Les enfants en migration doivent être protégé-e-s 5 octobre 2020
Communiqué commun signé par l’Anafé, dont la LDH est membre.
A l’heure où des responsables politiques remettent ouvertement en cause l’accueil ou la prise en charge des mineur-e-s isolé-e-s étranger-e-s, nous faisons état des violations des droits que ces enfants subissent aux frontières françaises. La France doit redoubler d’efforts pour les protéger. C’est une obligation légale d’assurer que ces enfants très vulnérables aient accès à la protection dans notre pays.
Le Comité des droits de l’enfant examine cette semaine le rapport transmis par nos associations sur les manquements de la France à ses obligations en matière de protection des mineur-e-s isolés-e-s aux frontières. Nous demandons aux autorités françaises de mettre en place des mesures immédiates afin d’assurer à ces enfants un accès effectif à la protection de l’enfance, conformément à la Convention internationale des droits de l’enfant.
Refoulements illégaux, mises à l’abri insuffisantes et inadaptées, graves carences dans l’accompagnement des enfants : tels sont les constats quotidiens de nos associations, présentes aux frontières franco-italienne (de Menton à Modane en passant par Briançon), franco-espagnole (entre Irun et Hendaye) et franco-britannique (dans le Calaisis, le Dunkerquois, et tout le long du littoral de la Manche).
Ces constats, adressés au Comité dans le cadre de son examen périodique, sont détaillés dans un rapport inter-associatif, rendu public aujourd’hui [Les manquements des autorités françaises aux devoirs élémentaires de respecter, protéger et mettre en œuvre les droits des mineur-e-s isolé-e-s étranger-e-s en danger aux frontières intérieures terrestres de la France (frontières franco-italienne, franco-espagnole et franco-britannique)] et illustrés par plusieurs témoignages de mineur-e-s ayant été victimes de ces pratiques illégales et ces dysfonctionnements.
Dans ces espaces frontaliers, nombreux sont les mineur.e.s isolé-e-s étranger-e-s, en situation d’errance, qui se retrouvent éloigné-e-s de tout accès effectif à une protection et aux juridictions compétentes, sans aucune information sur leurs droits. Nombre d’entre elles et eux ont pourtant été victimes de violences dans leur pays, sur les routes de l’exil, ou même une fois arrivé-e-s en France, accumulant inévitablement des expériences traumatisantes.
Confronté.e.s, entre autres, à des violences physiques, à des privations de liberté, à des refoulements et/ou à des expulsions, ces mineur-e-s ont tendance à perdre toute confiance envers les autorités, au lieu de les considérer comme un moyen d’accéder à une protection.
A la frontière entre Vintimille et Menton, malgré plusieurs décisions du tribunal administratif de Nice condamnant leur refoulement en 2018, 2019 et début 2020, de nombreux enfants continuent d’être refoulé-e-s, certain-e-s après une privation de liberté de plusieurs heures, dans des conditions indignes, sans protection sanitaire spécifique et sans séparation avec les adultes. À Calais, la Cour européenne des droits de l’homme a déclaré, le 28 février 2019, que le défaut de prise en charge par les autorités françaises d’un mineur isolé étranger de 11 ans, Jamil Khan, ainsi que les conditions insalubres, dangereuses et précaires dans lesquelles il vivait, étaient constitutifs d’un traitement dégradant, en violation de la Convention européenne des droits de l’homme.
Ces carences et ces atteintes aux droits des enfants contribuent à leur constante mobilité mais aussi à une plus forte exposition à l’emprise de réseaux d’exploitation. Cette situation peut également les conduire à prendre des chemins de plus en plus dangereux, au péril de leur vie. D’autant plus dans le contexte actuel du Brexit, où les négociations politiques en cours et les déclarations médiatiques qui les accompagnent brouillent les informations quant aux possibilités de réunification familiale vers l’Angleterre. Ainsi, alors même que l’accord de retrait prévoit une période de transition jusqu’au 31 décembre 2020, certains enfants qui pourraient être réunis avec un membre de leur famille renoncent à accéder à une protection et prennent des risques inconsidérés.
L’ensemble de ces manquements a été soumis au Comité des droits de l’enfant, organe de l’ONU chargé de vérifier la bonne application de la Convention internationale des droits de l’enfant par les Etats parties. Cette année démarre en effet l’examen de la situation de la France par le Comité, processus qui s’étend sur plusieurs mois.
Associations signataires :
Amnesty International France ; Anafé ; La Cimade ; Help Refugees ; Médecins du Monde ; Médecins sans Frontières ; Refugee Rights Europe ; Refugee Youth Service ; Safe Passage ; Secours Catholique-Caritas France.
Avec le soutien des associations :
AdN – Association pour la démocratie à Nice ; ADRA France antenne de Dunkerque ; Alliance-DEDF ; AMiS ; ASGI ; Auberge des Migrants ; Bethlehem ; Cercle de Silence Hazebrouck ; Collectif Kesha Niya Kitchen ; Diakité ; Human Rights Observers ; LDH – Dunkerque ; Migraction59 ; MRAP Littoral ; Project Play ; Refugee Women’s Centre ; Salam Nord/Pas-de-Calais ; SAVE ; Solidarity Border ; Tous Migrants ; Utopia56 ; WeWorld Onlus.
Le 5 octobre 2020