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Ligue des droits de l'Homme

Section du Pays d'Aix-en-Provence

Archives de l'auteur : psenegas

Le 6 juillet 2020 – Tribune de Malik Salemkour “Ces maux qui minent la cohésion nationale”, publiée dans Mediapart 8 juillet 2020

Tribune de Malik Salemkour, président de la LDH

La mort filmée de George Floyd, un Afro-Américain étouffé sous les genoux d’un policier de Minneapolis, le 25 mai 2020, était insupportable et a soulevé une vague mondiale d’indignation. Si l’histoire américaine est singulière vis-à-vis des personnes noires, ces images ont réveillé partout des ressentiments profonds d’injustice qui portent à la fois sur des pratiques violentes et discriminatoires des forces de l’ordre et sur un racisme que les pouvoirs publics n’ont pas endigué, faute d’en traiter aussi les sources et toutes les dimensions.

En France, le rassemblement à l’appel du Comité Adama devant le tribunal judiciaire de Paris, le 2 juin, a été d’une ampleur massive et inattendue, réunissant pacifiquement des dizaines de milliers de personnes, malgré l’interdiction de manifester posée par le préfet de police de Paris. Le décès de ce jeune homme le 19 juin 2016, dans une gendarmerie du Val-d’Oise, dans des conditions et responsabilités toujours non éclaircies, est posé en symbole français de la défiance envers les autorités policières et judiciaires portée par une partie de la population. Les rassemblements populaires se succèdent dans de nombreuses villes, appelant à la vérité et à la justice sur les trop nombreux cas restés impunis, à sortir du déni officiel des violences policières et à combattre le racisme présent dans une institution chargée de les prévenir.

Ces sujets sont sérieux et les débats ouverts ne peuvent être clos par les différences entre la France et les Etats-Unis ou par la déclamation du président de la République de soutien de la puissance publique et de la reconnaissance de la nation aux policiers et gendarmes. Les tentatives de discrédits sur les manifestants tentent de détourner l’attention des problèmes réels posés. Lancer le mot de « séparatiste » inocule l’idée d’une aspiration à des droits spécifiques, à des démarches hors des institutions. Au contraire, ces mouvements appellent avec force à l’égalité, à la prévention de l’arbitraire et de l’impunité, à des autorités publiques qui traitent chacune et chacun avec les mêmes droits, sans distinction d’origine, de couleur de peau ou de lieux de vie. C’est au nom de la République et de sa devise que sont exprimées ces revendications de justice, d’institutions exemplaires et d’une effectivité des droits égaux pour tous et partout sur le territoire national.

Des violences individuelles à la répression des mouvements sociaux

La question des violences policières est sur le devant la scène depuis longtemps. Elle émerge au rythme de dramatiques faits divers, souvent dans des quartiers populaires, et des actualités judiciaires les concernant. Avant le cas d’Adama Traoré, l’électrocution mortelle le 27 octobre 2005 de Zyed Benna (17 ans) et de Bouna Traoré (15 ans) pour échapper à un contrôle de police, avec les émeutes dans les banlieues françaises qui s’en sont suivies, reste dans toutes les mémoires avec une procédure conclue en 2015 par la relaxe des deux policiers renvoyés devant le tribunal correctionnel. D’autres affaires sont marquantes comme celle d’Amine Bentounsi, tué d’une balle dans le dos à Noisy-le-Sec en 2012 par un policier condamné en 2017 à cinq ans de prison avec sursis, Théo Luhaka, insulté et violé en février 2017 par une matraque lors d’un contrôle policier avec une instruction en cours, Liu Shaoyao, abattu à Paris par des policiers devant ses enfants en 2017 avec un non-lieu jugé en 2019, Aboubakar Fofana, mort en 2018 au volant de son véhicule par le tir d’un CRS lors d’un contrôle d’identité. Plus récemment, le 5 janvier 2020, Cédric Chouviat meurt à Paris après un plaquage ventral de trois policiers, le 25 mai dernier le jeune Gabriel Djordjevic, 14 ans, apparaît sur les réseaux sociaux le visage tuméfié après une interpellation à Bondy.

Ces cas dépassent les comportements individuels de policiers ou gendarmes. Ils interrogent leurs missions, leurs techniques d’intervention et le fonctionnement de la justice. Les victimes et leurs familles se sentent abandonnées par les institutions, en incompréhension des procédures ouvertes, longues et complexes, elles se sentent en déficit d’informations et leurs paroles sont trop souvent mises en doute. Les sanctions, quand elles arrivent, sont jugées inadaptées aux faits en cause, accroissant, chez elles et bien plus largement, le sentiment d’une justice à deux vitesses et d’une impunité des forces de l’ordre. C’est à cela qu’il convient de s’attaquer.

Les critiques des forces de l’ordre naissent aussi de l’expérience, par des populations nouvelles, de la répression des derniers mouvements sociaux, des « gilets jaunes » aux manifestations pour le climat ou contre la réforme des retraites. Les blessés graves, les gazages systématiques, les prises en « nasse » des manifestants ont mis en lumière des violences illégitimes et une stratégie du maintien de l’ordre qui dépasse ceux qui la mettent en œuvre et qui renvoie directement à la chaîne de commandement et aux volontés politiques. Des propositions sont sur la table pour sortir d’une militarisation néfaste des opérations de sécurité publique et rétablir une confiance partagée entre la police et tous les citoyens. Le gouvernement doit sortir du déni et y travailler. Il convient d’assurer une transparence des données sur ces violences et de créer un service d’enquête indépendant, de réviser les méthodes d’intervention de maintien de l’ordre afin de prévenir les dérives constatées, d’abandonner des armements inadaptés et dangereux, d’interdire des techniques d’immobilisation mortelles, d’assurer un traitement judiciaire équitable des faits de violences policières et un meilleur encadrement des procédures d’outrage et rébellion, de former les policiers et gendarmes, notamment ceux intervenant dans les quartiers populaires et de redéployer une police de proximité en dialogue avec tous les habitants. Il s’agit aussi de lutter contre les contrôles au faciès, avec notamment l’instauration d’un récépissé de contrôle d’identité, de réformer les conditions autorisant ces contrôles aujourd’hui détournés de leur objet à des fins de pression et de répression, notamment envers les étrangers.

