et l’heure de la commission de l’infraction et le numéro de matricule de l’agent mais également sa signature (Cass Crim 6 mars 2013).

Vous pourrez ensuite développer des moyens de fond.

 

  • Les motifs de la requête ou de la réclamation fondés sur la violation du principe de légalité

Le principe de légalité pénale signifie notamment que vous ne pouvez être poursuivi et condamné si la loi sur laquelle repose l’infraction n’est pas suffisamment claire et précise concernant ses éléments constitutifs et sa peine applicable.

Ce principe est consacré dans plusieurs textes, nationaux comme internationaux :

  • Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (art. 8) ;
  • Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ( 7) ;
  • Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (art. 49) ;
  • Pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 15) ;
  • Code pénal (111-3)

Ce principe a valeur constitutionnelle. Le Conseil constitutionnel a jugé que « le législateur doit définir les infractions en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l’arbitraire » (Déc. n° 80-127 DC 20 janv. 1981, Sécurité et Liberté).

Au regard de ce principe, il est ainsi possible de contester certaines verbalisations pour lesquelles l’appréciation de l’agent verbalisateur reposerait sur une imprécision et manque de clarté de la réglementation entourant l’attestation de déplacement dérogatoire.

En effet et par exemple, que faut-il entendre par :

  • achat de première nécessité ?
  • un déplacement professionnel ne pouvant être différé ?
  • un motif familial impérieux ou la notion d’assistance à une personne vulnérable ?

Si le texte incriminant les violations des interdictions et obligations dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire paraît respecter le principe, il ne semble pas aller de même s’agissant de son renvoi à l’interdiction de déplacement et aux exceptions prévues par le décret du 23 mars 2020.

En effet, eu égard à l’imprécision de l’article 3 du décret du 23 mars 2020, il apparaît en pratique qu’une grande marge d’appréciation est laissée aux agents verbalisateurs quant à la qualification des motifs permettant les déplacements dérogatoires.

Le décret serait ainsi reconnu comme étant inconstitutionnel et inconventionnel, en raison de la violation du principe de légalité. Et, par conséquent, puisqu’il fonde l’infraction, le tribunal prononcera votre relaxe.

A cet égard, s’agissant d’une contravention de police, la Cour de cassation, par un arrêt du 1er février 1990, a cassé la décision attaquée en retenant expressément que le texte prétendument violé, l’article L.362-1 du Code des communes, ne contenait aucune incrimination rédigée en termes clairs et précis, et que, de ce fait, aucune peine n’aurait dû être prononcée contre le prévenu. (Cass.crim.. 1er février 1990, Bull.crim. n° 56 ; et 1 décembre 1990, Bull.crim. n°432, relatif à l’exercice de l’action civile)

Vous présenterez vos moyens sur le volet joint à l’avis devant l’officier puis, si vous êtes convoqué devant le tribunal de police, vous soulèverez aussi dès le début de votre procès (à l’appel de votre nom), l’illégalité du décret du 23 mars 2020 en demandant au juge de statuer sur la violation par le décret du principe de légalité, grâce aux pouvoirs du juge pénal définis par l’article 111-5 du code pénal.

 

  • Les motifs de la requête ou de la réclamation fondés sur la force majeure

En vertu de l’article 121-3 du Code pénal, « il n’y a point de contravention en cas de force majeure ».  

La force majeure se définit comme une contrainte qui s’exerce sur le corps ou l’esprit de l’agent et qui, en abolissant chez lui toute liberté de choix, l’empêche d’exécuter ses obligations ou l’oblige à commettre un acte répréhensible.

La force majeure doit revêtir deux critères :

  • l’imprévisibilité (dans la survenance de l’événement) : on considère que si un événement est prédit, on pourra prendre les mesures appropriées pour éviter ou limiter le préjudice ;
  • l’irrésistibilité (dans ses effets) : suivant une jurisprudence bien établie la personne poursuivie doit s’être trouvé « dans l’impossibilité absolue de se conformer à la loi ».  
   

Il est de principe que la force majeure ne peut ainsi résulter que d’un événement indépendant de la volonté humaine que la personne poursuivie n’a pu ni prévoir ni conjurer, d’un événement imprévisible et insurmontable l’ayant empêché de se conformer à la loi.

