Les libertés individuelles en débat à Venelles 5 février 2011
Pourquoi Venelles ? Ce n’est sans doute pas un hasard si la Ligue des Droits de l’Homme a choisi cette commune pour organiser son premier débat public.
D’autant qu’ici, on est à la veille d’imiter la grande soeur aixoise en matière de vidéosurveillance.
Même si l’objectif affiché par les organisateurs est avant tout de poser des questions en matière de sécurité. Et, sur certains points, de faire des propositions…
Philippe Senegas, président de la section aixoise de la LDH a introduit la séance devant un public venu nombreux. Précisant que ce premier débat faisait suite à la signature, au plan national, par une cinquantaine d’organisations associatives et syndicales, du « Pacte pour les droits et la citoyenneté ».
Pour illustrer et lancer la réflexion, Gilles Sainati, magistrat membre du Syndicat de la magistrature, a fait un long exposé sur le développement des outils de vidéosurveillance, le fichage, la biométrie… et leur compatibilité avec les libertés individuelles.
Quel encadrement ? Pourquoi cette généralisation ? Quelles conséquences ? Sécurité et liberté vont-elles de pair ? « Depuis 2002 nous enregistrons 42 nouvelles lois sécuritaires, cela engendre une augmentation des poursuites pénales », note-t-il. » Et puis on a évacué le contradictoire… on a démantelé la section économique… on a introduit l’automaticité des peines, prenant exemple des pénalités routières… avec pour conséquences la tenue de fichiers… ». Et de citer le fichier STIC (Système de traitement des infractions constatées) regroupant les informations concernant les auteurs d’infractions « présumés coupables, témoins ou victimes » interpellés par les services de la police nationale.
Le public n’a pas manqué de poser des questions. François Hamy, élu aixois d’opposition, s’est interrogé sur Facebook qu’il a qualifié de « STIC caché » en tant que réseau social consultable.
Anne Mesliand, conseillère régionale et présidente de la commission « solidarité et sécurité, santé et services publics », a rappelé que la vidéosurveillance n’était pas une politique de la Région qui reste attachée à la prévention.
« Il ne faudrait pas qu’il y ait détournement des dispositifs sociaux », s’est-elle inquiétée. « Il est prévu de renforcer la police nationale par des effectifs citoyens fortement indemnisés avec les risques que l’on imagine », a dit tel autre. « D’autant que l’argument des maires est de dire que la population le demande ».
« Y a-t-il donc un risque de clientélisme ? » Luc Foulquier, responsable du Parti communiste, s’exprime en tant que citoyen et demande instamment que l’on se projette dans l’avenir… « Est-il bon de remplacer les humains par des caméras et d’exploiter la peur ? » Gilles Sainati s’inquiète au final des conséquences de la LOPPSI (loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure) qui vise, dit-il, « à développer la vidéosurveillance et le transfert au privé de la sécurité. » Philippe Senegas rappelle pour conclure les propositions concrètes du Pacte qui concernent la démocratie, la protection de la vie privée et des données personnelles, les droits et libertés face à la justice, à la police et au système pénitentiaire, la lutte contre les discriminations, l’égalité sociale et les solidarités. « Je suis preneur de l’avis des élus », a-t-il précisé. « Il faut que leurs réponses éclairent les citoyens. »
A noter enfin qu’aucun élu de la majorité municipale de Venelles n’était présent. Le maire, Jean-Pierre Saez, a simplement déclaré : « J’assume complètement le choix largement partagé par les Venellois de la mise en oeuvre de la vidéoprotection ».
Marie-Pierre Peyrou, élue d’opposition, présente au débat, a déclaré avoir voté contre cette mise en oeuvre. Et, au-delà de Venelles, le débat reste donc très
ouvert.
S.L.
Gilles Sainati est l’auteur de la « Décadence sécuritaire », éditions La Fabrique.
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