Le surveillant général Muselier perd la face 5 mars 2020
Communiqué LDH
Par une délibération du 14 décembre 2018, le conseil régional Sud (ex Provence-Alpes-Côte d’Azur) a autorisé une expérimentation de reconnaissance faciale dans deux lycées de Marseille et Nice. Cette expérimentation devait être entièrement financée par l’entreprise américaine Cisco, qui profite ici de la politique sécuritaire des élus locaux pour tester ses technologies de surveillance. L’objectif affiché par le conseil régional, et en particulier par son président Renaud Muselier, était clair : étendre, au terme de cette expérimentation, ce dispositif à l’ensemble des lycées de la région.
Le 19 février 2019, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) avec la Quadrature du Net, la CGT Educ’Action des Alpes-Maritimes et la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) des écoles publiques des Alpes-Maritimes ont déposé un recours devant le tribunal administratif de Marseille pour demander l’annulation de la délibération du conseil régional, en s’appuyant essentiellement sur le règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD) : absence d’analyse d’impact en amont du processus, absence de cadre juridique à la reconnaissance faciale, traitement des données biométriques manifestement disproportionné par rapport à l’objectif poursuivi.
En octobre 2019, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) avait émis un avis très critique insistant sur le fait que « les traitements de reconnaissance faciale sont des dispositifs, de nature biométrique, particulièrement intrusifs qui présentent des risques importants d’atteinte à la vie privée et aux libertés individuelles des personnes concernées ».
Par un jugement rendu ce 27 février, le tribunal administratif a reconnu la pertinence des requêtes et a décidé d’annuler cette délibération.
La juridiction administrative a retenu l’incompétence du conseil régional pour mettre en place une telle expérimentation dès lors que seuls les chefs d’établissements scolaires sont compétents en matière de missions d’encadrement et de surveillance des élèves.
Le tribunal a jugé aussi que la région, en se contentant de recueillir le consentement des lycéennes et lycéens ou de leurs représentants légaux par la signature d’un simple formulaire, ne donnait pas les garanties suffisantes pour un consentement libre, spécifique, univoque et éclairé à la collecte de leurs données personnelles (qui plus est des données biométriques) et que la région n’établit pas que les finalités poursuivies (fluidifier et sécuriser les contrôles à l’entrée des lycées) n’auraient pas pu être atteintes par des mesures moins excessives.
La LDH salue cette décision qui vient bloquer une stratégie politique de surveillance généralisée des lycéennes et lycéens par des outils toujours plus disproportionnés au mépris des libertés publiques.
Paris, le 27 février 2020