La force majeure fait disparaître votre responsabilité pénale.

A titre d’exemple, si vous êtes sans domicile fixe, et donc dépourvu de tout logement, vous ne pouvez répondre objectivement aux obligations de confinement, dès lors vous seriez susceptible de soulever la force majeure pour échapper à la condamnation.

Pour info ! La cellule interministérielle de crise Covid-19 a, par une note du 31 mars 2020, instruit les agents constatant la présence de sans-abris sur la voie publique, de ne procéder à aucune verbalisation, l’obligation de confinement à domicile ne pouvant être appliquée à ces personnes.

 

  • Les motifs de la requête ou de la réclamation fondés sur l’erreur de droit

En vertu de l’article 122-3 du Code pénal « N’est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par une erreur sur le droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement accomplir l’acte ».

L’erreur de droit invincible se définit comme étant celle commise par une personne qui est dans l’impossibilité absolue de l’éviter malgré la recherche d’informations.

L’erreur de droit doit être légitime.

L’erreur sur le droit doit être invincible. Autrement dit, la personne poursuivie doit justifier qu’elle n’était pas en mesure d’éviter son erreur.

A titre d’exemple, vous avez tenu compte des réponses du ministère de l’Intérieur dans la foire aux questions, vous avez été induit en erreur par cette réponse car finalement lors d’un contrôle la police vous a malgré tout verbalisé.

Pour info ! En pratique, l’erreur de droit est rarement retenue par le tribunal puisqu’il suffirait de se fonder sur la violation du principe de légalité pour se défendre, rendant par conséquent son invocation accessoire. Aussi, avant que votre affaire soit jugée par un tribunal, il faut tout de même tenter d’invoquer votre bonne foi dans le cadre de votre réclamation et solliciter l’indulgence de l’officier du ministère public.

 

Quelles preuves peuvent être apportées au soutien de la contestation de ma contravention ?

Le principe de la liberté de la preuve en droit pénal fait exception en matière de contravention quand celle-ci fait l’objet d’une contestation devant le tribunal de police.

En effet, si vous pouvez dans le cadre de votre requête en exonération ou en réclamation apporter des preuves de toute nature au soutien de vos allégations visant la contestation de la contravention, il n’en est pas de même si, en cas de rejet de votre requête en réclamation par l’officier du ministère public, vous demandez à ce que votre contestation passe ensuite devant un juge.

Il faut savoir à cet égard que l’officier du ministère public ne peut refuser de transmettre votre dossier au juge, sous réserve que les conditions de recevabilité de la contestation soient réunies (motivation de la requête accompagnée de l’avis de contravention). Il convient pour ce faire de lui en faire la demande par lettre recommandée avec accusé de réception en rappelant votre réclamation. Il faudra ainsi dans le cadre de cette contestation de demander à titre principal le classement sans suite ou l’indulgence de l’officier du ministère public et à titre subsidiaire, votre comparution devant le tribunal de police.

Dans le cadre de l’instruction de votre contestation devant le tribunal de police, l’article 537 du Code de procédure pénale dispose que « les contraventions sont prouvées soit par procès-verbaux ou rapports, soit par témoins à défaut de rapports et procès-verbaux, ou à leur appui. Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux ou rapports établis par les officiers et agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints, ou les fonctionnaires ou agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire auxquels la loi a attribué le pouvoir de constater les contraventions, font foi jusqu’à preuve contraire. La preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins ».

Ainsi, selon l’article 537 du Code de procédure pénale, les procès-verbaux de constat établis en matière contraventionnelle valent jusqu’à preuve contraire. Si la règle prévue à l’article 537, alinéa 2, du Code de procédure pénale dérange, c’est qu’elle passe outre les principes essentiels de procédure pénale que sont la présomption d’innocence, la liberté des modes de preuve, le respect du contradictoire ou encore la nécessité de l’intime conviction.

Les seuls moyens admis par la loi pour apporter la preuve contraire sont l’écrit ou le témoignage.

