Les Roms roumains à Aix 4 septembre 2010
Sur la ville, on compte trois groupes de Roms roumains, et quelques isolés. Il y a aussi des « Yougoslaves » dont nous ne parlons pas ici.
Ces groupes ont chacun moins de 30 personnes. Ce sont des sédentaires roumains, qui essayent de gagner un peu d’argent pour faire vivre les familles restées en Roumanie. Mais la France a pris des dispositions pour qu’ils ne puissent pas être autorisés à travailler, et qu’ils soient facilement expulsables, bien que citoyens de l’union européenne. Ils vivent dans des caravanes pourries récupérées lorsqu’elles sont abandonnées par les Gens du Voyage. Ils ne font pas partie des Gens du Voyage, n’ont d’ailleurs pas de contacts avec eux. Il s’agit simplement de gens discriminés chez eux et cherchant un lieu qui leur permette de survivre. Mais sans droit au travail ni aux soins, il leur est impossible d’obtenir de logement.
Un premier groupe, d’abord repoussé du pont de l’Arc vers Luynes, a été fortement incité par la mairie annexe de Luynes à déménager sur le plateau de l’Arbois. On leur a expliqué qu’il s’y trouvait l’aire d’accueil des Gens du Voyage, qu’ils s’y installeraient, auraient alors de l’eau et l’électricité. Et ils l’ont cru.
Mais ce ne sont pas des Gens du Voyage. Les Gens du Voyage sont des Français qui ont un carnet de circulation, c’est très précisément défini. Et les aires d’accueil ne peuvent pas recevoir d’autres personnes que des Gens du Voyage. La mairie, responsable de l’aire d’accueil, le sait fort bien.
Ce groupe se trouve donc sur un terrain vague sur le plateau de l’Arbois, loin de tout, et bien sûr sans eau ni électricité. Ne parlons pas des possibilités de scolariser ou soigner les enfants.
Un second groupe se trouvait chemin des flâneurs à la ZAC, après avoir été chassés en janvier d’un terrain situé entre la ZAC et les Milles. Le chemin des flâneurs est une impasse en terre, coincée entre l’autoroute et des clôtures d’entreprises. Ils étaient sur le bas-côté. Ils ont d’abord subi une demande d’expulsion parce qu’ils seraient dangereux pour l’autoroute. Elle passe deux mètres en contrebas et ils en étaient séparés par une clôture de deux mètres de hauteur et une haie d’arbres. La Justice a estimé que la demande d’expulsion était infondée. Alors la Maire d’Aix a contre attaqué, et a demandé leur expulsion parce qu’ils seraient un trouble manifeste à l’ordre public.
Le trouble est-il dû à leur implantation en un lieu invisible de tous, ou parce que certains faisaient la manche en ville ? Mais on ne peut pas expulser parce qu’on fait la manche.
La Maire a rajouté qu’ils devaient eux aussi monter à l’Arbois, pour s’installer sur l’aire d’accueil des Gens du Voyage. Et cette fois-ci la Justice a accepté l’expulsion. Mais ils ne sont pas des Gens du Voyage, et n’ont pas droit à l’aire d’accueil. Le jugement était du 20 juillet, la Maire a demandé l’aide de la puissance publique pour expulser, qui lui a été accordée par un arrêté du Sous-Préfet en date du 3 août. La Police qui faisait déjà de fortes pressions depuis deux mois a augmenté ses pressions, et ils ont disparu d’un coup un peu avant le quinze août, par peur des interventions policières. Ils ont disparu dans la nature sans laisser de traces…on les retrouvera probablement cet hiver.
Un troisième groupe est situé près de la voie ferrée de Rognac entre ZUP et ZAC, à 300 mètres des précédents, depuis quelques années. La Police a profité de l’expulsion des précédents pour faire de fortes pressions sur eux afin qu’ils partent. On mélange les affaires, on leur dit que le tribunal a décidé de leur expulsion, etc…Et on les contrôle sans cesse. Ils avaient très peur, mais ils avaient compris que le Tribunal n’avait jamais décidé de leur expulsion et qu’ils n’étaient pas sur un terrain communal. Ils sont restés.
Alors « on » a organisé le grand cirque. Le 19 août, après avoir informé la presse, ont débarqué CRS, PAF, les polices d’Aix, pour faire un contrôle d’identité et écraser avec des bulls les caravanes abandonnées par les précédents. Cela permet de les terroriser (ce genre de contrôles ne se fait pas dans la douceur, ni le respect des personnes), et de tout mélanger, contrôle d’un côté, destruction de caravanes de l’autre, pour bien montrer qu’à Aix on expulse, et avec la manière forte.
Un petit grain de sable : l’Evêque voulait les visiter, il est arrivé en même temps que les policiers, et ce qu’il a vu ne lui a pas plu.
Enfermé à Dachau de 1937 à 45, le pasteur Martin Niemöller a écrit ce texte qui sera la conclusion :
« Quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les Juifs, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas Juif.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les catholiques, je n’ai pas protesté parce que je ne suis pas catholique.
Et lorsqu’ils sont venus me chercher, il n’y avait plus personne pour protester. »
Nous sommes ici pour protester.
Marc Durand, Ligue des Droits de l’Homme