Racisme, préjugés, discriminations : en débattre pour agir

L’agression et les insultes racistes envers un sans-papiers à L’Ile-Saint-Denis en avril 2020, les dernières révélations de groupes racistes sur les réseaux sociaux et le rapport du Défenseur des droits en juin dernier dénonçant des pratiques discriminatoires dans le 12e arrondissement à Paris montrent, si nécessaire, l’importance de lutter contre le racisme et les préjugés au sein de la police qui, comme le reste de la population, n’est pas épargnée de ce fléau. Il n’est pas de racisme d’Etat, celui-ci ayant fixé le cadre et ouvert les moyens de le combattre. Mais il est des pratiques publiques et privées qui font système et discriminent. Elles sont à étudier librement pour éclairer des réponses préventives. Le traitement incomplet de l’histoire de France, notamment coloniale, empêche une lecture utile des mécanismes complexes à l’œuvre qui alimentent des préjugés et du racisme. Il est temps de les affronter. L’Etat, par ses représentants publics, avec leurs discours et les dispositions qu’ils adoptent, doit garantir que toutes personnes vivant en France soient traitées avec les mêmes droits et en égale dignité. Celles et ceux qui manifestent après la mort de George Floyd appellent aux débats et à l’action. Il est de notre responsabilité collective de saisir d’urgence cette opportunité pour combattre ensemble ces maux qui minent notre cohésion nationale.

 Paris, le 6 juillet 2020

Malik Salemkour, président de la LDH

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Source: Le 6 juillet 2020 – Tribune de Malik Salemkour “Ces maux qui minent la cohésion nationale”, publiée dans Mediapart

H&L numéro 190 6 juillet 2020

éditorial

Ces maux qui minent
la cohésion nationale
Malik Salemkour Lire l’article

 

Actualité

Continuité pédagogique ? Au-delà du slogan
Françoise Dumont
Lire l’article

La recherche face à la Covid-19 : trop peu, trop tard
Gérard Chaouat Lire l’article

Les observatoires citoyens : décrire, témoigner, dénoncer
Daniel Welzer-Lang

De l’usage de la violence d’Etat
Sebastian Roché
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Les élèves face à la laïcité : l’effet éducation
Nathalie Mons

Le difficile accès aux droits par les services publics en Outre-mer
Dominique Rivière

Secret défense : raison
ou déraison d’Etat ?
André Lucas, François Graner
Accès aux archives :
une course d’obstacles ?

Nathalie Lopes, Jean-Philippe Legois
Lire l’article

 

 

monde

– Coronavirus : la dictature chinoise fragilisée

Alain Bouc

Présidentielle américaine : une campagne invisible,
une issue imprévisible

Maryse Butel
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Iran : un combat pour
la liberté scientifique

Béatrice Hibou

 
















Source: H&L numéro 190

Le 2 juillet 2020 – tribune collective signée par Malik Salemkour “Le poison du racisme distillé dans les foyers bretons”, publiée dans mediapart 6 juillet 2020

Lire la tribune sur Mediapart

En réponse à l’éditorial d’Hubert Coudurier « Le poison de l’indigénisme » publié le 13 juin dans le journal Le Télégramme, des élus, artistes, militants affichent leur indignation face à ce texte qui « attise la haine et les divisions ». Ils dénoncent « la volonté de faire perdurer un roman national raciste. »

Dénigrement des militants anti-racistes, blanc-seing donné aux forces de l’ordre, conviction civilisatrice des colonisateurs, voilà ce que défend dans son éditorial du 13 juin Hubert Coudurier, directeur de l’information du Télégramme. Ce n’est pas le premier dérapage de cet acabit pour le patron de presse breton, mais c’est celui de trop pour nous.

 

Police-citoyens : repensons nos relations

« Certes, personne ne peut sérieusement comparer les violences policières en France à celles, bien réelles, aux États-Unis (six fois plus de morts en interventions, toutes proportions gardées). De plus, les Français, qui savent raison garder, contrairement à leur gouvernement de « pétochards », comme l’a justement dit Philippe de Villiers, approuvent largement les forces de l’ordre dont ils comprennent la complexité de la tâche. » – Extrait de l’éditorial d’Hubert Coudurier.

La mort aux Etats-Unis de Georges Floyd replace la question des relations entre les citoyens et les forces de l’ordre au cœur du débat public français. Nier les violences policières en France, n’en faire qu’un problème américain, ne nous permettra pas d’avancer. Il est temps de se confronter à notre réalité, celle de citoyens français qui ne se sentent pas en sécurité en présence de nos forces de l’ordre, de citoyens qui se sentent discriminés et niés dans leur humanité.

Quelques mois après la mort de Steve Maia Caniço à Nantes, de Zineb Redouane à Marseille, ou de Cédric Chouviat à Paris, l’idée sous-entendue par l’éditorialiste que nos fonctionnaires de police feraient toujours et en toutes circonstances un usage strictement proportionné de la force reviendrait presque à délivrer aux policiers et aux gendarmes un permis de tuer. Certes le travail des forces de l’ordre est complexe mais nous ne sommes pas au pays des cow-boys. Comme le dit très simplement Blaise Pascal : « La justice sans la force est impuissante, la force sans la justice est tyrannique ».

