La hausse des droits d’inscription dans l’enseignement supérieur pour les étudiants non-européens : discrimination par l’argent et par l’origine. 18 décembre 2018
Communiqué de presse du 18 décembre 2018
La Ligue des droits de l’Homme, section d’Aix-en-Provence et du Pays d’Aix,s’élève contre la hausse des droits d’inscription des étudiants venant de pays situés en dehors de l’Union européenne.Elle apporte son soutien aux étudiants, aux personnels enseignants et non-enseignants, aux syndicats qui les représentent et aux instances universitaires auxquelles ils participent, qui se battent contre cette injustice.
Actuellement,les étudiants étrangers non européens paient les mêmes droits que les étudiants français, soit 170 € pour une année de formation en licence, 243 € en master et 380 € en doctorat. Le premier ministre, Édouard Philippe, a annoncé le 19 novembre qu’à partir de la prochaine rentrée, ils devront s’acquitter de 2 770 € en licence et 3 770 € en master et doctorat. Soit une hausse de près de 1 500 %.
Unetelle augmentation est une mesure de discrimination par l’argent, destinée à interdire à la jeunesse des pays pauvres d’accéder à l’enseignement supérieur français. Le coût des études pour ces jeunes était déjà un obstacle souvent infranchissable. Mais avec la hausse annoncée, ce qui prend brutalement fin, c’est la mission confiée à l’Université et aux autres formations supérieures d’accueillir et de former des étrangers, pour le bénéfice de chacun des jeunes concernés mais aussi de leur pays et dans certains cas de la France. Avec le raisonnement que « plus c’est cher, plus c’est attractif », l’accueil des étudiants internationaux est désormais réservé à ceux qui participeront au financement de nos universités sous-équipées et sous-encadrées ; à ceux aussi qui,pense-t-on, feront augmenter le prestige de l’enseignement supérieur français dans le cadre d’une compétition internationale pour les “talents”. Un pas de plus est franchi dans la marchandisation de l’enseignement supérieur. Quant aux bourses promises pour atténuer la dureté de la mesure annoncée, leur nombre(15 000) est notoirement insuffisant au regard du nombre d’étudiants (343400) concernés par cette mesure.
Mais il y a autre chose. Si l’on s’en tient aux seules universités, en 2017/2018, la moitié des étudiants étrangers viennent du continent africain, Ce sont donc les jeunes des pays africains qui devront en majorité renoncer à venir étudier, se former et se socialiser en France. Un tel ostracisme à l’égard des ressortissants africains ne peut pas être ressenti par les intéressés autrement que comme une discrimination ethno-raciale, indirecte certes, mais bien réelle dans les faits.Nous partageons ce sentiment. Pour ce gouvernement, rendre « plus attractive » l’université française c’est aussi la rendre plus blanche.
Notre opposition à cette mesure attentatoire au droit à l’éducation est dictée par le texte-même de la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 dont nous fêtions il y a quelques jours (le 10 décembre) le 70ᵉ anniversaire.
Toute personne a droit à l’éducation…l’accès aux études supérieures doit être ouvert en pleine égalité à tous en fonction de leur mérite ». (article 26, alinéa 1)
Fidèles aux valeurs d’une formation supérieure accessible à tous, ouverte sur le monde,offrant à la jeunesse un lieu de connaissance et d’échanges, nous demandons le retrait de la mesure d’augmentation des droits d’inscription imposée aux étudiants extra-européens, mesure doublement discriminatoire, incompatible avec les valeurs communes à l’Université et à tous les défenseurs des droits humains.
Ligue des droits de l’Homme
Section du Pays d’Aix-en-Provence
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