Attention ! Vous avez le droit de combattre ces procès-verbaux, mais leur force probante ne peut être infirmée sur vos seules dénégations ou allégations. S’il résulte des constats de l’agent verbalisateur que l’infraction est constituée et que la preuve contraire au procès-verbal n’est pas rapportée par l’un des moyens admis par la loi (écrit ou témoignage), le juge ne peut relaxer le prévenu au bénéfice du doute au motif que l’infraction ne serait pas suffisamment établie (Crim., 25 avril 1977, pourvoi n° 77-90.125, Bull. crim. 1977, n° 134, à propos d’une contravention).

Ainsi le juge ne peut pas faire droit à la requête sans constater que la preuve contraire aux énonciations du procès-verbal a été rapportée par écrit ou par témoins.  Il faut toutefois que le procès-verbal ne se contente pas d’évoquer une violation des règles relatives au confinement mais devra expressément indiquer les circonstances ayant conduit à considérer que lesdites règles n’auraient pas été respectées. En d’autres termes, l’agent verbalisateur ne peut se contenter de constater le non-respect de l’interdiction de déplacement mais devra préciser de manière circonstanciée les raisons l’ayant conduit à constater une telle infraction comme la « non présentation de l’attestation de dérogation », etc.

Dès lors que la preuve contraire aux énonciations des procès-verbaux dressés en matière contraventionnelle ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins, la demande d’audition d’un témoin du prévenu doit, malgré le lien d’amitié qui les unit, être accueillie (Crim. 4 févr. 2014, n°13-81.135).

A cet égard, l’attestation écrite d’un témoin ne vaut pas témoignage au sens de l’article 537 du Code de procédure pénale. Seule la déposition faite sous serment peut être discutée à l’audience (Crim, 24 mai 1984). En outre, elle n’est pas non plus considérée comme un écrit en ce sens qu’elle n’est pas un élément de preuve objectif (comme peuvent l’être une facture, un certificat médical, etc.).

 

Quelles suites peuvent-être données à ma requête ou ma réclamation ?

En application des articles 530 et 530-1 du Code de procédure pénale, l’officier du ministère public n’a que deux possibilités face à une requête ou d’une réclamation recevable :

  • Il peut classer sans suite la contravention.
  • Il renvoie devant la juridiction de jugement.

En pratique et de manière quasi-systématique, l’officier du ministère public se contente de rejeter la requête ou la réclamation en totale violation des règles légales, en estimant que les éléments qui lui sont présentés ne permettent pas de donner une suite favorable à la requête.

Il arrive également fréquemment que le contrevenant ne reçoive jamais aucune réponse si ce n’est l’avis de majoration de l’amende.

L’officier du ministère public vérifie la recevabilité de la réclamation. Mais s’il dispose du pouvoir d’apprécier le bien-fondé de la réclamation en prononçant le classement sans suite de la contravention, il ne peut rejeter la contestation au simple motif qu’il la juge infondée.

Ainsi, lorsque les conditions de recevabilité sont remplies, la contestation doit être obligatoirement portée devant la juridiction de jugement à moins que l’officier du ministère public ne décide de renoncer aux poursuites.

Vous devrez donc saisir vous-même le tribunal d’un incident contentieux en apportant la preuve de l’envoi de votre contestation et en apportant une copie de celle-ci. Le problème étant que si l’officier du ministère public affirme que l’original de l’avis n’était pas joint, vous ne pourrez pas apporter la preuve contraire. Prenez des copies de tout et préparez votre dossier devant une autre personne chargée de le poster, qui pourra témoigner. Sur Antai, il y a la preuve de l’envoi.

Pour préparer au mieux votre défense, nous vous conseillons l’assistance d’un avocat en vue de l’audience. Celui-ci pourra en effet soulever in limine litis – c’est-à-dire avant même d’évoquer les faits sur le fond – l’irrégularité du procès-verbal constatant l’infraction et, partant, sa nullité.

Lire aussi la fiche Usage de la force, placement en garde à vue, fouille et nouveau délit lié au non respect du confinement

[1]Si la procédure suivie était l’ordonnance pénale ou la citation directe, nous vous renvoyons au Guide pratique du confinement


Source: Déplacement dérogatoire : verbalisation et contestation