Les familles des victimes de violences policières ne défendent pas une cause égoïste et séparatiste mais bien les droits de tous les citoyens français. Ce combat rassemble aujourd’hui des dizaines de milliers de personnes à travers la France, n’en déplaise à monsieur Coudurier.

 

Il est temps de sortir d’une vision ethnocentrée de la colonisation

« La France a une histoire coloniale comportant des heures tragiques mais aussi de belles histoires. Beaucoup d’officiers méharistes ou de coopérants croyaient en leur mission civilisatrice » – Extrait de l’éditorial d’Hubert Coudurier.

Sans transition, le directeur de l’information en arrive ensuite aux « belles histoires » de la colonisation française. Non Monsieur, l’histoire coloniale ne porte en elle aucune once de beauté. Envahir des territoires et assujettir des peuples dans le sang et la barbarie n’a rien de romantique. Vous évoquez les gentils officiers méharistes mais oubliez au passage les Faidherbe et Bugeaud. Par votre éditorial, vous trahissez la volonté de faire perdurer un roman national raciste. Oui, la colonisation fait partie de l’histoire française et il est temps aujourd’hui de l’assumer, l’écrire, l’enseigner dans sa globalité, sans omettre aucune voix, pour sortir enfin de cette vision ethnocentrée.

 

Une semaine après la publication de cet édito raciste, un silence assourdissant…

Parce qu’en France, on manifeste par milliers contre le racisme mais on a bien du mal à défendre ce combat dans notre vie quotidienne.

Parce qu’en France, l’avenir de nos enfants, blancs, est plus simple que la vie de nos enfants noirs, arabes et asiatiques,

Nous, journalistes, élus, artistes, militants, citoyens français, affichons aujourd’hui publiquement notre indignation face à cet éditorial qui attise la haine et les divisions.

 

Signataires :

Yamgnane Kofi premier maire noir de France et ancien secrétaire d’Etat à l’intégration
Chamoiseau Patrick ecrivain, prix Goncourt 1992
Alimi Arié, avocat au barreau de Paris
Salemkour Malik  président de la Ligue des droits de l’Homme
Tartakowsky Pierre, journaliste et président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme
Mouss et Hakim, auteur, chanteur
Hadadi Kaddour alias HK et les Saltimbanks, auteur, chanteur
Riguidel Eugène, navigateur
Sopo Dominique, président de SOS Racisme
Labbize Souad, écrivaine
Massadian Valerie, cinéaste
Dambury Gerty, autrice/metteure en scène. membre fondatrice du collectif Décoloniser les arts
Cheb Sun Marc, auteur
Ryo Christian, directeur du festival du cinéma de Douarnenez
Jacquiau Christian , économiste, écrivain
Thomas Samuel, délégué générale des maisons des potes
BenarabAttou Malika, ancienne député européenne EELV

Associations,Collectifs, Groupes politiques et Syndicats : 

Collectif des familles victimes des violences policière Vies Volées,
Collectif Lamine Dieng, 
LDH,
MRAP,
EELV,
LFI,
PCF 35, 
PS 35, 
Union Syndicale Solidaire 56

Formulaire de signature en ligne : Tribune citoyenne contre l’éditorial raciste du Télégramme

Source: Le 2 juillet 2020 – tribune collective signée par Malik Salemkour “Le poison du racisme distillé dans les foyers bretons”, publiée dans mediapart

Pour la libération immédiate de Salah Hamouri 6 juillet 2020

Communiqué LDH

L’avocat franco-palestinien, Salah Hamouri, a été arrêté le 30 juin dernier à Jérusalem Est par la police israélienne dans un centre de santé où il allait faire un test pour la Covid-19, test obligatoire pour revenir en France rejoindre sa femme et son fils. Le 1er juillet, il a été placé en détention administrative jusqu’au 7 juillet, sans qu’aucun motif n’ait été mis en avant pour justifier son arrestation.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) dénonce le harcèlement dont est victime ce défenseur infatigable des droits des Palestiniens, rappelant qu’il a déjà passé abusivement neuf ans de sa vie en prison et n’a pas eu le droit de vivre à Jérusalem avec sa famille.

Elle condamne une nouvelle fois un système de détention administrative inique qui permet aux autorités israéliennes d’enfermer de façon arbitraire tout opposant et ainsi d’essayer de faire taire toute contestation politique.

La LDH ne cesse de dénoncer les violations systématiques du droit international par Israël.

Elle tient à témoigner, une fois encore, tout son soutien à Elsa Lefort, la femme de Salah Hamouri, à son fils, à sa famille et à ses amis et demande aux autorités françaises et européennes de peser de tout leurs poids pour obtenir sa libération immédiate.

Paris, le 3 juillet 2020

Télécharger le communiqué en format PDF

Source: Pour la libération immédiate de Salah Hamouri

Vérité et justice 2 juillet 2020

Tribune publiée sur Libération, à l’initiative de la LDH et signée par plusieurs personnalités et organisations, contre les violences policières et le racisme. Signez vous aussi la pétition pour apporter votre soutien !

Le monde entier défile, avec ou sans autorisation, pour condamner l’assassinat de George Floyd, honorer sa mémoire, et déclarer qu’enfin les personnes noires, victimes à différents degrés de racisme systémique et institutionnel, doivent pouvoir « respirer », c’est-à-dire vivre comme tout être humain, libre et égal aux autres, en a le droit imprescriptible. Ce que demandent particulièrement ces manifestants, c’est que ne soient plus ni tolérées, ni protégées, ni a fortiori encouragées par les pouvoirs publics et leurs représentants du haut en bas de la « chaîne de commandement » les violences, les humiliations quotidiennes fondées sur l’apparence, les origines ou le domicile, ainsi que les brutalités pouvant aller jusqu’à la mort.

