Etat d’urgence : une QPC gagnante pour ouvrir la voie à une censure de la loi de sécurité intérieure 15 janvier 2018
Communiqué LDH
Par décision en date du 11 janvier 2018, le Conseil constitutionnel, sur saisine d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à laquelle la Ligue des droits de l’Homme était associée, a déclaré contraire à la Constitution le 2° de l’article 5 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, dans sa rédaction antérieure à la loi du 11 juillet 2017, qui donnait pouvoir au préfet d’instituer par arrêté des « zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé ». Le Conseil constitutionnel a considéré que le législateur n’avait soumis la création de telles zones à aucune condition, ni défini la nature des mesures susceptibles d’être prises par le préfet, ni encadré leur mise en œuvre de garanties.
La Ligue des droits de l’Homme (LDH) est une fois de plus en situation de dire qu’elle avait raison, avec d’autres associations requérantes, de considérer que des dispositions de l’état d’urgence, faux-nez de l’état de siège, exhumé des mémoires de la guerre d’Algérie, portaient une lourde atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit.
Dans une décision antérieure du 1er décembre 2017, le Conseil constitutionnel avait déjà censuré les dispositions de l’article 8-1 de la loi de 1955 dans sa rédaction issue de la loi du 21 juillet 2016 qui, dans ces « zones de protection », autorisait l’autorité administrative à procéder à des contrôles d’identité, inspections visuelles et fouilles des bagages ainsi qu’à la visite des véhicules. Il avait considéré que le législateur ne pouvait prévoir de telles opérations « de manière généralisée et discrétionnaire », qui seraient alors attentatoires à la liberté d’aller et venir et au droit au respect de la vie privée.
La loi du 30 octobre 2017 relative à la sécurité publique et à la lutte contre le terrorisme, qui, dans son article 1er, donne pouvoir à l’autorité administrative d’instaurer des « périmètres de protection » inspirés des « zones de protection » de la loi de 1955, comporte des dispositions tout autant contraires à la Constitution. Le Conseil constitutionnel, déjà saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, ne pourra, par conséquent, que se prononcer dans le même sens que dans les deux décisions précitées car, par les dispositions censurées, l’article 1er de la loi de 2017 n’assure pas « une conciliation équilibrée entre, d’une part, l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public, et, d’autre part, la liberté d’aller et venir et le droit au respect de la vie privée ».
La LDH réaffirme que la lutte contre le terrorisme peut et doit s’inscrire avec efficacité dans l’Etat de droit, dans le respect du rôle de la justice et la prévention de l’arbitraire.
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