En France, malgré l’évidence d’un passé colonial qui pèse encore sur les rapports sociaux, malgré les manifestations innombrables de la combinaison des inégalités sociales, territoriales et raciales, malgré les cris de douleur et de colère de celles et ceux qui en sont les victimes, relayés par les associations et authentifiés par le Défenseur des droits lui-même, la dénégation est officialisée. Au lendemain d’une mobilisation sans précédent sur ces sujets, le ministre de l’Intérieur se bornait à déclarer que les policiers sous ses ordres « protègent tous les Français, y compris contre le racisme ». Cette provocation valant promesse d’impunité pour ceux des policiers et des gendarmes qui confondent une identité avec un faciès a fait long feu. Face à la mobilisation grandissante, le ministre et le gouvernement promettent aujourd’hui de renoncer à telle technique, telle procédure, de faire respecter la loi par les forces de l’ordre et exhibent à point nommé rapports et enquêtes…

S’il est non négligeable, ce changement de ton ne saurait être suffisant.

Alors que s’atténue peu à peu une crise sanitaire au cours de laquelle l’ampleur des discriminations sociales et territoriales s’est trouvée exposée en pleine lumière, et dont on découvre qu’elle a aussi recouvert de nombreuses « bavures » dans l’application des politiques sécuritaires, il est urgent de crever l’abcès en parlant vrai.

Parler vrai, c’est rappeler aux pouvoirs publics qu’ils doivent respecter et faire respecter les droits fondamentaux en manifestant le courage de la sanction.

Parler vrai, c’est reconnaître le rôle des institutions et des politiques dans le développement du racisme et des discriminations.

Parler vrai, c’est nommer les coupables de violence et de racisme ainsi que leurs responsables et exiger qu’ils soient sanctionnés.

Parler vrai, c’est répondre à celles et ceux qui se mobilisent pour le respect de leurs droits fondamentaux, la justice sociale, la justice tout court.

La société civile, les associations de défense des droits, les comités constitués autour d’affaires de violences policières avancent de longue date des propositions en ce sens. Certaines sont reprises par la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), ainsi que par le Défenseur des droits. Elles constituent une base pour engager une réforme profonde de la police, de ses missions, de ses méthodes, de son contrôle.  

Nous, citoyennes et citoyens de toutes opinions, de toutes origines, de toutes confessions, de tous âges, genres et professions, réclamons la création d’une commission indépendante, placée sous l’autorité de la CNCDH, qui reçoive les doléances des victimes, écoute toutes les personnes et organisations concernées et fasse des propositions qui permettent de renouer le lien entre les forces de l’ordre et la population et de combattre les violences et le racisme.

Le président de la République a récemment réitéré le vœu de faire prendre à la nation éprouvée par la crise sanitaire un nouveau départ. Ce renouveau ne se fera pas sans qu’on apure de notre présent les discriminations raciales et la violence qui les accompagne. Il ne se fera pas sans tous les citoyens. Il a besoin de vérité et de justice.

 

A l’initiative de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et signé par plusieurs personnalités :

Estellia Araez présidente du Syndicat des avocats de France (Saf) ;
Etienne Balibar, philosophe ;
Mamoudou Bassoum, champion d’Europe de taekwondo, Gilet jaune ;
Lassana Bathily, écrivain franco-malien ;
Judith Bernard, metteuse en scène et enseignante ;
Patrick Chamoiseau, écrivain ;
Monique Chemillier-Gendreau, professeur émérite à l’Université Paris Diderot ;
Vanessa Codaccioni, sociologue ;
Annick Coupé, militante altermondialiste ;
Laurence De Cock, historienne et essayiste ;
Didier Fassin, anthropologue et médecin ;
Eric Fassin, sociologue ;
Nora Hamadi, journaliste ;
Stéphanie Hennette-Vauchez, professeure de droit public ;
Cédric Herrou, Communauté paysanne Emmaüs Roya ;
Geneviève Jacques, ancienne présidente de La Cimade ;
Leslie Kaplan, écrivain ;
Henri Leclerc, avocat, président d’honneur de la LDH ;
Geneviève Legay, militante altermondialiste ;
Eléonore Luhaka, éducatrice et actrice sociale ;
Maryam Madjidi, écrivaine, réfugiée iranienne ;
Gustave Massiah, membre du comité international du Forum social mondial ;
Fatima Mostefaoui, porte-parole de « Femmes des quartiers populaires » ;
Laurent Mucchielli, sociologue (CNRS) ;
Latifa Oulkhouir, directrice du Bondyblog ;
Gilles Porte, cinéaste ;
Judith Revel, philosophe ;
Sébastian Roché, directeur de recherche au CNRS ;
Joël Roman, président de la Ligue de l’enseignement ;
Malik Salemkour, président de la LDH ;
Laurent Thines, neuro-chirurgien ;
Lilian Thuram, président de la Fondation Education contre le racisme ;
Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac, enseignante chercheuse ;
Maryse Tripier, sociologue de l’immigration ;
Françoise Vergès, militante féministe antiraciste ;
Comité Adama Traoré ;
Catherine Wihtol de Wenden, politologue CNRS ;

Et plusieurs organisations :

Action droits des musulmans (ADM), Assemblée citoyenne des originaires de Turquie (Acort), Association de défense des droits de l’Homme au Maroc (ASDHOM), Association des jeunes Chinois de France (AJCF), Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF), Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac), Avec nous, Centre de recherche et d’information pour le développement (Crid), Collectif Vies volées, Comité national de liaison des régies de quartier (CNLRQ), Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), Comité pour Liu Shaoyao, Comité vérité et justice pour Lamine Dieng, Confédération générale du travail (CGT), Conseil représentatif des institutions noires de France (Cran), Coordination nationale Pas sans Nous !, Emmaüs France, Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR), Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes et Gens du voyage (Fnasat-Gens du voyage), Fédération syndicale unitaire (FSU), Femmes des quartiers populaires, Fondation Copernic, Fondation Danielle Mitterrand, Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), Jeunesse au plein air (JPA), Jeunesse ouvrière chrétienne (Joc), La Cimade, Ligue des droits de l’Homme (LDH), Ligue de l’enseignement, Mémorial 98, Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC), Réseau euro-maghrébin citoyenneté et culture (REMCC), Union juive française pour la paix (UJFP), Union nationale des étudiants de France (Unef), Union nationale lycéenne (UNL), Union syndicale Solidaires, Solidarité laïque, Syndicat des avocats de France (Saf), Syndicat national des personnels de l’éducation et du social – Protection judiciaire de la jeunesse (SNPES-PJJ/FSU).

 

Vous aussi soutenez cet appel en signant la pétition en ligne :

 


Dernières signatures
474 andré chabot Juil 02, 2020
473 Roch VANDROMME Juil 02, 2020
472 Chantal LOCHEREAU Juil 02, 2020
471 Marie-Claude Treilhou Juil 02, 2020
470 Antoine Boutet LDH le Mans Juil 02, 2020
469 Sylvie Peyrat Juil 02, 2020
468 Victoria Rousso Etudiante Juil 02, 2020
467 gilles BASSENNE Juil 02, 2020
466 Thierry Augendre Juil 02, 2020
465 Hélène Stritmatter Juil 02, 2020
464 Catherine Burdin Juil 02, 2020
463 Jp Renaudat Juil 02, 2020
462 Jeanne Dacenko particulier Juil 02, 2020
461 Lisa Silvestre Mouvement de la Paix Juil 02, 2020
460 Patrick Harivel Comédien Juil 02, 2020
459 Erick Trinité Membre LdH Juil 02, 2020
458 JACQUES MICHON section LDH Tyrosse sud des Landes Juil 02, 2020
457 monique duffau Juil 02, 2020
456 Michel CARTRON Membre LDH 49 Juil 02, 2020
455 Helene Ramos Juil 02, 2020
454 Michèle brenas militante anti raciste Juil 02, 2020
453 Denis RICHARD LDH Juil 02, 2020
452 Daniel WELZER-LANG Sociologue, membre de l’Observatoire toulousain des Pratiques Policères Juil 02, 2020
451 Groupe Non-Violent LOUIS LECOIN Groupe Non-Violent LOUIS LECOIN Juil 02, 2020
450 Jean Marc BRUNEEL Mr. Juil 02, 2020
449 joelle cabezas M. Juil 02, 2020
448 Nicole Phelouzat LDH Juil 02, 2020
447 Cécile CANCEL Juil 02, 2020
446 Robert LALA Juil 02, 2020
445 Marie LIBANORI LDH Juil 02, 2020
444 Armand Ajzenberg Juil 02, 2020
443 sylvie lauvergeat orly Juil 02, 2020
442 christiane verant LDH Juil 02, 2020
441 Geneviève Menguy Juil 02, 2020
440 Jean-François Eono Juil 02, 2020
439 Coline Slotala DROP solidarité Juil 02, 2020
438 Michel Boulet Professeur honoraire sup agro Juil 02, 2020
437 laurent alloing Juil 02, 2020
436 Dominique MERLIN Membre de la LDH Juil 02, 2020
435 Khemissa Slimane PSN, conseil citoyen Toulouse secteur 2 Juil 02, 2020
434 Marianne Blin LDH-Pont Audemer Juil 02, 2020
433 Philippe BARRE Syndicaliste Juil 02, 2020
432 Jean MALIE LDH Juil 02, 2020
431 Simon SENOT Attaché d’aministration Etat – LDH Juil 02, 2020
430 Marc Nazzi Retraité Juil 02, 2020
429 claude bernhardt membre LDH et président Crear Escuela en Colombie Juil 02, 2020
428 Christine Lecru Salariée Juil 02, 2020
427 Rachid Zrioui Juil 02, 2020
426 Anne-Guite Beau-Castagnac LDH Juil 02, 2020
425 Marc Perret Professeur à l’Université de Toulouse Juil 02, 2020

Source: Vérité et justice

Les caméras thermiques de Lisses « débranchées » par le Conseil d’Etat 2 juillet 2020

Communiqué LDH

Depuis le début de la pandémie, l’état d’urgence sanitaire est le prétexte utilisé par des maires sécuritaires pour recourir à des dispositifs abusifs de surveillance tels que les drones et caméras perfectionnées. Ces élus instrumentalisent la peur et ouvrent le risque d’une surveillance généralisée et durable de la population.

Le maire de Lisses, s’inscrivant dans cette dérive, avait décidé d’installer une caméra thermique à l’entrée du pôle administratif de la ville pour vérifier la température des agents. Après avoir déclaré qu’il irait lui-même prendre la température de ceux qui refuseraient de s’y soumettre, sous la pression du contentieux ouvert, l’édile a finalement opéré un revirement en rendant le dispositif facultatif. Mais il a également installé des caméras thermiques à l’entrée des écoles.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH), pointant une atteinte grave à la protection des données personnelles en particulier médicales et dénonçant un dispositif de surcroit inutile, a saisi une première fois le tribunal administratif de Versailles et, suite au rejet de ce dernier, a fait appel devant le Conseil d’Etat pour en demander le retrait.

Si le Conseil d’Etat a considéré que, pour la caméra installée dans le pôle administratif, la prise de température sans enregistrement ni manipulation des résultats était tolérable, il censure le dispositif mis en place dans les écoles de la ville prenant la température des élèves, des enseignants et du personnel, étant pour eux obligatoire et devant quitter l’établissement en cas de résultat anormal.

Comme la LDH le soulignait, la collecte de ces données médicales viole le règlement général sur la protection des données (RGPD), constituant un traitement automatisé, ceci sans texte justifiant l’utilisation de ces caméras pour des raisons de santé publique et sans preuve du consentement des personnes devant s’y soumettre. Ainsi, le dispositif porte une atteinte illégale au droit au respect de la vie privée et familiale comprenant le droit à la protection des données personnelles et de la liberté d’aller et venir. 

La LDH se félicite de cette décision qui met un frein aux dérives sécuritaires des élus et rappelle l’obligation du respect des libertés individuelles de chacune et de chacun.

Paris, le 30 juin 2020

Télécharger le communiqué en format PDF


Source: Les caméras thermiques de Lisses « débranchées » par le Conseil d’Etat

Il est encore temps – Mettons fin à l’accord UE-Mercosur ! 2 juillet 2020

L’Allemagne, qui prend la présidence de l’UE ce 1er juillet pour six mois a fait de la finalisation de l’accord UE-Mercosur une de ses priorités. Face à cela, ce sont 265 organisations de la société civile, dont la LDH, qui ont endossé une lettre ouverte aux Etats-membres de l’UE pour les appeler à rejeter cet accord UE-Mercosur.

Les négociations entre l’Union Européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Paraguay et Uruguay), en cours depuis plus de 20 ans, ont abouti à un accord politique en Juin 2019. Depuis lors, la Commission européenne travaille à la finalisation de l’accord de libre-échange UE-Mercosur en vue de sa signature. Mais l’accord est fortement controversé. Les parlements autrichien, wallon et récemment néerlandais ont même rejeté l’accord sous sa forme actuelle, tandis que des Etats membres importants de l’UE (la France et l’Irlande) ont exprimé de fortes critiques. Il est difficile de trouver un accord aussi obsolète, tant dans sa conception que dans sa concrétisation politique, que l’accord UE-Mercosur.

L’accord UE-Mercosur implique :

•l’aggravation de la destruction de l’environnement et de la crise climatique par l’expansion de l’exportation de voitures et l’extension des monocultures et des pâturages. La production de viande et de soja continue à accélérer la destruction de la forêt humide amazonienne, du Cerrado et des forêts tropicales sèches du Chaco, qui sont essentiels pour la stabilisation du climat mondial et pour la biodiversité. L’accord va récompenser ces pratiques.L’Observatoire brésilien pour le climat écrit: «Les garanties environnementales prévues dans l’accord, qui étaient déjà insuffisantes même avant la COVID-19, ont rendu le document obsolète». Le récent rapport sur l’Amazonie préparé pour le Parlement européen, affirme que «les incendies et le rythme de la déforestation en Amazonie mettent en danger la plus riche biodiversité de la planète». Et, dans les faits, l’accord ne contient aucun mécanisme innovant permettant d’assurer que les parties vont respecter les engagements internationaux qui ont été énumérés dans les dispositions relatives au développement durable. Le rapport ajoute encore: «Au cas où les violations persisteraient, l’accord ne prévoit que des pourparlers diplomatiques,sans possibilité d’imposer des sanctions matérielles(c’est nous qui soulignons)». Tandis que les conséquences sur l’environnement sont très concrètes, les dispositions pour les éviter sont insuffisantes. La situation décrite par le rapport du Parlement européen devrait suffire à convaincre les gouvernements que l’accord ne peut être ratifié tel qu’il est.

•l’augmentation des violations des droits de l’homme en toute impunité, notamment la violence physique et l’expulsion de petits cultivateurs et des populations autochtones de leurs terres. De nombreux dirigeants indigènes et défenseurs de l’environnement des pays du Mercosur ont été assassinés, dont cinq au seul Brésil entre Novembre 2019 et Avril 2020. Sous le gouvernement du Président Jair Bolsonaro en particulier, les violations des droits humains contre les minorités, les membres de l’opposition, ainsi que le démantèlement des droits des travailleurs se multiplient. En concluant un accord commercial avec des gouvernements qui promeuvent des politiques répressives et de pillage, l’UE récompense les violations des droits humains, en contradiction flagrante avec ses propres valeurs démocratiques. Les accroissements de parts de marché qui résulteraient de cet accord sont des encouragements supplémentaires à commettre de tels abus.

•une politique agricole tournée vers l’exportation générant un effet néfaste sur les prix à la production agricole dont dépendent les agriculteurs du Mercosur et des pays de l’UE. Cela va augmenter la souffrance animale et porter préjudice aux chaînes de production locales d’aliments. L’UE exige un meilleur bien-être animal et est dotée de normes sanitaires supérieures à celles du Mercosur, ce qui rend la production agricole plus coûteuse au sein de l’UE. Au lieu de renforcer les règles du Mercosur, cet accord va permettre un plus grand accès aux viandes bon marché sur les marchés européens, créant de la sorte une pression à la baisse sur les prix à la production agricole des deux côtés de l’Atlantique. L’augmentation des exportations de viande, l’intensification des cultures de soja et de canne à sucre, soit comme aliments exportés dans l’UE pour l’élevage, soit comme carburants, vont intensifier la destruction de l’environnement, l’utilisation d’OGMs, d’antibiotiques et de pesticides, et la pollution accrue des sols et des eaux. En outre, de nombreux pesticides utilisés dans le Mercosur sont interdits dans l’UE.

La pandémie de COVID-19 devrait nous rappeler que la destruction de la biodiversité et la poursuite d’une croissance économique et mondialisée débridée ont exposé l’humanité à des menaces majeures. Le statu quo n’est plus une option. L’accord avec le Mercosur nous ramène dans le passé. La politique commerciale doit, au contraire, soutenir des chaînes de valeurs relocalisées et plus courtes, moins susceptibles d’être perturbées, et offrant une plus grande liberté aux gouvernements pour créer des systèmes alimentaires et de santé résilients et décentralisés, et une capacité accrue de produire des médicaments et des équipements médicaux au niveau régional. L’UE doit transformer les objectifs de sa politique commerciale et s’orienter vers l’adoption de règles multilatérales qui appuient et sont subordonnées aux politiques écologiques, sociales et de droits humains, qui tiennent compte des limites de la planète et qui favorisent la paix. Au lieu de cela, cet accord-ci va accentuer les asymétries commerciales entre les blocs, accroître le chômage, détruire l’environnement et mettre en danger la santé des populations des deux côtés de l’Atlantique.

Nous avons besoin de plus de coopération, pas de moins : le rejet de l’accord UE-Mercosur ne doit pas être interprété à tort comme le rejet d’une coopération constructive avec la région. L’UE doit être un partenaire respectable et respectueux dans la lutte contre la faim et la pauvreté, le changement climatique et la mise en application des conventions fondamentales de l’OIT, les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales tels que définis dans la déclaration des Nations-Unis sur le sujet, et l’établissement de normes strictes pour le bien-être animal. Cette coopération doit être transparente, inclusive, et soutenir l’engagement actif des organisations de la société civile. Au lieu de cela, l’accord actuel entre l’UE et le Mercosur va dans la direction inverse.

C’est pourquoi nous appelons les gouvernements des Etat-membres, la Commission et le Parlement européen à rejeter cet accord !

Télécharger la liste des 265 organisations signataires.

Site officiel du collectif national unitaire Stop Tafta

Source: Il est encore temps – Mettons fin à l’accord UE-Mercosur !

Le 26 juin 2020 – Tribune de Malik Salemkour “Une régularisation dans l’intérêt de tous”, publiée dans Mediapart 2 juillet 2020

Tribune de Malik Salemkour, président de la LDH

Depuis des décennies, dans un discours xénophobe croissant, se succèdent des lois toujours plus restrictives en matière d’entrée et de séjour des étrangers comme d’accès au droit d’asile. La dernière loi « Collomb », adoptée en septembre 2018, produit pleinement ses effets et rend encore plus difficile la possibilité de vivre régulièrement sur notre territoire. De nouveaux dispositifs sont aussi venus fragiliser la vie quotidienne des demandeurs d’asile et des personnes sans titre comme les limitations des retraits d’argent liquide avec la carte d’allocation pour demandeur d’asile (carte ADA), l’allongement des délais pour bénéficier de la protection universelle maladie (Puma) et plus largement de l’aide médicale d’Etat (AME). Les difficultés sont encore accrues par la dématérialisation de procédures administratives déjà complexes et le comportement zélé de certains services préfectoraux.

Accueillir des personnes en détresse obligées de fuir leur pays n’est pas un choix mais une obligation internationale régie par la convention de Genève de 1951 sur le droit d’asile. Elle impose à la France des devoirs envers les personnes qui lui demandent cette protection, tant en matière d’accueil digne que d’accès à leurs droits les plus élémentaires. La réalité est que seulement la moitié d’entre elles disposent d’un hébergement, obligeant les autres à survivre dans des campements de fortune, dans une grande insécurité, et être sujettes à toute forme d’exploitation. Elles doivent, de surcroît, affronter un parcours administratif semé d’embûches qui commence par la quasi-impossibilité d’accéder aux préfectures autrement que par Internet. Elles subissent ensuite les aléas de la procédure dite de Dublin qui permet aux autorités françaises, qui en abusent, de les renvoyer dans le premier pays européen dans lequel elles ont été enregistrées. 40 % des demandeurs d’asile sont ainsi menacés d’expulsion. A défaut de se soumettre à cette procédure ils sont considérés « en fuite » et doivent disparaître dans la nature, pour des périodes allant jusqu’à dix-huit mois, avant de pouvoir déposer une demande en France.

Ces politiques et pratiques lourdes en charges administratives, policières et judiciaires conduisent à des violences, à jeter de nombreuses personnes dans la clandestinité, à leur imposer la précarité, la misère et de vivre en marge. Elles sont encore plus déplacées et inhumaines avec la crise extraordinaire que nous vivons.

La pandémie de la Covid-19 est sévère et n’est pas terminée. Les autorités politiques et sanitaires mondiales s’accordent à dire qu’il n’y aura pas de retour à la normale avant qu’un vaccin ne soit trouvé. En France, ce virus frappe durement, avec déjà cent soixante mille cas confirmés et trente mille morts. Pour limiter sa propagation et traiter au plus tôt les malades, toutes les femmes et les hommes qui vivent sur notre territoire doivent être protégés et soignés. Il s’agit d’humanité et de responsabilité, face à un enjeu majeur de santé publique qui ne peut souffrir d’aucune exception, particulièrement en raison de la régularité du séjour car les principales victimes sont les plus fragiles et les exclus.

La période a vu l’adoption de mesures d’exception au nom de l’état d’urgence sanitaire. Elle a ouvert une situation nouvelle qui oblige des décisions inédites et des mesures sociales fortes de la part des pouvoirs publics avec des moyens conséquents, en écho aux formidables solidarités de proximité qui ont émergé durant le confinement entre les habitants d’un même territoire, qu’ils aient des papiers ou non. Plutôt que d’aller toujours plus loin dans les atteintes au droit des étrangers et dans leur précarisation comme avec les dernières ordonnances réduisant les délais de recours, favorisant une justice d’abattage par visioconférence ou à juge unique face à des drames humains, il est au contraire nécessaire de rendre effectifs des droits fondamentaux égaux pour toutes et tous : accès aux soins, à un habitat digne, à la scolarisation des enfants, à des ressources minimales.

C’est en ce sens qu’avec les Etats généraux des migrations et de nombreux partenaires, la LDH demande la régularisation de tous les étrangers sans titre présents sur le territoire national. Cette décision politique à prendre est d’intérêt général et utile pour tous. Elle nous aidera à affronter ensemble cette grave crise sanitaire, économique et sociale, à égalité de droits et de dignité.

Paris, le 26 juin 2020

Malik Salemkour, président de la LDH

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Source: Le 26 juin 2020 – Tribune de Malik Salemkour “Une régularisation dans l’intérêt de tous”, publiée dans Mediapart

Lutte contre le terrorisme : des peines sans infraction 2 juillet 2020

Communiqué LDH

L’Assemblée nationale vient d’adopter en procédure accélérée, en première lecture, une proposition de loi « instaurant des mesures de sûreté à l’encontre des auteurs d’infractions terroristes à l’issue de leurs peines », proposée par des députés de LREM, qui s’affranchit des principes fondamentaux internationaux, européens et constitutionnels des droits de l’Homme.

Ce texte, se plaçant dans un sillage pleinement sécuritaire, s’ajoute aux considérables lois d’exception qui, sous prétexte de lutte contre le terrorisme, se sont multipliées depuis plusieurs années tant en matière de police administrative que de droit pénal et de procédure pénale.

Si ce texte était adopté définitivement, il instaurerait, à l’égard de personnes ayant purgé leurs peines et n’ayant commis aucune nouvelle infraction, de nombreuses interdictions ou obligations de surveillance privatives ou restrictives de liberté ou de droits qui constituent (en raison de leur nature, de leur nombre, de leur durée et des contraintes imposées) de véritables nouvelles peines après la peine. Même prononcées par un juge, mais dans le cadre d’une juridiction spéciale, c’est une entorse aux grands principes de droit pénal.

Se fondant sur la notion variable, incertaine et purement subjective de dangerosité, le nouveau dispositif non nécessaire, ni adapté ni proportionné, ainsi que le relève la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), instaure des peines sans infraction et risque de conduire à l’arbitraire.

C’est pourquoi, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) appelle les parlementaires à revenir sur cette nouvelle législation inutile, liberticide et tremplin vers une peine à durée indéterminée. 

Paris, le 26 juin 2020

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Source: Lutte contre le terrorisme : des peines sans infraction

le 25 juin 2020 – tribune commune “Devoir de vigilance : la protection des droits humains en péril”, publiée sur La croix 2 juillet 2020

Tribune signée par plusieurs organisations dont la LDH

Cette tribune collective, signée notamment par Sylvie Bukhari-de Pontual, présidente du CCFD – Terre Solidaire, Guillaume Duval, président du Collectif Éthique sur l’étiquette, Luc de Ronne, président d’ActionAid France, Sandra Cossart, directrice de Sherpa, Danielle Auroi, présidente du Forum citoyen pour la RSE et de nombreux autres signataires. Il s’agit de la première action en justice contre une multinationale sur le fondement de la loi pionnière sur le devoir de vigilance, adoptée en mars 2017.

La loi française sur le devoir de vigilance est unique au monde. Fruit de quatre ans de combat de la société civile, elle entend prévenir et réparer les atteintes aux droits humains et à l’environnement causées par les activités de multinationales françaises où qu’elles aient lieu sur le globe. Une décision du tribunal judiciaire de Nanterre du 30 janvier dernier remet pourtant sérieusement en cause cette loi humaniste et visionnaire, qui a tout juste 3 ans, en la renvoyant aux mains du tribunal de commerce. Alors que le dossier sera sur le bureau des juges d’appel le 24 juin prochain, l’enjeu à préserver l’esprit de cette loi pionnière est de taille.

En juin 2019, les Amis de la Terre France, Survie et quatre associations ougandaises mettent en demeure le groupe Total de se conformer à la loi sur le devoir de vigilance. Deux ans d’enquête en Ouganda avaient révélé que des dizaines de milliers de personnes allaient être affectées par un gigantesque projet de forage du pétrolier français, et que plusieurs milliers d’entre elles avaient déjà été privées du droit de cultiver leurs terres, sans avoir reçu de compensation financière adéquate. Le projet se développe en outre au cœur du parc naturel des Murchison Falls, une zone protégée pour sa biodiversité.

Quatre mois plus tard, en octobre 2019, considérant que Total n’avait toujours pas mis en œuvre les mesures nécessaires pour prévenir les impacts humains et environnementaux liés à ce projet, les six ONG assignent l’entreprise devant le tribunal judiciaire, engageant ainsi la première action en justice visant à faire respecter la loi sur le devoir de vigilance.

La décision du tribunal judiciaire de Nanterre du 30 janvier 2020 apparaît comme un nouveau frein dans la lutte contre l’impunité des multinationales. Estimant que le devoir de vigilance est assimilable à un acte de gestion de l’entreprise, le tribunal a jugé que le litige ne relevait pas de sa compétence mais de celle du tribunal de commerce.

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Source: le 25 juin 2020 – tribune commune “Devoir de vigilance : la protection des droits humains en péril”, publiée sur La croix